Nous passâmes par Titanis, où je me crus sur la
côte de Crimée en revoyant ces toits de terre
plats, et ces constructions grossières en pierres
adossées contre les pentes d’un ravin.
Les Tatares battent ici le blé comme les Imé-
rétiens, en le foulant sous une planche de trois
pieds de long sur un pied et demi ou deux pieds
de large, armée de pointes de petits cailloux de
silex, rangées en lignes. L’homme qui chasse les
boeufs se met tout droit dessus, et la fait circuler
sur le blé étendu.
Séjour à Akhaltsikhé. Description de celte ville.
Autant l’antique Colchide est humide et boisée,
autant le bassin d’Akhaltsikhé, le Sa-Atabago des
Géorgiens, est nu et desséché. D’un côté, des guirlandes
de vignes perpétuelles, dans lesquelles se
cachent les villages ; de l’autre, des champs à perte
de vue, coupés d’amas de huttes de terre. '
Le Kour, Mlkvari des Géorgiens, Cyrus des
anciens, venant des montagnes de Kars et de
Tahoskari, coupe ce bassin du sud au nord,
s’y promenant quelques instants pour recevoir,
avant de forcer l’écluse de Bardjom, le Poskho
ou Dalka qui lui porte à l’est toutes les eaux de
l’ouest du bassin d’Akhaltsikhé. Les bords seuls
de ces deux rivières sont couverts de beaux jardins
et de vergers; tout le reste est nu.
C’est là qu’à environ 7 verst en remontant le
Poskho, au-dessus du confluent avec le Kour ,
on arrive à la fameuse ville d’Akhaltsikhé (1).
Du temps des Turcs, ses maisons irrégulières,
basses, recouvertes de terre , étaient semées ou
plutôt entassees sans ordre sur les pentes et revers
de plusieurs collines ondulées , accolées
sur la rive gauche du Poskho , à plusieurs jets
de porphyre pyroxénique, dont la rivière baignait
le pied. La forteresse s’étendait par étages
sur le plus grand de ces jets, et la citadelle en
couronnait la plus haute cime. Un fossé, un rem-
pait et des palissades de près de trois quarts de
lieue de tour, enceignaient la ville et en faisaient
une seconde forteresse.
(i) Voyez Atlas, II série, pl. 20, une vue d’Akhaltsikhé
prise du pied d’une tour qui formait l’angle sud-ouest du
rempart de la ville, et qui couronnait les rochers qui bordent
le Poskho. La forteresse et la citadelle occupent le
milieu du paysage. L ’ancienne ville turque est à gauche ;
la nouvelle, bâtie par les Russes, s’étend sur la rive droite
du Poskho. Dans le fond du paysage, la colline noire de
Mélaphyre qui porte les restes de la première batterie d’où
le prince Paszkévitz fit battre la forteresse. L’église catholique
où se livra le principal combat est à gauche au bord
du cadre. Les montagnes qui sont dans le lointain au-dessus
de la ville nouvelle, sont celles d’Akhalkalaki
II.