
à Craindre qu ’un coup de main ou quelque
surprise nocturne. Ceux-là , au contraire
présentaient un corps de nation très-redoutable
; et, à dire le vrai, j ’étois étonné qu’une
société d’hommes sans frein, sans discipline
et sans amis, put néanmoins subsister. Mais
ce qui me surprenoit bien davantage, c’est
qu’ils subsistassent impunément, et qu’ils
eussent un domicile tranquille , au milieu
de vingt hordes différentes,: qui sans cesse
scuffroient de leur brigandage et n ’avoient
pas le courage de les détruire.
Quant au vol qui me regardoit, on me
raconta, sur la manière dont.il m’avoit été
f a i t , quelques particularités que je ne con-
rtoissois pas. C’étoit Bernfry et Moodel qui
en avoient donné le conseil et le plan. Ces
deux scélérats, unis de société et dignes
d’être amis, étoient en relation avec les
Boselijesroan. A l ’affut des. expéditions et
entreprises que ceux-ci pouyoient faire,
ils leur en donnoient avis ; indiquoient les
moyens de réussir j dirigeoient l’opération,
et partageoient ensuite les profits.
Moodel sur-tout, lié avec la horde plus
particulièrement encore que Bernfry, étoit
à la fois et son espion et son protecteur.
C’étoit chez elle qu’il faisoit garder ses bestiaux.
Tous ceux que j ’y avois vus avoient sa
marque et lui appartenoient ; et les Gheys-
siquois regrettaient fort qu’en punition du
v o l qu’il m’avoit fait faire, je ne les lui
eusse pas tous enlevés.
J’avois pris des précautions pour défendre
les miens, en cas de nouvelle attaque
pendant la nuit. Mais, soit que les Bosch-
jesman eussent perdu notre trace dans les
ténèbres , soit qu’ils craignissent l ’appui
que pouvoit me donner la horde , ils ne
parurent point.
Pour leur échapper et pour arriver à mon
camp, j’avois encore , suivant mon estima-1
ftion-, quinze ou seize lieues à faire j et dans
[l’impossibilité d’achever en un seul jour
[une si longue traite , je me proposois au
moins de forcer la marche et d’aller , au
[plus loin possible , passer la nuit. Mais l ’é-
tatoùétoient mes boeufs nrempêchoit d’exé-
[cùter ce projet. Forcés par les voleurs à des
[marches non interrompues et à des fatigues
extrêmes , sans qu’on, leur eut même laissé
pe teins de manger une seule fo is , ils se