trouvâmes encore l’établissement tout entier
et bien conservé (i). La grotte taillée dans une
couche de cendres durcies et compactes était
spacieuse et très-sèche. On y reconnaissait l’industrie
du Géorgien et de l’Imérétien dans
l’ameublement du pressoir. Le Satznakhèli ou
grand tronc d arbre creusé qui sert de cuve pour
mettre le raisin, l’écraser, le presser, était remplacé
par de longs bassins taillés dans le roc vif
et ménagés en creusant la grotte ; l’un avait six.
pieds de profondeur; le moût sortait par
un trou pratiqué à l’une des extrémités. Cela
m a rappelé aussi les bassins de ce genre des
grottes deTépékerman et deFitski en Crimée (2),
qui ont été une énigme pour les voyageurs :
ils prouvent combien il y avait d’analogie dans
les moeurs des anciens habitants de tout le pourtour
de la Mer Noire, tant Grecs que Géorgiens.
Nous n eûmes rien de plus pressé que de nous
établir dans cet asile et nous y passâmes la nuit
la plus paisible malgré l’orage et la tempête qui
se jouait dans les gros noyers. Le lendemain
tout était calme, et la plus belle des aurores vint'
se refleter jusque sur les voûtes de notre nouveau
palais. Apres avoir bu notre thé sous le
noyer antique qui ombrageait l’entrée de notre
(d) Voyez Atlas, IV série, pl. 5.
(2) Voyez Atlas, IV série, pl. 6, fig. 4.
/
m
grotte, nous expédiâmes un de nos cosaques
dans un village voisin pour nous y procurer des
vivres, car notre hôte n’avait à nous offrir que
du fromage en fils ; puis nous nous hâtâmes
d’aller satisfaire notre impatiente curiosité.
Vardsie ou Vardsihé dont le nom signifie en
géorgien et en arménien même forteresse des
roses, avait été selon la tradition le séjour affectionné
de la reine Thamar ; on prétend même
qu elle le fonda ; il se peut qu’elle l’agrandit ;
mais Vardsie certainement est bien plus ancien
que Thamar.
Jadis nous aurions .pu arriver tout droit du
fond de la gorge au centre de la ville en suivant un
chemin souterrain qui traversait le rocher; il
est devenu impraticable aujourd’hui jusqu’à un
certain point, et nous fûmes obligés de faire le
tour du rocher par un chemin affreux où les
piétons seuls peuvent se hasarder, en se traînant
parmi les massifs volcaniques éboulés, et quand
nous fûmes arrivés au pied même de la paroi à pic
où commencent les cryptes nombreuses, nous
escaladâmes cette paroi en mettant nos pieds
dans des trous qui, taillés dans le rocher, tiennent
lieu d’escalier.
On passe par plusieurs étages de grottes avant
d arriver a celui où sont les hypogées et édifices
principaux, ranges le long d’une saillie qui tient
lieu de 1 ue. Le plus considérable, celui qui