de porphyre pyroxénique qui montre à peine sa
tête à mi-pente du vallon.
D’ici jusqu’à Laïlache, nous cheminâmes toujours
au milieu des maisons et des arbres recouverts
de vigne, chargée de grosses grappes
de raisin, qui sont les vignobles du pays. Les
ceps lancés d’un arbre à l’autre faisaient de longues
guirlandes où la main n’avait que l’embarras
du choix, quand nous passions et repassions à
cheval sous ces arcs-de-triomphe.
Dans ce pays calcaire, une esplanade terrassée
à près de 1000 pieds au-dessus du Ladsanouri,
porte Laïlache, l’une des résidences du Dadian
de Mingrélie. Nous nous installâmes auprès de
son palais de bois , où il y a plus de galeries que
de chambres. Nous vîmes avec surprise des
vîtres aux fenêtres.
A côté de ce palais, pivotant sur une cage de
poutres, élevée de g pieds au-dessus du sol,
se trouvaient éparses quelques sacles étroites
sans fenêtre ni cheminée, où loge la cour pendant
les séjours du prince. Une petite église
bâtie en tuf, la ruine d’un château (1), perché
sur la pente même du rocher, de superbes arbres,
entre autres un tilleul magnifique, qui ombragent
de grandes dalles de pierres, tenant lieu de bancs,
(i) Bago, Carte de l’état-major.
de divans, de table pour y jouer aux dames avec
de petites pierres sur un damier grossièrement
rayé sur la pierre (i)* voilà tout le luxe de ce
prince puissant.
Ce qui vaut mieux que tout cela, c’est la vue
magnifique dont on jouit sur le Ladsanouri et
sur le paysage que nous venions de parcourir.
On peut se figurer Laïlache comme le Signal des
Français, dans le val de Travers, au-dessus de
Fleurier. On domine de là comme d’un observatoire
; c’est pourquoi on en avait fait un château
fort.
Laïlache a quelques boutiques de juifs où l’on
ne peut cependant pas trouver du sucre, mais
bien du papier grossier à 24 sous la main. A
l’entrée du bourg, tour carrée, comme celle du
Ratcha, avec une ruine à côté.
De Laïlache pour atteindre Mouri, distant de
10 verst, nous redescendîmes dans la vallee du
Ladsanouri, sans nous perdre dans le labyrinthe
des guirlandes de vignes chargées de raisin :
car on ne peut pas dire qu’il y ait de chemin ;
chacun va où il lui plaît ; comme on ne se sert
(1) Dans l’ancienne cour des rois d’Iméreth a Koutaïs,
Güldenstâdt dit qu’il y avait une de ces dalles qui avait
j4 pieds de long, 6 pieds de large et 10 pouces d’épaisseur.