Le petit bourg de Kherthvis est au pied du
fort, le long de la face du rocher qui regarde
le sud ; sa population se monte à 800 âmes
parmi lesquelles il y a quelques petits -marchands
arméniens. On a construit deux ponts en bois,
1 un sur le Kour, l’autre sur la Taparayanié.
Le capitaine commandant de Kherthvis me
reçut comme un Robinson dans son île recevrait
un Européen qui viendrait le visiter ; il s’égare
rarement quelqu’un jusque dans cette lointaine
frontière de la Russie, et c’est un bonheur pour
ces braves officiers de voir quelqu’un qui leur
apporte des nouvelles de ce qui se passe dans
le monde. Le capitaine me traita somptueusement
avec d’excellent vin de Cakhéthi, et avec de délicieuses
petites truites de la Taparavanié. Puis
comme je désirais encore atteindre ce même
jour Vardsie, il songea au moyen de m’y faire
recommander au seul habitant qui représente
aujourd’hui la population tout entière de cette
ville. On fit venir un Arménien qui écrivit un
bel ordre que le capitaine signa de son cachet ;
il pria son lieutenant qui était d’origine saxonne,
et qui avait conservé quelques souvenirs de sa
langue maternelle, de nous accompagner ; on
nous adjoignit deux bons Cosaques et nous allions
monter a cheval, quand on vint nous dire de la
ville que ledit habitant était là pour faire quelques
emplettes. Charmé de cette bonne nouvelle,
ous le fîmes venir, et après force injonctions
e la part du capitaine, nous le priâmes de nous
servir de guide. Il s’y soumit de bonne grâce et
c ssant sa bête chargée de sacs devant lui,
nous n eûmes plus qu’à le suivre.