
choient d’eux-mêmes , pour le reconnoître
et s assurer s’il ne recéloit point quelque
embuscade j et ilsme nous laissoient point
avancer qu’ils n’en eussent donné le signal.
Vrais enfaris, dont la timidité même me
rendoit la société plus douce , et que j ’au-
rois conduit aux deux pôles , en cent déserts,
ou. je leur aurois garantis l’existence
a laquelle ils sont attachés 'par-dessus tout :
heureux de ne point connoîtré nos désirs,
qui nous rendent cette existence 'bien souvent
amère et difficile à supporter.
Pendant la halte que nous fîmes pour
dîn e r, un des Sâuyages de la horde, qui
étoit allé à la découverte, vint m’annoncer
qu’a quelques lieues sur notre droite,
il avoit reconnu un des coudes que forme
l ’Orange dans son cours, et àpperçu les arbres
qui bordent ses rives. Cette nouvelle
répandit la joie dans la troupe. On reprit
la route gaiment, sans changer notre première
direction ^ et vers les quatre heure»
du so ir , nous arrivâmes au fleu ve , après
avoir fait dix lieues dans notre journée.
En ma qualité de maître , je commenças
par choisir-Un lieu, avantageux pour le carrn
pement de ma petite caravane. Au milieu
des arbres du rivage, nous eussions couru
trop de risques, si dans la nuit les Bosch-
jesman fussent venus nous attaquer. A cinq
ou six cents pas en-deçà étoit un bouquet
d’arbrisseaux, assea considérable, et composé
particulièrement d’ébéniers.
Ce buisson, épais et touffu, me parut
propre à nous servir d’abri. Je fis abattre,
aux environs, tous les plants qui pouvoient
borner notre vue ; et cet abattis n’exigea pas
beaucoup de peine , parce que tout y étoit
euphorbes, grands ou petits. Puis, tandis
que quelques-uns de mes gens alloieiit, de
côté et d’autre, couper du bois pour alimenter
les feux de la n u it, d’autres, sous
ma direction, nettoyèrent l ’intérieur du
fourré et y pratiquèrent une place , capable
de nous contenir tous. Les bords extérieurs
furent fortifiés avec des branches
entrelacées , qu’on garnit de nattes et de
peaux. Enfin, pour nous garantir des flèches
qui eussent pu tomber verticalement
sur nos têtes , je fis étendre , en forme de
dais , ma canonnière sur des piquets, et
j ’en formai , ainsi un toit sous lequel nous