tout ce qui concerne immédiatement la population finnoise: par suite de quoi les écrits et documents
rédigés en langue finnoise seront dorénavant acceptés sans obstacle par les tribunaux et les administrations
dans toute la Finlande».
Les avis furent unanimes quant à la justesse du principe ainsi reconnu. Mais on a fait observer
plus tard qu’une pareille mesure n’aurait pas dû être demandée à l’Empereur sans avoir été préparée •
par le Sénat et que la question des langues n’aurait pas dû être résolue sans la coopération des états.
Du reste cette ordonnance n’a été qu’un premier pas. Ce qui a fait en majeure partie 1 objet des luttes
de parti dans les temps qui suivirent, c’est la question de savoir si Ion devait avancer dune marche
plus rapide ou plus lente vers le but à atteindre : la parfaite égalité du suédois et du finnois comme
langues officielles. Dans les débats de la diète, les deux langues ont été employées de plein droit depuis
1863, avec faculté de faire traduire par un interprète en cas de besoin.
En 1864, l’Empereur nomma un comité qui fut chargé,: sous la présidence de Nordenstam, d’élaborer
un projet de réorganisation de la Forme du gouvernement et un nouveau projet de règlement pour la
diète’ Le premier projet fut laissé en suspens, mais la modification du règlement de la diète fit l ’objet
d’une proposition impériale à la session des états de 1867. Adoptée par la diète, la nouvelle loi fondamentale
fut promulguée le 15 avril 1869. La principale réforme qu’elle contient est la disposition relative
à la périodicité de la diète: elle statue, en effet, que les états seront convoqués au moins tous les cinq
ans. Sans abandonner la division traditionnelle en quatre ordres, la représentation fut notablement
améliorée par l ’extension du droit d’élection et de l’éligibilité dans les trois ordres électifs. Un autre
progrès fut l’introduction d’une nouvelle institution, celle des commissions dites commissions renforcées
ou délégations des soixante: dans les cas, en effet, où on ne peut obtenir une décision, faute de confor--
mité d’avis des quatre ordres ou d’une majorité de trois ordres, comme l’exige la loi, ces commissions
ont le droit de prononcer par un vote définitif sur les questions d’allocations, d impôts et quelques autres
qui ne peuvent pas rester en suspens. Une stipulation importante du Règlement au point de vue du
principe, c’est que les états de Finlande représentent la nation; les quatre ordres n’ont donc pas le
droit, comme c’était le cas d’après les idées anciennes, de se considérer comme les représentants d’intérêts
de classe ou dé Corporation: ils doivent travailler au bien de la nation tout entière. Ce principe trouve
toutè son application dans le Sein des commissions, où la votation n a plus lieu par ordres, comme
autrefois, mais par tête. Les stipulations relatives à la commission des finances règlent d'une manière
plus précise la- compétence des états en matière de finances. Un Règlement de la Maison de la noblesse,
promulgué en même temps que le Règlement de la diète, introduit entre autres réformes dans la composition
et le fonctionnement de cet ordre, l’abolition de sa division surannée en trois classes votant
chacune pour soi: les seigneurs, les chevaliers et les écuyers.
Une anomalie existait encore dans le gouvernement de Viborg: les tenanciers des terres dites de
donation (propriétés données par les empereurs de Russie, au siècle dernier, à des gentilshommes ou à
des fonctionnaires russes) n étaient point aussi assurés dans leur possession ni dans leurs autres droits
que leurs pareils des autres parties de la Finlande. L'Empereur reconnut l’opportunité de poursuivre le
plan d’Alexandre Ier, et la diète de 1867 adopta la proposition de contracter un emprunt pour racheter
les terres de donation pour le compte de l’État finlandais, à mesure qu’on pourrait le faire par contrat
librement Conclu avec les propriétaires, après quoi les terres, dûment cadastrées, seraient revendues aux
tenanciers. Ajoutons qu’à l’heure qu’il est, ce rachat est presque entièrement accompli. L ’État a dépensé
pour cela environ dix-sept millions de marcs, qui seront amortis successivement par les tenanciers
acquéreurs. C’est ainsi qu’une population de quatre-vingt mille personnes, recouvrant le droit de propriété,
a vu s’ouvrir pour elle le chemin du progrès économique et moral.
Une des nombreuses questions que la diète de 1867 avait à traiter, faisait contraste avec la nature
politique des autres. Il s’agissait de savoir si la loi provisoire de liberté de la presse, promulguée avec
le consentement de la dernière diète, serait prorogée. Le gouvernement y mettait pour condition
l’insertion dans la loi de stipulations de nature si restrictive que la diète repoussa ces modifications. Il
s’ensuivit que la liberté de la presse fut abolie et que les imprimés furent de nouveau soumis à la censure
préventive. L ’initiative de cette proposition appartenait au comte N. A d ler berg (1818— 1892),
gouverneur général depuis 1866, et qui, dans les premiers temps de son séjour en Finlande, s’était montré
très sensible à la critique des journaux.
Mais en même temps le comte Adlerberg fit de son influence un usage profitable: peu avant la
clôture de la diète, il obtint le - dépôt d’une- proposition impériale relative à la construction d’un chemin
de fer reliant la station de Riihimâki, sur la ligne de Helsingfors à Tavastehus, avec Saint-Pétersbourg.
Il avait également obtenu que l’État russe contribuerait à cette entreprise en se chargeant dû tiers des
fràis (cette part a été remboursée plus tard par l’État finlandais). La situation économique du pays
était à ce moment assez critiqué.. Les récoltes avaient manqué plusieurs années de suite dans une grande
partie du pays et le printemps très froid de 1867. faisait prévoir le même désastre pour cette année-là.
Mais la diète vit avec raison dans le- chemin de fer proposé un moyen de développement industriel pour
1$ pays. Aussi n’hésita-t-elle pas, malgré la gêne financière, à voter la proposition et à garantir un
emprunt dans ce but.
L’oeuvre principale de Snellman comme chef des finances fut l’accomplissement de la réforme
monétaire de 1865: dès lors les espèces métalliques furent la seule monnaie ayant’ cours légal. Il eut à
diriger l’action du gouvernement pour le soulagement de la disette causée par les mauvaises récoltes
-successive^, ce fut un lourd fardeau?. Il suivit strictement le principe que l’intervention du gouvernement
ne doit pas s’étendre au point de devenir une cause de relâchement pour la prévoyance et le travail
privés.
Par égard pour la mauvaise situation financière du pays,.l’Empereur sanctionna, en octobre 1867,
une mesure que beaucoup de personnes à cette époque jugèrent inopportune au point de Vue politique:
le licenciement de l’armée finlandaise «indelta».
Snellman quitta sa place au Sénat en juillet 1868.
En 1872, quand les états se réunirent de nouveau, le pays s’était remis des suites de la disette.
Depuis 1869 les récoltes avaient été bonnes et continuèrent à l’être pendant une dizaine d’années encore;
sous ces influences propices, l’esprit d’entreprise se réveilla dans toutes les branches des affaires. Les
ressources de l’État s’accrurent et fournirent sans difficulté les moyens de développer les institutions
publiques dont l’organisation ne répondait plus aux besoins d’une culture croissante: telles, l’instruction
publique, l’hygiène, les phares, etc. — Les nombreuses propositions impériales soumises à la diète de
1872 étaient presque -toutes relatives à des questions de droit civil, d’économie publique et de finances.
Le terrain politique ne fut abordé que par les états eux-mêmes dans un certain nombre de pétitions,
parmi lesquelles • il faut en noter une qui demandait que l’Empereur soumît aux états une loi de liberté
de la presse, Cette demande ne fut pas accordé^ Mais c’est peut-être à l’opinion exprimée par la diète
qu’on a dû la tolérance dont la censuré fit preuve dès lors. Pendant une longue suite d’années, jusque
vers 1890, les journaux furent à même de discuter sans restrictions notables les affaires générales
du pays.
Le comte Alexander Armfelt mourut le 8 janvier 1876, après avoir exercé pendant près de trente-cinq
ans les fonctions de ministre-secrétaire d’État. Une nature chevaleresque et un tact exquis lui avaient
gagné la faveur du monarque et la sympathie des hommes d’État russes. En Finlande on avait de mieux
en mieux compris qu’il était guidé dans l’exercice de sa charge par un sincère patriotisme. Son successeur,
le baron K. E. S t jern v a l l -W al le en (1806— 1890), était depuis vingt ans son adjoint. Il avait alors
'soixante-dix ans; ses fonctions lui furent rendues faciles par l’amitié personnelle qu’Alexandre II avait
depuis longtemps pour lui; il appartenait, en effet, au cercle intime de l’Empereur, ainsi que sa soeur,
Madame Aurore Karamzine, célèbre pour sa beauté et pour ses grandes qualités de coeur. C. P almroth
(1826— 1880), homme d’État habile? et d’un esprit très cultivé, fut nommé adjoint.
Une exposition générale de l’industrie et des beaux-arts avait été organisée à Helsingfors en 1876.
L’Empereur désira la visiter. Il arriva le 14 juillet avec l’Impératrice, le Grand-Duc héritier et son