
Néanmoins , je craignois qn’il ne restât
d!ans les esprits quelques sémenCes de soup*
çon et d’animo'sité. Mais quand ont f î t lés
blessés'màrcher à lëur ordinaire et se bien
porter , on plaisanta dè Paventurè ; et elle
në produisit d’âutië effet que d’frïspirer une
telle terreur des fusils , qn’il n’y eut plus
■personne qui oîsât y'toucher.'
• : Lie soir, dès que mes feux fuient allumés
, tout le monde vint y danser et faire
Cèrclè , coiüme à l’ordinaire. Les conversations
roufèrént toutes sur l ’accident du
matin y si cependant ori peut appeller conversations
le tumulte et le brouhaha d’une
multitude d’hommes qui pàrloieîit1 six langues
différentes. • ■
‘ Je m’ën âmüsois beaucoup,: quoique je
h ’y comprisse riéhv Seulement j ’enténdois
toutes les bouches prononcer le mot de
kaaboup ; c’est le nom que mes Hottentots
donnoient au fusil y et ce nom étoit celui
qu’avoient adopté tous les Sauvages qui
composoient-L’assemblée. Parmi les Kaboli
iquois , les uns imitoiënt avec le son' de
la voix l ’explosion du kaaboup ; les autres
faisoient le geste d’un homme qui couche
en joue pour tirer ; c h a c u n jouoit sa pantomime
Ces gaietés durèrent toute la nuit y
et ce fut ainsi q u e se termina une journée
qui avoit menacé d’être tragique et sanglante.
Le Kabobiquois n’a ni le nez écrasé des
Hottentots, ni la pommette des joues-élè-
v é e comme eux , ni enfin cette couleur bâtarde
de peau q u i , n’étant ni blanche ni
.poire , les rend étrangers et presque odieux
aux d e u x races. Il ne s’otnt pas le corps de
. ces graisses dégoûtantes qui font qu’on ne
peut approcher .d’eux sans se gâter et s’em-
puantir. Aussi grand que le Caffre pour la
taille , il est d’un noir aussi decide que lui.
J’ai dessiné ce Sauvage dans toute sa
.gloire , c’e s t-à -d ire , tatoué, couvert de
ses ornemens et jo y au x , et arme de pied
en cap comme; pour un jour de bataille,
. Il se prêta t r è s - complaisamment à mon
désir. Mais j’avoue que quand je le vis entrer
dans m a . ton te , le, carquois sur l ’épaule,
le bras passé dans son bouclier , lé corps
paré noblement d’un long manteau qui
traînoit jusqu’à terre ; quand il ^s’appuya
fièrement sur sa lance avec,la tete haute
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