
celle de conduire an camp les boeufs eux-
memes. On s étoit flatté de leur faire traverser
la rivière à la nage. Mais, comme
jamais ils n’en avoient vu une aussi lar^e,
ils s’étoient effrayés de la traversée et s’y
refùsoient tous. En vain on avoit mis à
. 1 eau quelques-uns de ceux du troupeau,
pour les déterminer jmr l ’exemple ; en vain
on avoit employé tous les moyens possibles,
et jusqu’aux coups'; ils résistaient toujours.
Enfin, comme la nuit approcïioit, on résolut
de tenter une dernière ressource.
Un peu plus b au t, en remontant, était
un endroit où la rivière , ayant une île , se
partageoit en deux bras. Il étoit à présumer
que quand les animaux verroient une’
largeur moins considérable , ils seroient
moins effrayés et se mettroient sans peine
a la nage. A u moins nous nous en flattions
; et dans cettex espérance je les fis
conduire au lieu désigné, avec un nombre
d ’hommes suffisant pour les garder
pendant la n u it , et arec ordre de tenter
la traversée , au lever du soleil.
D après ces dispositions, je crus tout
prévu, et j ’allai me coucher sans inquiétude
dans mon charriot. J’y dormois encore
fort tranquillement , le lendemain
matin , quand Klaas vint brusquement
m’éveiller et me crier de me lever sans
délai.
Ma première pensée fut qu’il étoit bien
aise de m’annoncer le passage du troupeau;
et je lu i demandai si l ’on avoit eu beaucoup
de peine. «< Il ne s’agit point de ce la, me
» dit-il ; tout est perdu. Pendant la n u it,
»les gardiens se sont endormis, et ils ont
» laissé éteindre leurs feux. Les Boschjes-
» man, qui étoient à l’affu t, ont profité de
» ce sommeil pour enlever le troupeau en
» entier.
» Par hasard , l ’un des dormeurs s’est
»éveillé. Il s’est apperçu du vol et à crié
» aux armes i Tous ont couru après les ma-
» raudeurs ; mais ceux-ci étoient en si grand
» nombre , et leur arrière-garde , qui pro-
» tégeoit la marche des autres , a décoche
» tant de flèches qu’après quelques fusilla-
3? des, nos gens sont revenus sur leurs pas ,
33 ramenant seulement trois boeufs très-mal-
33 traités, qui étoient demeurés en arrière.
33 II ne nous reste plus qu’une ressource ;