240 VII. L A L IT T É R A T U R E SCIENTIFIQUE.
resté cher. Néanmoins, c’est sur les dialectes suédois en Finlande qu’ont surtout porté ses études. Il
prit pour point de départ sa province natale, le Nyland, et publia en '1870 un exposé général De la
langue du peuple du Nyland: Le plus important travail qu’il publia ensuite avait pour sujet le dialecte
très particulier à bien des égards de Nârpes en Ostrobothnie (Ûber den Nàrpesdialekt) . Cet ouvrage
valut à Freudenthal sa nomination à la chaire de langue et de littérature suédoise à l ’Université (1878).
Il publia en 1890 une étude détaillée du dialecte de Vôrâ, en Ostrobothnie. Aux premiers travaux de
Freudenthal se rattachent ses études sur Les noms suédois de lieux, en Nyland, dans la Finlande propre
et en Âland; il arrive à la conclusion que des parties de ces provinces avaient eu une population suédoise
dès les temps du paganisme. L’étude sur Les noms d'homme et de femme dans le Nyland au
moyen âge (1877) est aussi intéressante pour la philologie que pour l’histoire. Freudenthal a étudié les
antiquités suédoises en Finlande. Il a aussi écrit sur des matières appartenant au folklore. La réforme
de l’orthographe, telle qu’elle a été précisée par le congrès orthographique des pays Scandinaves de 1869,
a en Freudenthal un représentant influent.
C’est autour de Freudenthal comme professeur que s’est concentré et sous son inspiration plus ou
moins directe que s’est exécuté tout le travail accompli en Finlande dans le domaine de la philologie
suédoise. H. V endell a débuté, comme son maître, par l’étude de la littérature islandaise, mais ensuite
il a consacré son activité principalement à des études de dialectes. Freudenthal s’était occupé aussi des
colonies d’origine suédoise qui peuplent dès les temps anciens quelques petites îles des côtes de l’Esthonie
et de la Livonie et la partie avoisinante du continent; il avait publié en 1875 des Renseignements sur
les dialectes de Râgô et de Wichterpal. Vendell visita plus tard ces lieux, ainsi que la colonie de Gammal
Svenskby, fondée à la fin du siècle dernier dans la Russie méridionale. Il publia en 1881 une Laut-
und Formlehre der schwedischen Mundarten in den Kirchspielen Ormsô und Nukkô in Ehstland; ensuite
il étudia le dialecte de Runô. En 1886 Freudenthal et Vendell publièrent ensemble un Dictionnaire des
dialectes esthoniens-suédois. Les langues de ces endroits écartés ont conservé un caractère archaïque, mais
témoignent d’une parenté rapprochée avec les dialectes de la Finlande: les deux groupes sont maintenant
connus dans la science sous la dénomination commune de «dialectes suédois-orientaux». En 1892
Vendell publia un travail étendu sur Le dialecte de Pedersô (Ostrobothnie). D’autres dialectes ont été
étudiés par de jeunes savants. Vendell a fourni plusieurs contributions intéressantes à la connaissance
des étymologies populaires.
Le champ du folklore, encore peu exploité par la science, a attiré l ’attention depuis le milieu de ce
siècle. Il faut citer en première ligne parmi les collectionneurs de poésies populaires le docteur J. O. I.
.R ancken, à Vasa, qui dès 1848 exhortait les collectionneurs-à recueillir des mots, des chants, des énigmes
et des danses parmi la population suédoise de Finlande, et qui a assemblé une grande collection manuscrite
du folklore de l’Ostrobothnie. Depuis 1860, une quantité de travaux sur les usages populaires
suédois, ainsi que des textes de chansons et de contes, ont été publiés, entre autres dans les Albums des
sections d’étudiants. La section nylandaise des étudiants a commencé, sous le titre de «Nyland», la publication
d’une collection systématiquement composée et ordonnée. Cette publication comprend jusqu’ici
une Collection de mots (environ 17,000) appartenant au dialecte nylandais, des Contes populaires nylan-
dais, des Chansons populaires nylandaises, des Moeurs, coutumes, superstitions, etc. du peuple de Nyland.
Fondée en 1874, la Société des dialectes, suédois a rassemblé de'riches matériaux de linguistique
et de folklore. Ce sont surtout des étudiants originaires de diverses contrées de langue suédoise en
Finlande qui se sont occupés de ce travail sous la direction du professeur Freudenthal. La Société
finlandaise de littérature suédoise récolte aussi chaque année dans ce champ d’abondantes moissons.
Une grande partie de ces matériaux n’ont pas encore été publiés. Mais le travail se poursuit, et une
partie considérable des contrées suédoises de la Finlande ont été explorées.
Le suédois cultivé parlé en Finlande a aussi été l’objet d’une étude-scientifique dans ces derniers
temps. Le mouvement de réforme entrepris en Suède pour rendre l’orthographe plus conforme à la
langue parlée, a en Finlande de chauds adhérents, qui, comme H. P ipping, agrégé de phonétique, veulent
tenir compte, dans cette réforme, de la prononciation finlandaise du suédois, un peu différente de celle
de Suède.
Ainsi la philologie suédoise en Finlande poursuit, dans une étendue toujours plus grande et par le
moyen de jeunes talents toujours-plus nombreux, son but, qui est d’éclairer à la lumière de la science-
une langue qui, à côté du finnois, a été de temps immémorial l’idiome maternel d’une partie de notre
peuple.
I. A. H e i k e l .
C. Philologie classique, orientale et moderne. A l’époque de la fondation de l’Académie
d’Âbo, les formules et les débats de l’orthodoxie accaparaient l’intérêt scientifique. L’étude des langues —
sémitiques ou classiques — se mettait au service de la théologie, ou avait pour objet l’emploi en prose
et en vers de ces langues de la littérature savante, en particulier du latin. Mais au milieu du 18e siècle,
une conception plus libre se fait jour, et avant la fin du siècle on peut déjà parler d’étude des langues
orientales et classiques à l’Académie d’Àbo.
Au commencement de notre siècle, la chaire de langue et de littérature latine — alors appelée
chaire de poésie et d’éloquence —- était occupée par Henrik G a b r ie l P o rthan, le plus éminent professeur
et savant de l’Université. Ses vues larges, son esprit lumineux, la sobriété et la pureté de son
style. latin, font de Porthan un digne représentant du nouveau courant d’idées littéraires. Dans son
enseignement de l’éloquence de la chaire, il montre une intime connaissance’ du génie de l’art oratoire
chez les anciens. Adaptant avec une rare habileté les règles de la rhétorique antique aux exigences de
la prédication chrétienne, il fit ainsi une oeuvre durable. — Porthan a aussi traité avec indépendance telle
ou telle question de pure science qui occupait les philologues d’alors.
L ’enseignement du grec, cette autre langue mère de la civilisation antique, était adjoint, depuis la
fondation de l’Université, à celui des langues sémitiques; il en résultait qu’on n’étudiait guère que le grec
du Nouveau Testament. Ce n’est qu’en 1811 que fut créée une chaire spéciale de grec. Toutefois il y
avait bien des. années déjà qu’on était arrivé à comprendre que le monde hellénique constituait un domaine
distinct pour la recherche scientifique.
On le voit déjà aux écrits de l’homme qui,' à l’entrée du siècle, représente les langues sémitiques
et le grec. G u s t a f G adolin (1769— 1843) traita des passages de l’Ancien Testament dans une polémique
avec le rationalisme et il était savant en arabe, mais il fit aussi de bons travaux sur les antiquités et
la mythologie grecques.
Son successeur Johan B o n sd orf f (1772-—1840) est, au contraire, ouvertement un partisan zélé du
rationalisme. Cette tendance se fait voir dans la manière dont il traite certains sujets de philologie
grecque, mais surtout dans ses recherchés sur une partie des miracles cités dans. l ’Ancien Testament.
Un vaste et savant ouvrage de Bonsdorff «Sur les plaies d’Egypte» fut apprécié même à l’étranger. Mais
la liberté de ses opinions religieuses et politiques fit qu’en 1823 il dut demander et obtint un congé
indéfini de ses fonctions de professeur.
Le successeur de Porthan à la chaire d’éloquence, J. F. W allen iu s , était un représentant typique
de l’esprit conservateur, bureaucratique et, à bien des égards, égoïste du temps. Ses écrits ont un caractère
plus purement philologique que ceux de Porthan, mais ils sont secs et froids, très inférieurs à ceux-là pour
le style et l’indépendance d’esprit. Comme orateur il a de la puissance, mais un peu d’emphase. C’est
à Wallenius que revient le mérite d’avoir le premier éveillé et répandu dans notre pays le goût de
l’art antique.
A cette époque, l’étude des langues classiques était le point de départ de tout travail scientifique
dans le domaine de l’histoire et de la philosophie. Deux professeurs d’histoire érudite, F r a n s M ic h a e l
F r a n z é n , l'aimable et délicat poète, et F r e d r ik W ilhelm Pipping, travailleur infatigable et exact, ont
traité avec succès des questions d’esthétique antique. — A nders J o h an L a g u s , professeur de philosophie
depuis 1805, était un philologue érudit et avait le goût délicat, l’esprit large, le style clair et chaud. —