
netré jusqu’à moi. Mes trois charriotsétoient
meme au-dessus du vent j e t , par un hasard
bien heureux, ils paroissoient n’avoir
rien à craindre pour le moment actuel.
Aussi mes gens me crièrent-ils de rester
en repos au lieu où j ’étois, et de ne
pas m inquiéter, Quelques-uns d’eu x , soit
par eux-mêmes, soit par o u ï-d ir e , con-
noissoient ces sortes d’embrasemens j et
ç est ce qui fît qu’ils ne perdirent point la
tete et qu’ils purent porter par-tout des
secours efficaces. En un instant, tous les
hommes et femmes se mirent après mes
charriots, qui furent traînés assez loin
pour n’avoir plus rien à redouter de l ’incendie,
Heureusement que personne ne périt dans
cette expédition ; il n ’y eut même que mès
boeufs qui souffrirent de l ’accident. Plusieurs
eurent des brûlures considérables
qui les estropièrent ; et l ’un d’eux p é r it,
sans qu’il fut possible de le secourir.
Ce fut pour moi un spectacle à la fois horrible
et sublime que cet énorme animal, se
débattant au milieu des flammes, dont ses
affreux trépignemens augmentoient encore
la violence. L ’air était au loin rempli de
ses cris. Il expira bientôt. Le feu étoit si
violent qu’il fut rôti jusqu’aux êntrailles ,
et qu’après l ’incendie mes gens le retirèrent
et mangèrent ce qui en étoit resté ,
sans autre apprêt.
D’après l ’accident fâcheux qui auroit pu
m’arriver, je ne puis trop recommander à
ceux qui pourroient voyager ên Afrique -,
de ne jamais camper sur les vieux krâals
abandonnés ; il n’est pas douteux que , si
le vent eût soufflé malheureusement du
côté où j ’étois , l ’incendie se fut bientôt
communiqué à mes voitures, et il est plus
que probabfequ’étant couché dans le char-
riot qui contenoit toute ma provision de
poudre , j ’aurois infailliblement sauté en
l’air et péri avant peut-être que personne
ne se fut apperçu du feu.
La plus grande partie de notre nuit se
passa à déménager le camp , pour nous
poster sur la terre franche. Nos boeufs ,
effrayés de tout ce vacarme et encore plus
du feu, s’éparpillèrent dans les bois, d’où
nous eûmes toutes les peines à les déloger
pour les rassembler autour de nous.