
renoncer à me faire précéder, et c’est ce que
je fis aussi. Nous arrivâmes , vers les neuf
heures du so ir , à la vue de la horde j et
aussitôt, sans autre préliminaire, j ’établis
mon camp à deux cents pas d’elle.
Une arrivée aussi brusque ne pouvoit
manquer d’y jeter 1 alarme, et peut-être
de la disperser à l ’instant. Mais quelque pût
être leur effroi, un grand malheur les met-
toit hors d’état de fuir : c’étoit une maladie
pestilentielle , qui déjà avoit fait périr
beaucoup d’entre eux. Ceux qui existoient
encore, s’en trouvoient tous attaqués, ainsi
que leurs troupeaux. Couverts d’ulcères de
la tête aux pieds, ils étoient gissans dans
leurs huttes, où ils exhaloient une odeur
cadavéreusè et insupportable.
Cette peste, disoient-ils, avoit pris naissance
dans les contrées de l’ouest. Elle s’y
étoit répandue avefc des ravages affreux ;
et c’est-là qu’eux-mêmes l ’avoient gagnée.
Il y avoit peu de jours que ceux de la.horde
qui se croyoient en santé, s’étoient retirés
vers le su d , pour échapper à l’épidémie.
Mais ils en pOrtoient le germe avec eux ;
et probablement, ajoutoient les malades ,
elle se sera développée dans leur route.
Cette fu ite , au reste, pour le dire en
passant, dohne l ’explication de ces assertions
absurdes qu’ôn trouve dans certains
voyageurs mal instruits. A les entendre,
les nations sauvages, dans leurs émigrations
et leurs marches , abandonnent ceux
des vieillards et des infirmes qui ne sont
pas en état de les suivre. C’est-là une calomnie
j et cette calomnie est fondée sur
une erreur que le fait qu’on vient de lire
peut servir à rectifier.
Le spectacle horrible que nous avions
sous les yeux jeta l ’épouvante dans ma
caravane , et sur-tout parmi mes Grands
Namaquois , q u i, plus susceptibles de terreur
, parce qu’ils étoient les plus lâches et
les plus pusillanimes de ,1a troupe, avoient
d’ailleurs quelque expérience sur cette peste
qu’ils avoient vue répandue sur leur nation,
et dont, par conséquent, ils connoissoient
les effets.
Ils me déclarèrent que si je ne changeoi*
point de route, ils se sépareroient de moi ,
le lendemain ; quq la crainte d ’être attaqués
par les Boschjesman n’étoit rien pour
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