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et conduit par cinq Hottentots. A leur suite
marchoient trois vaches maigres et quelques
moutons. Pour eux , ils étoient quatre : un
homme , une femme et deux enfans. Mais
hommes , yoiture, animaux, tout annon-
qoit la plus profonde misère, 'ët les maîtres
eux-mêmes, en portoient le signe sur les ha-
billemens dont ils etoient couverts.
A leur aspect, je\më sentis involontairement
attendri. Eux , au contraire , témoignèrent,
en me voyant, la joie la plus vive.
Leurs yeux , leurs regards , leurs mouve-
mens me l ’annonçoient. Les deux époux
sur-tout ne pouvoient suffire a m exprimer
leur contentement. A les entendre, c etoit
pour eux le bonheur le plus grand de m’a-
voir rencontré ; et ils regardoient ce jour
comme le plus heureux de leur vie.
Ne les ayant jamais rencontrés dans aucun
lieu du monde , je ne pouvois comprendre
d’où venoit cette allégresse qui
contrastait si fort avec leurs haillons et
leur indigence. J’étais -empressé d’en apprendre
la cause ; et néanmoins je ne pus
les interroger et satisfaire ma curiosité que
quand nous fûmes arrivés au camp et que
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leur voiture fut rangée près des miennes.
A lo rs , les introduisant dans mà tente, je
leur offris des rafraichissemens, qu’ils acceptèrent,
et nous entrâmes en conversation.
Le mari, né en Afrique, ainsi que sa
femme, étoit un de ceè hommes inconsé-
quens et sans caractère, dont on rencontre
chaque jou^f tant de modèles , et q u i,
jaloux du repos et des commodités de la
vie , mais naturellement paresseux, n’aspirent
qu’à s’enrichir promptement , pour
joûir au plus vite d’une vie tranquille et
heureuse. Celui-ci, n’ayant point vu jour
à faire , dans la colonie , une fortune aussi
rapide qu’il le désiroit, et entendant parler
de celle qu’avoient faite , chez les Na-
maquois, certains particuliers , avoit imaginé
d’y passer aussi y se flattant de rencontrer
là ce qu’il n’avoit pas trouvé chez
lu i, et ne se doutant pas que la fortune
est par-tout où sont l ’activité , l’industrie,
l ’intelligence , et qu’elle n’est que là y et
ces qualités, à ce qu’il me parut, n’étôient
pas les siepnes. Long-tems il avoit entendu
raconter des merveilles de la contrée des
Namaquois , et on lui avoit conseillé d’al-
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