à éloigner les Russes le plus que possible cle
toute immixtion dans l’administration du pays,
et se rendre tôt ou tard complètement indépendant.
Dadian flottait ainsi entre sa femme et le gouvernement
russe, quand je mis le pied dans ses
états et on s’explique facilement la belle réception
que me fit sa femme. Elle me fit dire qu’un voyageur
ne pouvait rien voir dans le pays sans la
permission de Dadian, et afin que je ne visse rien
du tout, on me força à quitter Mouri au bout de
quelques minutes pour courir après Dadian. On
eut soin de me faire venir l’eau à la bouche :
« Nous avons de bien belles choses à vous montrer,
me disait le majordome de la princesse,
mais sans Dadian, néni : vous n’avez rieîi à voir
ici ; partez à l’instant : je ne sais pas d’ailleurs
comment on a osé vous recevoir à Saïermi et à
Laïlache. » Et on m’envoya coucher à 8 verst de
Mouri, sur le chemin de Gordi, dans le village
deLoukouano, engagé bien avant dans une vallée
latérale à droite de la Tskhénitskali : le bord de
la rivière est couvert de champs de maïs et de
millet; mais les villages sont sur la hauteur.
On passe la rivière à Mouri, en face du palais
de Dadian, sur un pont du diable , composé de
deux à trois poutres sur lesquelles on a posé des
claies d’osier pour plancher ; l’ancien pont a été
entraîné dans une inondation.
Au-delà du pont, on peut admirer une fort
belle église ancienne, travaillée dans le style de
celle de Koutaïs, mais sans coupole.
La gorge où s’étend Loukouano, consiste
principalement en schiste noir surmonté d’un
grès qui s’écaille.
Au point du jour, le 22 septembre, toutes les
cimes des montagnes autour de Loukouano
étaient couvertes de neige.
Pour déjeûner, on nous fit faire une tournée
de trois verst, puis nous revînmes sur nos pas
pour continuer notre voyage. Par une boue
épaisse et par la pluie, on peut s’imaginer que
6 verst de plus ou de moins ne sont pas une bagatelle
: mais ainsi le voulait l’usage du pays ;
nous avions soupé et logé chez l’un ; c’était le
tour d’un autre à nous donner à dejeûner.
Nous suivîmes la Tskhénitskali l’espace d’un
demi-verst, puis nous coupâmes tout droit à travers
quatre contre-forts pour atteindre le lit de
la Djonauli ; car il paraît que plus bas les rives
de la Tskhénitskali sont impraticables. Les combes
qui séparent ces contre-forts consistent aussi
en schiste noir surmonté de grès : le premier
atteint une épaisseur considérable; on ne voit
pas de. calcaire dans le voisinage par-dessus :
ses couches sont très-multipliées. Dans la première
combe, le porphyre pyroxénique se montre
à travers le schiste.