styles historiques dont il fait usage'en les-mêlant, comme il est de mode aujourd’hui. Dans le château
de Malmgârd (près de Lovisaj il applique le style de châteaux hollandais (v. la gravure p. 31), dans
l’église de granit de Kides, le style roman, tandis que de sès trois projets pour le Palais de la Diète,
les deux premiers étaient librement composés sur des motifs du moyen âge. Cependant son style .préféré
était la renaissance italienne; son troisième projet pour ce même palais en est un exemple; malheureusement
ce beau projet, comme les deux premiers, ne fut exécuté que sur le papier.
Sjôstrôm était un des artistes les mieux doués qu’ait possédés notre pays, mais, comme Takanen,
et presque en même temps que lui, il fut enlevé dans toute la force de l’âge, et, comme lui aussi, au
moment où une grande mission allait donner à son génie l’occasion d’atteindre son plein développement,
de s’élever au grandiose.
Aucun de nos architectes ne peut rivaliser avec Hôijer pour la fécondité; plus que tous les autres
ensemble, peut-être, il a contribué à donner à Helsingfors son nouveau caractère. Comme tempérament,
on serait tenté de dire qu’il est l’opposé de Sjôstrôm. Imaginatif et original, il cherche ayant tout ce
qui produit une impression vive et brillante; il s’inquiète peu de la belle ordonnance et du style, il brise
les lignes, avance les pignons et les pavillons, entasse les éléments décoratifs et revêt le tout dé l’éclat
des couleurs. Il remplace par le pittoresque de l’effet l’harmonie plastique des oeuvres de Sjôstrôm.
Dans le grand nombre de bâtiments construits par Hôijer à Helsingfors,
nous citerons l’élégante bibliothèque populaire (v. la gravure p. 189),
l’Ateneum (v. la gravure p. 331), la maison des pompiers volontaires et
la caserne des pompiers, dont la tour élégante forme un trait marquant
dans la silhouette de la ville.
• Bien que Gripenberg et Nystrôm maintiennent les principes dë Sjôstrôm,
les bâtiments exécutés par eux montrent aussi à quel point le goût
et le besoin du luxe ont grandi chez nous. Dans les façades principales
du Palais de la Diète, Nystrôm a mêmê conservé l’idée de son maître,
tandis que dans l’intérieur, il a imaginé une très belle cage d’escalier avec
un plafond soutenu par des colonnes, et il a su ménager un heureux contraste
entre la lumière colorée tombant d’en haut et la demi-obscurité du
F. A. Sjôstrôm. vestibule. Mais le plus beau des édifices qui ornent Helsingfors depuis
quelques années, est aussi dû au crayon de Nystrôm: c’est le palais des
Archives, dont les nobles lignes, de style grec, rappellent, bien qu’avec plus de richesse, les créations
classiques d’Engel (v. la gravure p. 206). Gripenberg, • en -revanche, a demandé aux premiers temps de
la renaissance florentine l’idée de la maison-de la Caisse d’épargne à Âbo.
Decker et Ahrenberg ont surtout travaillé pour la province. On doit au premier les belles églises
romanes de Tammerfors et de Sibbo (Nyland); le second a fourni les plans du château de Kjuloholm,
style renaissance hollandaise. Spirituel, riche d’idées et possédant des talents variés, Ahrenberg s est
distingué aussi comme écrivain et comme décorateur (décoration des chapelles funéraires de la cathédrale
d’Âbo et aménagement de la villa Impériale de Villmanstrand).
L’architecture, ayant à satisfaire un besoin réel et pas seulement un luxe, est par cela même dans
des conditions d'existence plus assurées que les autres arts. Mais c’est aussi celui de tous qui nécessite
les plus fortes ressources pécuniaires et qui se prête le moins à l’expression de l’individualité de 1 artiste;
c’est pour cela qu’elle a été la dernière à prendre racine chez nous. La première génération d’architectes
est encore dans la force de l’âge; aussi ëst-il beaucoup trop tôt pour essayer de résumer en une
caractéristique générale lés tendances de l’architecture finlandaise.
T. T. T i k k a n e n .
B. LA MUSIQUE.
La musique, cette expression la plus directe du sentiment du beau chez l’homme, était aimée et
pratiquée par le peuple de Finlande dès les temps légendaires. Tant que la tradition orale a seule transmis
de génération en génération les créations de la poésie populaire, cette poésie était toujours accompagnée
de musique. La mélodie du chanteur de «runes» était simple, simples aussi les accords dont
il s’accompagnait sur son «kantele». Cette musique servait d’appui rythmique au récitateur. Quand des
explorateurs dévoués recueillirent cette riche poésie, ce furent avant tout les trésors poétiques qui fixèrent
l'attention. Mais dans ces derniers temps, l’étrange, musique épique qui accompagnait les runes a
commencé à éveiller aussi l’intérêt.
-Notre musique populaire en général, et particulièrement le chant populaire proprement dit, ne paraît
guère avoir été influencée par le chant runique et n’a pas non plus, comme musique indigène, la même
originalité.,. Les recherches modernes ont prouvé que les mélodies populaires ont voyagé de pays en
pays, et si même, au cours des siècles, un chant d’origine étrangère est devenu propriété nationale, il
est le plus souvent“ facile d’y montrer quelque caractère commun à des nations très différentes et très
éloignées. Le ton général de la chanson populaire du Nord est la mélancolie, et la simplicité de la construction
harmonique en est le caractère naturel. Pourtant on pourrait peut-être citer comme un trait
particulier à la mélodie populaire finnoise que le ton y est souvent, non pas seulement mélancolique,
mais découragé. C’est le caractère national, déterminé par les. circonstances extérieures de la vie, qui a
imprimé son cachet sur le chant populaire; or, depuis l’origine des temps, la joie et la douleur sont
entrées dans la vie du peuple finnois à peu près dans la même proportion que la chaleur et la froidure
dans notre dur climat.
Au point de vue purement artistique nos chants populaires sont de valeur très diverse, et il en
est plus d’un dont l’intérêt gît plutôt dans son origine obscure que dans ses qualités musicales,y.Il y
en a cependant qüi sont de véritables oeuvres d’art. Ainsi la chanson d’une tristesse si pénétrante «Voi
âiti parka» (O pauvre mère!) et le délicieux «Tuoll’ on mun kultani» (Là est mon ami), certainement une
des plus ravissantes mélodies populaires du monde entier.
O u t r e l e s c h a n t s f in n o is , a u x q u e l s a p p a r t ie n n e n t c e u x d o n t n o u s v e n o n s d e p a r le r e t p â rm i l e s q u e l s
i l e n e s t q u e lq u e s - u n s a u m o in s d ’o r ig in e v r a im e n t in d ig è n e , o n a n o t é u n a s s e z g r a n d n om b r e d e c h a n s
o n s s u é d o i s e s , d ’ o r ig in e e t d e c a r a c t è r e S c a n d in a v e s , c h a n t é e s p a r l e s p o p u la t io n s s u é d o i s e s d e s c ô t e s .
P lu s ie u r s d ’e n t r e e ll e s r iv a l is e n t d e v a l e u r m u s ic a le e t d ’o r ig in a l i t é a v e c l e s p lu s b e l le s m é lo d ie s fin n o is e s .
On a déjà beaucoup fait pour recueillir ces trésors de poésie: qui ont vécu à travers les siècles sur
les lèvres du peuple. On en a fait d’importantes publications; mais le travail est loin d’être achevé.
Grâce à l’intérêt qu’excitent de notre temps les recherches de folklore, on amènera sans doute encore
au jour plus d’une perle.
Si on peut dire en général que l’histoire des beaux-arts en Finlande est comprise tout entière dans
le 19e siècle, cela est vrai surtout de la musique.
On aperçoit les premiers signes d’activité musicale au commencement de ce siècle dans une «Société
musicale», fondée à Àbo en 1790, dont le but était de réunir des amateurs et des musiciens de
profession pour exécuter dans des concerts privés et publics les oeuvres des grands maîtres et en faire
jouir le public'. Cette Société reprit son oeuvre après une interruption causée par la guerre de 1808.
Mais le changement de capitale en 1819 et surtout l’incendie de 1827, suivi du transfert de l’Université
■à Helsingfors, paralysèrent la vie intellectuelle d’Âbo, et la Société musicale, dont le travail dans un
terrain jusque-là inculte avait fait époque dans l’histoire du .goût en Finlande, cessa dès ce moment de
diriger les destinées de la musique.