épouse et la duchesse d’Édimbourg. La visite Impériale dura trois jours; l’Héritier du trône et son épouse
restèrent un jour de plus. Treize ans s’étaient écoulés depuis le dernier voyage d’Alexandre II en Finlande.
L ’Empereur put constater que la Finlande et sa capitale avaient marché rapidement depuis lors
dans la' voie du progrès. La joie qui régnait partout, les acclamations enthousiastes qui accueillaient
les augustes hôtes en toute occasion, témoignèrent à l’Empereur que la nation le considérait comme son
ami et son bienfaiteur. Dans le discours du trône lu par le gouverneur général à l’ouverture de la
diète, en janvier 1877, l’Empereur exprimait ses remercîments de l’accueil que lui avait fait la capitale
de la Finlande, et sa satisfaction des.progrès dont l’exposition portait témoignage.
Les questions soumises à l’examen de la diète de 1877 étaient si nombreuses et si importantes
qu’elles ne purent pas être vidées dans les délais ordinaires. Après une interruption pendant l’été, la
■diète reprit sa session en automne et ne fut dose qu’au mois de janvier 1878. La plus importante des
propositions impériales avait pour objet l’introduction du service militaire obligatoire. Le projet du
gouvernement était établi sur le modèle de la loi militaire récemment promulguée en Russie. La commission
des états proposa un remaniement du projet dans quelques-unes de ses parties; les modifications
qu’elle désirait y apporter avaient principalement pour but d’en effacer, en vertu du principe de l’égalité
des citoyens devant la loi, une anomalie qui faisait - reposer tout le poids du service actif sur une minorité
désignée par le tirage au sort, tandis que la plus grande partie du contingent était inscrite dans la réserve,
sans aucun devoir militaire à remplir en temps de paix. D’après le nouveau projet, les soldats de la
réserve devaient faire, pendant trois années successives, un service actif de quatre-vingt-dix jours ën tout.
Pour marquer la mission relativement restreinte que l’armée finlandaise, vu la nature de la situation
politique du pays, avait à remplir, on introduisit dans la loi la stipulation suivante: «Les forces militaires
de la Finlande ont pour but de défendre le trône et la patrie et de contribuer ainsi à la défense de
l’empire».
Les débats sur cette question durèrent plusieurs jours et revêtirent un caractère de grande élévation,
aussi bien dans l’attaque que dans la défense du principe du service obligatoire. , - L_e‘ projet de loi fut
adopté dans les quatre ordres, à peu près tel qu’il était sorti des mains de la commission, à une majorité
des deux tiers environ des votes émis.
Alexandre II montra dans le traitement de cette affaire la confiance qu’il avait dans la nation finlandaise.
Le ministre de la guerre russe, Milioutine, avait déconseillé la présentation de la proposition,
évidemment par défiance des sentiments politiques de la population. Mais l’Empereur ne suivit pas son
conseil. Et quand il fut prouvé que les modifications importantes apportées à la loi par les états avaient
en vue de la rendre plus applicable aux circonstances particulières du pays, l’Empereur ne refusa pas de
la sanctionner telle qu’elle avait été adoptée par la diète. Il consentit également à la demande des états que,
vu l’introduction du service militaire obligatoire, l’obligation pour les habitants de fournir des logements aux
troupes en temps de paix fût limitée aux cas où celles-ci ne sont qu’en passage ou en séjour provisoire.
Le partage des opinions sur la question du service obligatoire n’eut rien de commun avec le groupement
des partis tel qu’il prévalut d’ailleurs durant cette diète, surtout dans la discussion de divers
projets de pétitions relatives à la situation de la langue finnoise vis-à-vis de la législation, de l’administration
et de l’instruction publique. La lutte Sur ce sujet fut souvent très vive, mais il ne manquait pas non
plus de représentants modérés, désireux de juger impartialement les besoins: aussi parvint-on à obtenir
une majorité pour présenter au gouvernement des voeux qui eurent une grande influence .sur l’organisation
subséquente de l’instruction publique.
C’est à cette diète que fut soumise une proposition impériale tendant à l’introduction de l’étalon
d’or; il en sera parlé plus en détail au chapitre IV. Il faut encore citer parmi les traits marquants de
cette diète les discussions relatives au budget. L ’article 36 du Règlement de la diète proclame ce principe
constitutionnel que la votation de nouveaux subsides pour satisfaire aux besoins de l’Etat, présuppose
que les ressources ordinaires du budget n’y suffisent pas: on vit l’importance de ce principe quand les
revenus ordinaires commencèrent à augmenter dans une progression plus rapide que les dépenses
ordinaires. La commission des financés établit alors un calcul du budget pour la période financière subséquente,
afin de se rendre clairement compte de la somme des impôts qu’il était réellement nécessaire d’affecter
aux divers articles. Cette manière de procéder, qui introduisait plus de méthode dans la gestion des
finances et maintenait le prélèvement des impôts extraordinaires dans les limites voulues, a été suivie dans
toutes les diètes depuis lors.
Les traitements arbitaires infligés, en dépit dès traités, aux populations chrétiennes soumises à la
Turquie, avaient engagé la Russie et d’autres puissances à exiger du gouvernement turc des réformes
nécessaires. Les moyens diplomatiques épuisés sans résultat, Alexandre II jugea nécessaire de recourir
à la force des armes. Par un manifeste promulgué en Russie et en Finlande le ,s/ï4 avril 1877, l’Empereur
faisait savoir qu’i l. avait, donné à son armée l’ordre de franchir les frontières de la Turquie. — La garde
finlandaise fut envoyée sur ï;e théâtre de la guerre comme les autres troupes de la garde russe; elle prit
part à de1 nombreux combats et au passage du Balkan. — Sur une proposition émise dans l’ordre du
clergé, la diète vota un million de marcs pour le soin des malades et des blessés pendant la guerre, et
demanda à mettre cette somme à la disposition de l’Impératrice. D’ailleurs le Grand-Duché ne fut pas
atteint par la guerre, qui, comme l’on sait, fut interrompue par les préliminaires de paix de San Stefano,
et définitivement terminée par le traité de Berlin du 13 juillet 1878.
Les dangers, les soucis et les chagrins s’amassaient dans le chemin qu’Alexandre II frayait à son
peuple vers des destinées meilleures. Lui, le Tsar-libérateur, qui, par l’abolition du servage, avait supprimé
le plus grand obstacle au développement de la nation dans le sehs; de la liberté, fut coup sur coup
l’objet d’infâmes/attentats de la part des nihilistes, cette société secrète qui défigure Tidéal de la liberté
jusqu’à en faire une anarchie destructrice. Les réformes méditées par l’Empereur rencontrèrent des
difficultés de divers genres et ne purent pas. toutes être menées à bien. La révolte de la Pologne n’avait
pu être étouffée que par des rigueurs peu en accord avec le caractère d’Alexandre II. Enfin les résultats
de la victoire remportée sur les Turcs et qui avait coûté de si grands sacrifices, n’avaient pas donné au
sentiment national russe toutes les satisfactions qu’il en avait attendues.
Mais si l’oeuvre du généreux prince n’a pas pu s’accomplir sans mélange de maux, son règne n’en
constitue pas moins une: époque lumineuse dans les annales de la Russie, une époque de réveil et
d’étonnants progrès. Et dans la modeste page que l’histoire réserve aux destinées de la Finlande, il n’y
a pas de période comparable au règne d’Alexandre II pour l’intime et active coopération du monarque
et de la nation au développement des institutions et à l’élévation du niveau matériel et intellectuel de
la civilisation.
La nouvelle du meurtre de l’Empereur, le 13 mars 1881, répandit partout en Finlande le deuil et
l’épouvante. — Les états réunis en diète l’année suivante décidèrent qu’une statue monumentale serait
élevée dans la capitale de la Finlande à la mémoire d’Alexande II et qu’une souscription nationale serait
ouverte dans ce but. Tous, jusqu’aux plus humbles, ont pris part à cette souscription. Ce monument,
oeuvre du sculpteur finlandais W. Runeberg, a été inauguré en présence des états le 29 avril 1894.
A son accession au trône, l’Empereur A l e x a n d r e III adressa aux habitants de la Finlande une-
Assurance semblable à celles de 1809, de 1825 et de 1855 et qui, comme elles, confirme la religion, les
lois fondamentales et les privilèges du pays. En même temps, l’Empereur adressa au gouverneur général
un rescrit dont voici la teneur:
«Ayant, par tin manifeste ' en date de ce jour, confirmé la Constitution donnée au Grand-Duché de Finlande par Sa
Majesté l’Empereur Ale xan dre Pavlovitch, de glorieuse mémoire, et d éveloppée ultérieurement, av ec la coopération des
états de Finlande, pa r feu Notre Bien-aimé Père, S a Majesté l'Empereur Alexandre Nicolaïévitch, Nous l ’avons fait avec