
avec moi. Il étoit ravi de retrouver des compatriotes
avec lesquels il pourroit parler sa
langue maternelle. Moi, je l ’étois de voir
en lui une confiance qui fondoit, la mienne.
Ainsi j ’acceptai son offre avec recon-
noissance, et nous partîmes.
On se doute bien qu’en route mon premier
soin lut de l ’interroger sur l’aventure
qui l’avoit transplanté chez les Houzouâ-
nas. Il me., conta que né dans les environs
du Camis., il avoit v é cu , pendant assez long-
tems, sujet de la Compagnie ; mais qu’ayant
éprouvé des mauvais, traitemens et des injustices
, et déserté avec un Nègre esclave,
attaché au même maître que lu i , après bien
des courses , il étoit venu chercher asile et
protection chez les Houzouânas. Le Nègre
étoit mort d’une flèche empoisonnée, dans j
une escarmouche que la horde avoit eue à
soutenir avec une horde étrangère. Pour
lu i, resté seul, il continuoit de vivre avec
ses anciens protecteurs, dont ,x par son courage
, il étoit, en quelque sorte, devenu le
chef.
J’excusois sa désertion. Elle me parois-
soit légitime y mais je ne pouvois comprene
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dre commènt il avoit fixé de préférence sort
séjour chez des brigands , dont la profession
étoit le vol et le meurtre ; et je lui fis ,
à ce sujet^ quelques reproches. Voici ce
que je compris de ses discours. ‘
Les Houzouânas ne sont point meurtriers
par profession , comme vous le croyez,
me répondit-il. Si quelquefois ils versent
du sang, ce n’est point la soif du carnage,
mais une jUsté représaille qui leur met les
armes à la main. Attaqués et*poursuivis par
les autres nations , ils se sont vus réduits à
fuir dans des lieux inaccessibles,’ dans des
montagnes stériles Ou eux seuls peuvent
vivre.
S’ils trouvent à tuer des gazelles ou des
damans, si les nymphes des fourmis sont
abondantes, si leur bonne fortune leur amène
beaucoup de sauterelles, alors ils restent
dans l ’enceinte de leurs rochers. Mais
si la subsistance vient à leur manquer, malheur
aux nations voisines. Du haut de leurs
montagnes, ils promènent au loin les yeux
sur les contrées d’alentour. Y apperçoivent-
ils des troupeaux, ils vont les enlever, ou
les égorger, selon les circonstances ; mais*,
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