organisé, en 1891, la troisième école de dessin. .L e s ouvrages d’artistes finlandais achetés en 1891 poulies
loteries des sociétés artistiques dé Helsingfors et d’Â b o représentaient Une valeur de 27,000 marcs.
D’un autre côté, le vif intérêt témoigné par le public pour les collections de l’Ateneum ou pour
les expositions particulières et publiques organisées à Helsingfors et dans les villes de province, prouve
assez que les jouissances artistiques sont devenues pour lui un besoin et que l’art est désormais un
élément important de culture dans notre pays.
Cependant l'oeuvre de la Société des beaux-arts ne s’est pas étendue à l’architecture, qui a suivi
ses propres voies. Elle aussi paraissait d’abord témoigner du peu d’avenir qu’avait l’art en Finlande.
Qu’on se rappelle que jusqu’à 1870 il ne s’est pas trouvé un Finlandais capable de remplir le poste
L ’e x p o s i t i o n d e s a r t i s t e s f in la n d a i s , o u v e r t e l e 6 o c t o b r e 1894, dessin Ide L . S parre .
de directeur des monuments publics; Basai, Engel, Lohrmann, Edelfelt, qui se sont succédé dans ces
fonctions, étaient tous étrangers! C’était surtout à l’occasion de la construction de quelque grand édifice
public qu’on avait dû appeler des étrangers: Charles Bassi, Italien établi en Suède, qui resta dans notre
pays pour diriger la construction des nouveaux bâtiments universitaires à Âbo, l’Allemand Engel, de
Saint-Pétersbourg, appelé pour transformer la petite ville de Helsingfors en capitale du pays, le Suédois
Karl Setterberg, chargé d’une mission pareille â Vasa, lorsque, après le grand incendie de 1852, cette
ville fut transportée, en 1862, sur' l’emplacement qu’elle occupe actuellement et reçut le nom officiel
de Nikolaistad.
Parmi ces hommes il en est un cependant dont le souvenir est resté si vivant en Finlande que
nous le considérons comme un des nôtres, en dépit de son origine étrangère. Et nous en avons le
droit en un certain sens, car non seulement c’est ici qu’il accomplit les travaux qui font l’honneur de
sa vie, mais encore il s’assimila complètement à nous pendant les vingt-quatre ans qu’il passa en Finlande.
C ’était C a r l L u d v ig - E ngel (né à Berlin en 1778).
C’est vraiment un bonheur pour nous que le choix soit tombé sur un artiste de la valeur d’Engel,
lorsqu’il s’agit de manifester par les édifices publics de la capitale la noble intention du vainqueur qui
voulut que le peuple soumis prit place «au rang des nations». Il semble, il est vrai, qu’Engel, malgré
la grandeur de la tâche qui lui était confiée, ait dû trouver son sort assez tragiqùe, lorsque, avec l’étin-
Çelle du génie dans son sein, il se vit relégué au milieu d’une petite communauté qui ne pouvait guère
donner aux créations de son génie que l’hommage d’un étonnement naïf. Mais nous ne lui en devons
que plus de reconnaissance: de ce que son inspiration ne se soit point refroidie, et de ce qu’il n’ait pas
abaissé ce qu’il exigeait de lui-même au niveau artistique, du milieu où il se trouvait placé.
Engel fut le créateur du Helsingfors monumental, dont le plan était déjà en lui-même un chefd’oeuvre
artistique et prouve qu’il n’était pourtant pas absolument isolé et incompris. Il donna à la ville
son -cachet dominant, son individualité architectonique, pour ainsi dire, en harmonie avec sa situation
ouverte à l ’air et à la lumière, entourée qu’elle est
de deux bras de mer.
Engel était de son temps et en suivait le goût
pour l’antique. Son idéal artistique était une simplicité
classique, et on .est confondu, en effet, de la
grandeur, malgré des proportions relativement restreintes,
du sérieux digne, malgré la raideur pompeuse
caractérisant le -goût du temps, qu’il sut imprimer
à ses oeuvres. Les plus pures de celles-ci,
au point de vue artistique, sont sans doute deux
édifices jumeaux, le palais du Sénat (achevé en
1822) et le bâtiment de l’Université. Mais la Bibliothèque,
conçue commé le lieu de réunion des
grands esprits de la littérature, et l’église St Nicolas,
dont la colonnade, appuyée sur une terrasse
de granit, semble soulever bien au-dessus des maisons
de la ville la haute coupole, qui, vue de loin
en mer, semble une couronne ducale posée sûr le
ffont de la Finlande, ces belles créations attestent
plus encore la hardiesse de son génie, la hauteur
de ses visées. Outre ces travaux considérables
C. L . E n g e l .
(voir lès gravures pp. 28, 95, 169, 170, 171),
groupés de manière à produire un grandiose effet d’ensemble, Engel bâtit à Helsingfors et dans la province
un grand nombre d’édifices en briques et en bois; le bois cependant ne se prêtait pas bien à
ses idées architecturales, conçues en vue de l’emploi de la pierre.
Engel mourut à Helsingfors en 1840, douze ans avant l’achèvement de l’église St Nicolas. Ainsi
toute sa carrière en Finlande coïncida avec l’époque d’insignifiance artistique dont nous avons parlé. On
doit estimer très haut l’influence que les oeuvres d’Engel exercèrent sur le réveil qui suivit, si même on
devine cette influence plutôt qu’on ne peut la prouver, car Engel ne fit pas école d’architectes finlandais.
Mais il avait donné à notre peuple des modèles d’une grande beauté, comparables pour la hauteur
de la conception et pour le classique de la forme à l’oeuvre poétique de Runeberg. Toutefois, cette
ressemblance ne tient pas à une action des créations de l’architecte sur celles du poète. Engel appartenait
à une génération antérieure et ne put pas, comme son compatriote Pacius, plus jeune de trente et un
ans, s’assimiler les idées qui commençaient à sourdre dans la communauté finlandaise.