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 cette  tolérance  qu’on  aurait  trouvée  du  temps  
 de Chardin.  Le nom de  luthérien dans  ces  pays  
 est le plus usité pour exprimer le protestantisme  
 en  général. 
 Le vin qu’on nous donna à foison était rouge et  
 très-bon ; aussi  le proverbe du pays dit :  « vin de  
 prêtre , » pour dire du bon vin. 
 Les moines grecs suivent tous  la règle de saint  
 Basile,  et  portent la robe noire,  avec  le bonnet  
 cylindrique noir et  le voile  noir qui descend sur  
 les  épaules,  à  peu  près  comme  on  le  voit  dans  
 les dessins de Tournefort. 
 Chaque moine  vit  à  part dans  sa petite  maisonnette  
 en  bois,  qui  lui tient  lieu  de  cellule.  
 On y voit un vieux feutre ou  tapis  sur  un  banc  
 ou  sur une  estrade  relevée  de  quelques  pouces  
 au-dessus du sol  et  qui lui sert de  lit ;  quelques  
 vieux  livres de  prières  sont  rangés  sur  des  tablettes, 
   et  sa garde-robe des  plus minces  pend  
 à quelques  chevilles.  Son  petit  entrain de ménage  
 est rangé dans un  coin. 
 Quelques-uns de ces moines  s’occupent à  enseigner  
 à lire et à écrire à des jeunes gens la plupart  
 destinés à devenir des prêtres campagnards.  
 D’autres,  quand  leur devoir ne  les appelle pas à  
 l’église,  peignent  des  images,  sculptent  en  bois  
 de  petites  figure?  d’autel,  des  croix;  j’en  ai vu  
 un  qui  faisait des choses fort délicates. 
 Le  i 5  août,  j’assistai  aux  cérémonies  de  la  
 fête  de  l’Assomption  de Notre-Dame. Cette  fête  
 n’eut rien de bien extraordinaire, quoiqu’on accourût  
 de toutes parts pour y assister,  et que ce  
 fût  celle  de la patronne  de  l’église. L’archimandrite  
 me  fit  ce  jour-là  l’honneur de m’inviter à  
 sa table, ce que je refusai pour pouvoir dessiner  
 tout à mon aise. 
 Je  demandai  à  plusieurs  reprises  à  voir  les  
 livres grecs, arméniens,  géorgiens, qui  sont conservés  
 dans  ce monastère.  Personne  ne  voulait  
 en  savoir  quelque  chose.  Ghélathi  possède  des  
 trésors particuliers ; on sait qu’on y  a transporté  
 une  partie des  livres de Pitzounda, entre  autres  
 des  chroniques  très-curieuses  de  l’histoire  des  
 patriarches et des rois  du pays. On sait aussi que  
 c’est ici que Vakhtang V a  puisé pour composer  
 sa  chronique  de  Géorgie.  Les  rois  de  Géorgie  
 avaient  envoyé,  dans  le  temps  de  leur  gloire,  
 des jeunes  gens,  soit à Constantinople,  soit dans  
 les villes célèbres de l’Asie-Mineure,  pour y  étudier  
 et pour y traduire  en  géorgien les ouvrages  
 les plus  célèbres de la  littérature grecque. 
 J’attribue  ma  non-réussite,  à  l’égard de ces  
 livres  de Ghélathi,  à  l’absence de  l’archevêque.  
 car je  sais  que  le  père Célestin de  Koutaïs  m’a  
 répété  que  plusieurs  fois  l’archevêque  lui  avait  
 parlé de  ces  livres  grecs  et  latins,  et  l’avait engagé  
 à aller les  examiner,  ce qu’il n’avait jamais