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riter. Puis, poursuivant la mine , il l’étaye bien
avec des pieux pour y mettre le feu quand les
réponses de Constantinople arriveraient. Elles
n’arrivent point. Daghistée n’en reste pas moins
les bras croisés. Par hasard, cette mine qu’on avait
creusée s’écroule ; 5o soldats entrent par la brèche
et proclament Justinien vainqueur Daghistée
ne bouge pas même pour les secourir, et
ils se voyent forcés de rentrer dans leur camp...
Cependant ce fait redouble sa conviction qu’il
est maître de la ville , qu’il la prendra quand il
voudra... Le chef de la forteresse se rend alors
auprès de lui, le flatte, lui promet qu’il va se
rendre avec toute sa garnison, sans qu’on en
vienne à un assaut. Croirait-on,à tant de folie de
la part d’un général, si Procope ne nous le racontait
avec tous les détails possibles ?
En attendant, Merméroës avec toute son armée
avait passé, en 54g, la frontière de la Lazique
en traversant les défilés gardés par les 100 guerriers
de Daghistée qui défendirent vaillamment
le passage. Repoussés sans cesse, les Perses remplaçaient
par des soldats frais les vides que laissaient
leurs morts. Plus de 1,000 Perses y perdirent
la vie ; les Romains las enfin de frapper,
fatigués de carnage, ne purent plus contenir
cette foule toujours renaissante ; ils se sauvèrent
sur les hauteurs et les Perses se trouvèrent bientôt
dans la plaine. Merméroës prit alors à gauche
du fleuve, ne voulant pas se hasarder parmi
les lieux habités par les Lazes : il se hâtait de
secourir Pétra. Il arriva encore à temps.
Daghistée qui ne l’attendait guère, s’enfuit
lâchement, à la première nouvelle, au-delà du
Phase, ne donnant pas même à ses troupes le
temps d’emporter leurs bagages. Les troupes de
la garnison voulurent se jeter avidement sur le
camp abandonné ; les Tsanes qui y étaient restés,
les en chassèrent, puis se mirent à le piller et
retournèrent chez eux, au lieu de suivre les Romains.
Neuf jours après le départ de Daghistée arriva
Merméroës, qui ne trouva que i 5o hommes en
état de porter les armes et 35o blessés et invalides,
des i , 5oo qui s’y trouvaient au commencement
du siège. Les assiégés n’avaient pas
jeté les cadavres des morts hors de leurs murailles
, mais les avaient exposés suivant leur rit,
en dedans des murs, supportant d’une manière
étonnante cet air empesté, espérant qu’il empêcherait
d’autant mieux les assiégeants de s’avancer
vers eux.
Merméroës en voyant l’état delà garnison, dit
en ricanant, qu’il fallait vraiment gémir et verser
des pleurs sur cet empire romain, dont la
puissance était tellement déchue, qu’il n’avait
pu en aucune façon forcer i 5o hommes, qui
n’étaient pas même défendus par des murailles.