A part les cours de G. Rein, un «Manuel d’histoire et de géographie de Finlande» par A. I. Arwidsson
et un précis populaire en finnois par J. F. Kajaani, on n’avait pas encore tenté de rassembler en un
ouvrage d’ensemble les résultats épars des travaux des historiens de la Finlande depuis Porthan. Aussi
G. Z. Forsman répondit-il à un besoin très généralement senti quand il publia son Manuel d’histoire du
peuple finlandais (1869— 1872, en finnois). Cet ouvrage, fondé sur des matériaux rassemblés en partie
pâr l’auteur, parut , en allemand en 1873, en suédois en 1874 et fut réimprimé en finnois en 1881 et 1882.
L auteur occupait alors dans le monde politique une position éminente comme un des principaux chefs
du parti finnois; il ne sut pas éviter que son travail d’historien ne révélât quelques, traces de ses préoccupations
d’homme de parti.
Le sujet principal de ce Manuel est l’histoire du peuple finnois et de son développement en une
nationalité. L ’auteur se place à-un point de vue qui lui fait souvent montrer l’introduction en Finlande
de l’organisation sociale et de la culture suédoises, sa participation intime à la vie politique suédoise,
comme un obstacle à la formation d’une nationalité spécifiquement finnoise plutôt que comme un facteur
favorable dans le travail de développement du peuple finlandais. Plusieurs critiques ont relevé ce qu’il
y avait d’étroit dans cette manière de voir; en revanche, le livre fut ardemment défendu par Tes amis
politiques de 1 auteur. Le point de vue de Forsman se marque davantage encore dans une étude bio-'
graphique publiée par lui en 1870 sous le titre de G. M. Sprengtporten et l'indépendance de la Finlande
(en finnois), où 1 auteur, entraîné par sa sympathie pour le but que poursuivait Sprengtporten, l’indépendance
de la Finlande, s’ingénie à trouver à ses actes les motifs les plus élevés. Parmi les critiques qu’a
suscitées cet ouvrage, il faut citer en particulier une série d’articles de K. K. Tigerstedt, parus dans
le «Finsk Tidskrift» et où l’auteur,-se fondant sur des documents authentiques, met en lumière l ’égoïsme
des mobiles qui ont dirigé Sprengtporten.
La polémique provoquée par ces ouvrages de G. Z. Forsman, la seule qui ait divisé les historiens
finlandais, s éteignit peu à peu, et d’autant plus vite que Forsman lui-même était de plus en plus détourné
des recherches historiques par des fonctions politiques et administratives. Il paraît douteux qu’il ait
proprement fait école.
Au cours dé nette polémique se révélèrent quelques jeunes historiens, dont nous ne pouvons citer
ici les travaux qu en passant. R. C a s tr én , publiciste (1851— 1883), se voua avec zèle à des recherches
concernant les événements qui précédèrent et suivirent la diète de Borgâ, dans le but de faire mieux
connaître les circonstances au milieu desquelles s’établit le nouvel état politique en Finlande. Enlevé prématurément
ï ses travaux, il avait pourtant eu le temps de publier une série d'Études sur 1‘histoire moderne
de la Finlande (1881— 82), où l’on trouve pour la première fois un exposé approfondi de diverses faces
de ce sujet. E. G. P almén, professeur, fit revivre la mémoire d’un des plus remarquable^, écrivains
politiques et économistes du 18= siècle dans un ouvrage intitulé Écrits politiques dAndcrs Chydenius,
avec une introduction historique (1877— 80). | | | oh. R ich. D aniel son, professeur, publia en 1888 un travail
intitulé D it Nordische Frage in den Jahren 1746—5 1, où il étudiait les relations politiques des États
du Nord au milieu du 18= siècle, surtout au point de vue de; l’importance que les complications diploma-
tiques avaient pour la Finlande. — L’auteur de cet article publia une Histoire de Finlande (2 vol., 1887—89),
où une part assez large est accordée au développement de la civilisation à l’intérieur. B R . I-Ia usen,
archiviste de l’État, fit paraître en 1890 une bonne édition de la collection de documents du moyen âge
connue sous le nom de Livre noir de la cathédrale d'Abo et dont s’était déjà servi Porthan. — K. G.
L einberg, professeur, publia une Histoire des cloîtres finlandais (1890; fait partie des publications de la
Société finlandaise de littérature suédoise). — E liel A spelin traita dans plusieurs publications l’histoire
des beaux-arts en Finlande.
Il faut aussi mentionner 1 intérêt qui s’est attaché depuis une dizaine d’années aux histoires locales.
Plusieurs jeunes auteurs ont voulu, par une étude exacte et. détaillée de l’histoire de telle ou telle province
ou de telle ou telle ville, contribuer à établir les bases solides d’une connaissance toujours plus
certaine de l’histoire du pays. Une Société, d’histoire d’Abo s’est particulièrement signalée par son zèle
à poursuivre ce but (voir p. 206 s.)i ■
Pendant les vingt dernières -années, l’attention des historiens finlandais s’est portée aussi sur les
temps préhistoriques de notre pays et des peuples finno-ougriens. Parmi les travailleurs dans ce domaine
citons comme le plus distingué. J. R. A s p e u n , dont il a déjà été parlé (v. p. 207); ses principales publications
som mes éléments de l’archéologie fihncougrienne (1875, en finnois) et l’atlas archéologique intitulé
Antiquités du Nord finuo-ougrim, dont cinq volumes ont paru jusqu’ici (1877-84, texte finnois et français),
r'-fr*. Les historiens finlandais,, tout en consacrant leurs efforts en première ligne à l’histoire de leur patrie
n’ont pas cependant complètement négligé celle des autres pays. Il a été publié un assez grand nombre
ne monographies qui témoignent d’une étude sérieuse de l’histoire des peuples-de l ’Europe occidentale.
Quelques-uns de ces écrivains ont été à même de faire à l'étranger des recherches dans les archives
Ainsi J.. G. F r o s t e r u s , professeur (né en 182g), a rassemblé en France des;matériaux relatifs à l’histoire
es Protestants français; sor. travail intitulé Les insurges protestants sous Louis X IV (Paris 1868, en
trançais) est une contribution importante à l’histoire des camisar.dk L ’auteur d â j î - l ig n e s a dépeint la
'lutte des huguenots contre Richelieu dans un ouvrage intitulé Le Duc de Rohan et la chute du parti
protestant en France (Paris 1880. en français). L ’hiSfoire des, beaux arts dans l’Europe Occidentale et
septentrionale pendant la première moitié de notre siècle est le sujet d’un ouvrage de C a r l G u s t a f
E éTOÀNDER, professeur (né en 1834), publié à Stockholm, en 1867, sous le titre .de; Histoire des beaux-
arts depuis la fin dit. Siècle dernier jusqu'à nos jo u r s '■ Cette oeuvre remarquable expose en particulier la
lutte du classicisme et du romantisme dans' les grands foyers de civilisation et dans le Nord.
S ‘ nos hist0nens finlandais ne se distinguent pas particulièrement par l’éclat du talent et l ’art de
1 exposition, leurs écrits sont presque toujours marqués au coin d’un sincère amour de la vérité et d’une
érudition seneuse Cette littérature, en poursuivant sa mission scientifique, a contribué à fortifier l’esprit
national, et, en faisant pénétrer le regard dans ce passé- sur lequel sont établi^nos institutions actuelles
êllgji donné- aux fondements de notre état politique la solidité dont ils avaient besoin. Les travail
que nous avons énumérés constituent un ferme terrain sur lequel les historiens à venir pourront bâtir
en toute confiance.
M . G . S C H Y B E R G S O N .
B. LA SCIENCE DU DROIT, L’ÉCONOMIE POLITIQUE E T LA
STATISTIQUE.
,. Quand la Finlande, après sa séparation d’avec la Suède en 1809, commença sa nouvelle existence
d’Etat, son jurisconsulte le plus éminent, M a t h i a s C a l o k iu s U738— 1817), professeur à l’Académie d'Abo,
voua son expérience et son travail à la tâche qui lui -était assignée d’organiser le gouvernement du
Giand-Duche et de veiller à l’application des anciennes lois au nouvel état des choses. Cela ne l’empêcha
pourtant pas de continuer à remplir les devoirs du professorat: en même temps qu’il veillait, en
qualité de procureur du Conseil de. gouvernement, à ce que les fonctionnaires qu’il avait formés fissent
leur devoir, il continuait à préparer la jeunesse studieuse’ pour le service de la patrie.
L exposition du droit finlandais: que Calonius faisait à ses disciples, soit avant, soit après 1809, n’a
rien perdu de son importance et a continué à servir de base aux travaux de, tous ceux qui ont occupé
sa chaire après lui.
Les écrits publiés par Calonius, la plupart en latin, traitent surtout des questions de droit civil et
pénal: le servage Selon le droit ancien de Suède, les peines pour tentative d’homicide, les contrats de
mariage, les crimes contre la propriété reçue en dépôt, le droit aux objets trouvés, la doctrine de la