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 rochers de  la Lokouni est à moitié écroulé ainsi  
 que  la tour qui  en défendait l’abord. 
 Dans  le  temps  de  sa  gloire,  ce même  prince  
 Eristaf, qui fut privé de la vue, avait fait remplacer  
 la petite chapelle qui domine le confluent du  
 Phase  et  de la Lokouni,  par une superbe église,  
 la plus belle qu aucun particulier ou qu’aucun roi  
 ait construite depuis longtemps en Iméreth.  Elle  
 est en pierres de  taille,  dans le  vrai style géorgien, 
   et les corniches, les colonnettes,  les cadres  
 des  fenêtres,  sont  couverts  de  moulures  fort  
 bien  sculptées.  La  fondation date  de  1753. 
 Nous  allâmes  demander  à  dîner  au  prince  
 Grégoire;  il  était  absent;  mais  sa  femme  s’em-  
 pi essa d acceder a nos désirs,  en nous envoyant  
 de  quoi  manger  sous  un  vieux  tilleul  qui  ombrage  
 l’église;  elle  ne  parut  pas  elle-même,  
 l’étiquette ne  lui permettant  pas  de  se montrer  
 pendant  l’absence  de  son mari. 
 La  vallee de Baragone se referme hermétiquement  
 à  2  verst au-dessus de la maison. Mais  ce  
 ne  sont plusfles  parois majestueuses  du calcaire  
 qui forment 1 eglise ; les porphyres pyroxéniques  
 traversent  ici  le  Phase,  laissant  pour  trace  de  
 leur passage un  chaos dérochés noires entassées.  
 C est  superbe  a voir  comme  le  fleuve  écume  et  
 bondit parmi  les  blocs  énormes  qui remplissent  
 son  lit  presqu’aussi  resserré  qu’à  la  première 
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 écluse.  Ce défilé n’a qu’un verst de  long et nous  
 rentrâmes  bientôt  dans  un  second  rélargissement  
 de  la  vallée du Phase,  couvert  de champs  
 et de villages. 
 Le premier que nous  rencontrâmes  à  5  verst  
 de  Baragone fut le  bas Sori  qui  se  reconnaît de  
 loin  à  deux vieilles  tours  carrées,  isolées. 
 Quatre verst plus loin, je me  donnai le plaisir  
 d’examiner à loisir et en détail un de  ces moulins  
 imérétiens qui sont semés si fréquemment sur tous  
 les courants d’eau. Ils sont aussi simples que possible  
 (1). Un chéneau ayant 20 pieds de  longueur  
 et 6 pouces  de  large,  lance sur  5 pieds de chute  
 une  eau de  2  pouces de  profondeur  contre une  
 roue horizontale de 2 | pieds de diamètre, munie  
 de  20 palettes. L’eau frappe  de  côté les palettes  
 de  la  roue dont l’arbre  tourne  en  faisant mouvoir  
 immédiatement la meule supérieure du moulin  
 qui n’a que  19 pouces de  diamètre.  La farine  
 sort  par le  côté.  Un petit bois  qui  traîne  sur  la  
 meule  à  mesure  qu’elle  tourne,  donne  assez  
 d’ébranlement à l’entonnoir pour laisser tomber  
 la quantité  de grains nécessaire,  et voilà tout le  
 mécanisme  du moulin,  renfermé dans  un local  
 mal joint  en  bois  de  7  à  8  pieds  de  large.  On  
 peut  y moudre  4  bathmans  ou  24  ocques  ou  
 100  livres  turques de  grain  par  jour. 
 (1)  Voyez  Atlas,  IIFsérie, archit., pl.  32.