a appris des autres. Hartman est un empirique; il nie la valeur de toute notion a priori. Nous avons,
dit-il, indubitablement conscience de notre moi comme uné chose en soi, et de choses en dehors de
notre conscience, qui deviennent réelles pour nous par les impressions qu’elles font sur nos sens. De
là nature du moi, Hartman cherche à déduire ses différentes manifestations. Cette déduction empirico-
psychologique forme la base de la théorie proprement dite de la connaissance, qui devait résoudre la
question de l’origine, du fondement, du contenu et de la valeur de la connaissance; c’est là ce qui devait
faire le sujet du troisième volume, non paru. Tout le reste du système devait être édifié sur la théorie
de la connaissance.
Hartman expose ses idées avec une grande clarté et beaucoup de logique; son style est vif et coloré,
parfois un peu déclamatoire. Il rappelle à plusieurs égards certains philosophes, postérieurs à lui,
qui en Allemagne ont combattu l’idéalisme: J. Fries. F. E. Beneke et d’autres. Il n’est pas douteux que
Hartman, s’il eût vécu dans un autre pays où les
circonstances extérieures fussent plus favorables,
aurait attiré l’attention à un beaucoup plus haut degré.
Hartman n’a formé qu’un disciple: K a r l S eder-
holm, né en 1789, qui étudia la philosophie sous sa
direction. Il s’établit plus tard en Russie, où il fut
pasteur de différentes congrégations luthériennes et
où il termina une vie agitée en 1867.- Il publia en
allemand plusieurs ouvrages de philosophie et de
théologie. Le plus important est intitulé Der geistige
Kosmos, eine Weltanschauung der Versöhnung, Leipzig
1859; l’auteur cherche à y concilier le christianisme
et la philosophie.
A l’Université, les systèmes de Kant et de
Fi ch té furent exposés, ce dernier par lé professeur
F redrik B ergbom (1785— 1830); le système de
Schelling, au contraire, n’éveilla guère d’attention en
Finlande, au rebours de ce qui fut le cas en Suède.
Mais aucune de ces doctrines n’y fit une impression
durable. Il en fut tout autrement de la philosophie
d’Hegel. Ce système fut représenté vers 1840 par
Johan- Ja k o b T engstrôm (voir p. 216), professeur
de philosophie de 1828 à 1848; quelques théologiens
du temps en subirent l’influence. Mais la philosophie hégélienne fut soutenue avec beaucoup plus
d’énergie et de succès par Johan V ilhelm S nellman (1806— 1881). Il avait été l’élève de Tengstrôm,
mais ce fut surtout par son travail individuel qu’il pénétra ce système si difficilement, accessible; il sè
l’assimila complètement sans rien perdre de son individualité si fortement marquée. Agrégé de philosophie
en 1835, son enseignement le plaça d’emblée au premier rang des jeunes .-talents universitaires. Il
fit paraître en 1837 une édition remaniée de la logique dite «objective» d’Hegel, le premier travail de
ce genre qui ne fût pas sorti des mains mêmes du maître; il publia aussi alors la première partie, la
psychologie, d’un «cours élémentaire de philosophie». Mais à la suite d’un conflit avec les autorités
universitaires, Snellman quitta sa patrie pour un temps, en 1839, et se rendit en Suède. C’est là que,
tout en déployant une activité considérable comme publiciste et littérateur, il acheva la publication de
son cours de philosophie, dont les deux dernières parties contiennent la logique (subjective) et la théorie
du droit; il y fit paraître aussi un mémoire très estimé sur les études universitaires. En 1840 il se rendit
en Allemagne, où il entra en rapports avec plusieurs des chefs du mouvement philosophique, D. F.
Strauss, C. L. Michelet, A. Ruge. Dans l’hiver de 1840—41, il publia à' Tubingue en allemand un
travail intitulé Die Idee der Persönlichkeit; il prenait ainsi part à la lutte qui régnait alors sur la-question
de la personnalité, de Dieu et ses rapports avec la personnalité humaine. Il prenait son rang dans l’aile
gauche de l’école hégélienne, c’est-à-dire celle qui admettait l’idée panthéiste que la conscience que F absolu
a de .soi coïncide avec celle que l’être fini a. de l’absolu. Ce- travail, jugé très favorablement par
l’organe de l’école hégélienne, les «Berliner Jahrbücher», valut à Snellman, en Allemagne, la réputation d’un
des penseurs les plus subtils et les plus profonds que possédât cette école philosophique. De retour
d’Allemagne, il séjourna encore un an en Suède, où il prit part à la lutte violente qui se livrait dans
la presse au Sujet des opinions ' de Strauss sur les évangiles. C’est alors aussi qu’il publia son principal
ouvrage philosophique, La théorie de l’État, dont il s’appliqua tout particulièrement à soigner le style.
Cet ouvragé — dont la pensée dominante est que l’esprit national est le véritable fondement de toute
vie. politique — a eu une profonde influence sur l’opinion dans la patrie de Fauteur.
De retour en Finlande, Snellman mit son talent et son ac tivité au service de la presse périodique.
Il postula en 1848 la chaire de philosophie, restée vacante après Tengstrôm, mais la défaveur qu’il avait
encourue en haut lieu, l’empêcha de l’obtenir. On a raconté plus haut (pp. 173, 174) comment cette
chaire fut supprimée, puis rétablie sous le nouveau règne en 1855. Devenu enfin professeur, Snellman
déploya dans son. enseignement une activité infatigable,-et fructueuse, mais il ne le conserva pas longtemps
: en 1863 déjà il fut appelé à échanger sa chaire contre "le; siège de chef des finances au Sénat.
Des projets d’ouvrages philosophiques qui occupèrent Snellman pendant ses dernières années, entre autres
une édition revue de sa Théorie de l’État, restèrent inexécutés. Ses oeuvres complètes en 12 volumes
sont en voie de publication.
Parmi les écrivains plus récents dans le domaine de la p h ilo s o p h ie ,n o u s citerons: W ilhelm B olin,
né en 1835, bibliothécaire de l’Université depuis 187.3; ^ a publié entre autres La Famille, études, 1864;
La vie politique en Europe et les doctrines politiques de la philosophie, 2 vol., 1868, 1871, qui contient un
exposé historique et critique des principales théories philosophiques dé l’État depuis le commencement
des temps modernes. Ami personnel et chaud admirateur de Ludvig Feuerbach, le célèbre auteur de
«Das Wesen des Christenthums», Bolin publia à l’aide de documents inédits une monographie intitulée
L. Feuerbach, sein Wirken und seine Zeitgenossen, Stuttgart 1891; dernièrement il a publié sur Spinoza
un travail qui a paru dans la collection- éditée à Berlin sous le titre de «Geisterhelden, eine Sammlung
Biographien». Bolin a encore traité des sujets philosophiques dans des «Études et conférences», publiées en
livraisons, ainsi que.dans plusieurs revues suédoises et allemandes. — T hiodolf. R ein, né en 1838, professeur
de philosophie depuis 1869, d’abord hégélien, s’est rapproché plus tard du réalisme idéal de
H. Lotze. Outre des manuels .d’enseignement de logique et de psychologie et quelques articles philosophiques
dans des revues suédoises et finnoises, il a publié un ouvrage intitulé Essai de 'psychologie, 1er
vol. 1876, 2e v o l , , i^re partie 1891, où il cherche à appliquer à la psychologie les résultats des recherches
expérimentales de ces derniers temps.
La tendance toute moderne qu’on a nommée «psycho-physique » et qui tente de déterminer par des
observations exactes le rapport de force et . de durée entre les actes psychiques et les états physiques
correspondants, a aussi eu des représentants parmi nous, Hjalm ar N e ig l ick , né en 1860, se basant sur
des expériences faites par lui à Leipzig dans le laboratoire de psycho-physique du professeur W. Wundt,
publia en 1887 un mémoire intitulé Zur Psychophysik des Lichtsinns; ce- travail mérita les éloges des
juges compétents et valut à son auteur l’agrégation de psychologie expérimentale à l’Université. Sa
mort, arrivée en 1889, l’enleva trop tôt à la science. E d v a rd W e st erm a r ck , né en 1862, agrégé de sociologie,
a publié en anglais un grand ouvrage The history o f human marriage, 1891; accueilli avec
beaucoup de louanges par la critique en Angleterre, cet ouvragé a été traduit en suédois, en allemand,
en français et en italien.
Une branche qui tient de près à la philosophie, la pédagogie, a aussi eu des représentants en Finlande.
Outre J. V. Snellman, qui dans ses journaux lé «Saima» et la «Feuille littéraire» a écrit d’excellents
articles sur des questions d’éducation et d’école, nous citerons A. A. L a u r e l l (1801— 1852), déjà