qui s'exhale de ce tableau lui valut une popularité que n’a obscurcie aucune des oeuvres plus sérieuses
de 1 auteur. L ambition de plus grands sujets et de victoires moins faciles inspira au jeune peintre sa
prochaine tentative: un grand tableau d’histoire, «Le duc Charles insultant le cadavre de son ennemi, Clas
Fleming» (Salon de 1878, appartient à la Société des beaux-arts, voir la gravure p. 219).. Mais bientôt il fut
enrôlé dans l’école du «plein-air», dont Bastien-Lepage, mort trop tôt, était le chef. Dès lors il se fit une
spécialité, au sein du monde artistique parisien, des scènes de la vie du peuple en Finlande, surtout sur
la côte du Nyland. La plupart de ces tableaux appartiennent à des collections .étrangères: «Service divin
sur la cote nylandaise» (Salon de 1882, voir la gravure hors texte, p. 76) au musée du Luxembourg,
«En mer» (Salon de 1884, voir la gravure hors texte, p. 68) à la collection Fürstenberg à Gothembourg,.
«Le samedi soir» (Salon de 1886) à la galerie royale de Copenhague, et ainsi de suite.
La peinture de genre d’Edelfelt est d’une nature si différente de celle de Jansson, qu’on hésite à
•les appeler toutes deux du même nom. X â différence
n’est pas seulement dans la dimension
des tableaux, ni dans l’image énergique dé la
nature donnée par la peinture de plein-air et qui"
fait paraître un peu gauches et conventionnels
les tableaux du peintre de Dusseldorf;. elle est
aussi dans la conception même.: / Tandis que
dans la peinture de Jansson c’est l’épisode même|ÿ
l’anecdote, qui intéresse, Edelfelt ne cherche
pas à éveiller l’intérêt par dès moyens en dehors
de la peinture même: mais par la puissance'
de la caractérisation, il élève les-plus humbles
sujets à la dignité du grand art. C’est peut-être
à cause de cette objectivité que la supériorité
artistique d’Edelfelt ressort d’une manière si
frappante dans Ses portraits: par exemple ceux
de sa mère (1884), de Pasteur (1885, à la Sor-
bonne), du président de l’ordre des bourgeois,
J. Kurtén (1889, au Palais de la Diète à Hel-
singfors), et de tant d’autres peints à Paris, à
Saint-Pétersbourg, à Stockholm.
Deux ouvrages considérables de ces dernières
années marquent peut-être une évolution
dans l’art d’Edelfelt, mais, plutôt dans le choix
A. F r y x e l l, buste eu marbre de W. R u « ' dCS SUjetS qUe da" S 53 manière Proprement dite.
Obéissant à une tendance de l’art moderne qui
voudrait ramener l’intérêt à des sujets religieux usés en les transportant dans notre époque, Edelfelt
représente dans «Le soir de Noël» (Salon de 1891) la Vierge Marie sous les traits d’une pauvre paysanne
finnoise. Dans son grand tableau «Le Christ et Madeleine» (Salon de 1891), ce sont les antiques légendes
finnoises qui lui fournissent le sujet. La pécheresse repentante est une jeune paysanne de la
Carélie et le Sauveur, aux pieds duquel elle se jette dans le désespoir du repentir, est un pauvre berger
des rives d’un de nos mille lacs. Des peintures murales de grandes dimensions, commandées à Edelfelt
pour orner la salle des solennités de l’Université, le ramèneront sans doute à la peinture d’histoire.
Dans l’intervalle de ces oeuvres solides de l’art le plus consciencieux, le pinceau fécond d’Edelfelt a
produit en grand nombre des tableaux d’une moindre portée, à l’huile, à l’aquarelle et au pastel. Bien
qu’il ait presque toujours traité des sujets finlandais, Edelfelt est le plus cosmopolite dé nos artistes.
Mais partout il se montre un peintre d’une haute intelligence, parfaitement maître des procédés de son art.
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