Ces nouveaux habitants d’Akhaltsikhé sont
tous marchands ou ouvriers, et veulent tous
gagner de quoi vivre. Pour les raisons que je
viens d indiquer, ils avaient peu de ressources
peu de moyens de subsistance. Ils se plaignirent
du gouvernement russe , sans songer à s’en
prendre à eux-mêmes de leur misère qui allait
toujours en croissant. Tous voulaient négocier
trafiquer; aucun ne voulait se livrer à l’agriculture,
et c était des bras pour cultiver la terre que
la Russie demandait.
Assailli de plaintes, ce fut avec un grand plaisir
que le gouvernement vit manifester à ces
nouveaux venus, le désir de s’en retourner en
Anatolie; on leur a facilite de toutes manières
leur départ; on leur a avancé de l’argent, tant
on était aise de se débarrasser d’eux.
Au reste, il n’y a eu que les Arméniens négociants
et brocanteurs qui se soient plaints ; les
agriculteurs se sont très-bien trouvés de leur
colonisation.
Akhaltsikhé renferme huit églises ; les Arméniens
jacobites en ont trois; deux sont anciennes,
elles' ont ete restaurées ou reconstruites en partie,
d une maniéré assez baroque; on a pris pour
matériaux de construction les pierres tumu-
laires chargées d’inscriptions et d’arabesques ou
d autres dessins qui couvraient les cimetières
d’alentour, en choisissant les plus belles, ce qui
donne à ces églises un air de marqueterie très-
bizarre. Dans le fait, c’était le meilleur moyen
de faire passer ces monuments à la postérité.
L’intérieur de ces églises est sombre, pauvre ;
il n’y a pas de fenêtre, le jour n’y donne que par
de petits dômes ou darbases (1).
On ne se fait pas une idée du luxe que les Arméniens
mettent dans leurs pierres tumulaires ;
elles se touchent toutes dans leurs cimetières et
sont rangées en lignes. Rien n’est plus triste que
ces champs de la mort si encombrés.
La majeure partie de ces tombes consiste en
dalles ou paralléllipipèdes longs de4 ou 5 pieds,
qui reposent sur une base ; l’inscription se met
sur la face d’en haut. Quelquefois, on arrondit
cette face d’en haut comme un demi-cylindre.
On leur donne aussi la forme grossière de béliers
comme on le voit dans les fig. 3 et 4 de la
pl. 28, 4e série de mon atlas.
Mais les plus belles tombes sont de grandes
dalles dressées en tête d’un parallélipipède, sur
(1) Voyez l’une de ces églises avec ses petits dômes, au
milieu de la place nue qui s’étend entre la forteresse et la
vieille ville d’Akhaltsikhé, II série pittoresque, pl. ao.
Voyez aussi III série, architecture, pl. 12 ; le dessin en
grand de l’église arménienne autour de laquelle s’est livré
le combat le plus sanglant au haut de la ville, le ^ août
1828.