
de se montrer bons pères et bons maris-,
ils me rappeloient, avec un attendrissement
simulé , leurs femmes et leurs, en-
fans, qu’ils eussent battus peut-être, s’ils
avoient été près d’eux 3 ils me partaient de
leurs fatigues, de leur santé , et su/-tout
des obstacles locaux et particuliers qu’al-
loit m’offrir mon nouveau projet.
Effectivement, si j ’en croyois les gens de
la horde , j ’avois à traverser un désert qui
exigeoit cinq jours de marche, et dans lequel
je ne trouverois , ni pour ina trtmpe,
ni pour mes animaux, aucune sorte de
nourriture ni de rafraîchissement. Pas le
moindre vestige de végétation 3 pas même
de ter*e végétale. Ce n’étoit qu’une vaste
mer de sable , où il ne seroit pas possible
de faire un pas sans enfoncer jusqu’aux genoux
3 mais ce sable, mobile etléger comme
la poussière, étoit si lin, que nous courions
le risque d’être étouffés au moindre vent 3 si
même nous ne périssions pas de soif et de
faim, de fatigue et de misère, avant seulement
d’avoir fait la moitié du chemin.
Ces avis effrayans étoient confirmés en J
apparence par la conduite des Kabobiquois
eux-mêmes. Malgré les invitations de leur
chef, malgré l ’appas des présens que j ’of-
frois , pas un seul homme de la horde n’a-:
voit voulu consentir à me servir de guide.
Mais ce refus ne m’allarmoit point. Tout
inquiétant qu’il paroissoit être, je l ’attri-
buois à la crainte qu’avoient tous ces malheureux
poltrons d’aller se livrer, en.quelque
sorte, entre les mains des Houzo.uâ-
nas. Plus on s’obstinoit à me représenter
ce pays comme extraordinaire , et plus j ’é-
tois empressé de le connoître. Mon imagination
s’y représentait des objets nouveaux
pour l’histoire naturelle, des découvertes
intéressantes pour le commerce, des détails
même fort piquans pour la curiosité,
et d’autant plus singuliers que personne
encore avant moi n’avoit été à portée d’en
être instruit.
Quant ,à toutes les relations effrayantes
qu’on m’en faisoit, je n’y yoyois que des
récits exagérés qui, en passant successivement
par la bouche de mes différons interprètes
, grossissoient selon la peur plus ou
moins grande de chacun d’eux. Et après
tout, puisque les Houzouânas venoient jus