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compter beaucoup sur l ’activité qu’exigeoit,
pendant ma longue absence, la tenue de
mon camp. D’ailleurs , quipouvoit me répondre
de la vie d’un vieillard ? et ne fût-il
même que malade, combien d’inquiétudes
ne devois - je pas avoir pour le fruit de
tant de peines ? -
Au milieu de ces perplexités et de ces déterminations
vagues que venoit de me causer
l ’incertitude des moyens d’exécution ,
je pris le parti de consulter mon fidèle
Klaas. Dans les circonstances embarrassantes
, ce brave homme étoit mon conseil,}
et toujours j ’avois trouvé en lui autant de
bon sens que de zèle et de courage. Je lui
communiquai mes réflexions, mes projets
nouveaux et les difficultés ainsi que lés espérances
que j ’y entrevoyois.
Il m’écouta très-attentivement 5 puis me
frappant dans la main, me dit qu’il etoit
de mon avis sur mes dispositions nouvelle
s , et principalement sur mon dessein de
ne plus voyager qu’avec des boeufs de charge.
« Pour ce qui regarde , ajouta-t-il ,
« l ’envie que vous avez d’aller chez les
« Heuzouânas, je n’ai pas besoin de vous
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« dire que je suis prêt à partir dès l ’ins-
cc tant* vous savez què par-tout où. il vous
« plaira d’aller , Klaas vous suivra toujours
ce fidellement et avec plaisir $ mais s’il vous
« faut, avec moi, quelques personnes de
« bonne volonté, je réponds de cinq de
« mes camarades, sur lesquels vous pou*
« vez compter , comme sur moi, jusqu’à
ce la mort.
Cette protestation de dévouement dans
un homme d’un zèle éprouvé , l’assurance
qu’il me donnoit de quelques compagnons
braves et déterminés j tout cela me causa
tant de joie et m’exalta tellement la tête ,
que, dans un premier mouvement, je fus
tenté de congédier tout ce qui m’étoit inutile
, et de partir sans délai à l’instant même.
Mais un retour de réflexion m’arrêta.
Je vis qu’un demi jour me seroit avantageux
pour disposer mes préparatifs ; en conséquence,
je différai mon départ jusqu’au
lendemain matin, et donnant ordre aux;
cinq hommes que m’avoit désignés Klaas ,
de se tenir prêts à partir de bonne heure,
je déclarai aux autres que je les laissois
maîtres de leur conduite, mais que ce