
*4 V o y a g e
je le comblerois de présens , et que je lui
donnerais sur-tout une distinction qui 1 e-
îeveroit au - dessus de tous ses pareils et
qui rendroit la horde une des plus célèbres
de toute la contrée. Mais quelle fut
ma surprise, lorsque le soir j ’eus compris
que c’étoit sur ma tête que venoit s’appé*
santir la couronne. En apparence épouvanté
de ce coup de foudre , j en tirai le
parti que je m’étois promis pour rétablir
entièrement le calme , et je consentis, s ils
promettoient de s’y soumettre, a leur donner
le véritable chef digne de les conduire
et de les rendre heureux.
J’avois pris secrètement , par mes interprètes
, les informations qui m’étoient nécessaires
pour arriver sûrement a mes fins.
Je ne voulois , dans le fond, que cônnoi-
tre leur choix ou l’inclination du plus grand
nombre. Par-là, en le leur indiquant, j y
mettois une sorte d’inspiration capable de
les frapper. Je réussis au gré de mes désirs
i on me nommoit un certain llan p a ,
Haripa fut proclamé par moi.
Le Sauvage a les passions violentes. Sa
colère est terrible y mais l ’explosion en est
e n A y I Q u E. 1$
courte, et bientôt il revient à la douceur
naturelle de son caractère. C’est ce que
j ’éprouvai ce jo u r - là . L ’effervescence de
la troupe étoit calmée j on se retira paisiblement
et dans l ’intention de m’obéir.
J’ignore si les femmes, en se séparant,
sê concertèrent entre élles, et si mon choix
secondoit leurs voeux j mais le lendemain,
matin, à l ’heure indiquée, toute la horde
se rendit vers moi, ayant à sa tête le chef
Haripa. C’étoit un homme d’une quarantaine
d’années ; grand, bien fa it , très-
fort, et par conséquent appelle par la na •
ture à dominer la tourbe des foibles.
Avant de procéder à Son inauguration,
je voulus savoir si tous les suffrages s’ac-
eôrdoient à le reconnoître , et si personne
ne protestoit contre son élection. Sur l’assurance
qu’on donna dé l’unanimité du
choix. Je fis approcher Klaas. Celui-ci tenait
en main un de ces bonnets de grenadier
que in’avoit donnés le colonel Gordon
, et dont j’ai parlé ailleurs. Klaas en
avoit bien épousseté l’étoffe, bien frotté
la plaqué de cuivre doré qui étoit à la partie
antérieure. Cette plaque représentoit