nal, paraissaient Rustique et Jean enchaînés ; on
les avait transportés des prisons d’Apsaronte;
vis-à-vis d’eux se placèrent les accusateurs;
c’étaient les plus graves personnages de la nation
des Lazes. Ceux-ci demandèrent d’abord qu’on
fit lecture de la lettre de l’empereur, car ils
comprenaient le grec ; cette lecture hit faite par
un hérault Goubazès fut pleinement justifié
par les Lazes. Malgré cela, Athanase permit aux
coupables de se défendre, et les murmures de
l’assemblée prouvaient avec combien de peine
elle supportait ce répit. Toutes les paroles artificieuses
de ces assassins ne les sauvèrent pas ;
Athanase prononça contre Rustique et Jean un
arrêt de mort. On les promena sur des mulets
par toutes les rues d’Arkhéopoîis, un hérault
marchant devant eux et criant : Qu’on apprenne
à s’abstenir de meurtres et à respecter les lois.
Ensuite ils eurent la tête tranchée. Le jugement
de Martin fut renvoyé à l’empereur. Cet acte de
justice retint les Lazes dans l’obéissance.
Cependant la paix n’était pas encore rétablie
dans le pays. Il était arrivé un incident des plus
fâcheux pour les Romains. Quand Athanase
était arrivé avec Tsathès, il avait été accompagné
par un officier payeur nommé Sotérichus,
chargé de remettre les sommes qu’on payait aux
Outigours, aux Alains ou Ossi, etc.
Pour être plus à portée de faire ses paiements,
Sotérichus s’était rendu chez les Missimiens s
peuplade sujette des Lazes, et située au nord-
est de l’Apsilie, dans la vallée de l’Engour et
vers les sources de la Khopi et de la Tchénis—
tskali. La grande route du Svanethi d’où l’on
passait à droite et à gauche de l’Elbrous, chez
les peuples du nord du Caucase, traversait leur
pays ( 1 ). Sotérichus comptait faire dire de là, aux
Outigours, aux Alains ou Ossi, devenir chercher
leur argent... Mais les Missimiens soupçonnèrent
, à cet effet, que Sotérichus allait s’emparer
d’une place forte de leur pays, pour y établir
ses comptoirs, et fis envoyèrent chez lui des
députés pour le prier de quitter Boukloon où il
s’était établi, offrant de lui porter des vivres
dans tout autre lieu qu’il choisirait pour sa résidence.
Sotérichus très-offensé de cette hardiesse,
fit charger de coups ces députés et les
renvoya demi-morts, et sans nulle précaution,
s’endormit là, comme quelqu’un qui n’aurait fait
que châtier des esclaves.
(1) J’ai parlé, dans le premier volume, du retour de
l’ambassade de Zémarque en 5y 1 ; son voyage devait se
faire par cette route de la Souanie et des Missimiens; quand
Sarodius, roi des Alains ou Ossètes, l’avertit que les Perses
l’attendaient sur ce passage pour le massacrer. Il choisit
alors la route de Dai'inès ou du Tsébelda, que j’ai décrite
plus haut; voyez aussi Le Beau, Bas-Empire, éd. Saint-
Martin, t. X, p. 69.