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ne connoissant pas les motifs particuliers dé
mon voyage, né le regardoient que comme
nne témérité extravagante.
Dans la journée, nous éprouvâmes§ mal*
gré nos précautions et nos parasols , une
augmentation de souffrances. Soit action
de l ’excessive chaleur, soit effet du climat
ou de la poussière saline J nous eûmes
tous des saignemens de nez très-fré-
quens et dès maux de tâte intolérables.
La lièvre, qui probablement accompa-
gnoit ces symptômes , nous donna même à
tons ce que jamais mes Sauvages n’a voient
éprouvé, et ce que moi-même je Sentis pour
la première fois de ma vie j c’étoient des
éblouissemèns et des vertiges , ou plutôt uti.
véritable -délire. Il nous semblait voir devant
nous des charriots, des maisons, des
villes ou fcraals, des troupeaux nombreux t
enfin mille objets divers qui changeaient de
forme et én produisaient d’autres, à mesuré
que nous avancions.
Mais ce qui est “à remarquer, et Ce qui
nous frappa de quelque effroi, en nous ¡faisant
sentir le danger et la réalité dé notre
situation, c’est qu’aucun de nous ne voyoit
]a même chose, et que ce qui pour l ’un,
étoit une montagne , paroissoit à l’autre
nne rivière. Bientôt pourtant nous apprîmes
à nous défier de ces visions fantastiques
j et à force de nous assurer , par l’expérience
, qu’elles étoient imaginaires, nous
ne crûmes plus à leur réalité.
Il est vrai que l ’effet n’en étoit pas habituel.
Dans certains momens elfes cessoient
totalement, et permettoient à nos yeux.de
ne plus voir les objets que comme ils exisr
toient réellement. Dans d’autres., au contraire
, notre faculté visuelle s aneantissoit
tout-à-coup } nous éprouvions un éblouissement
de cécité , et nous restions comme
aveugles pendant plusieurs minutes.
Mes gens attribnofent à sorcellerie tous
ces effets contradictoires et destructeurs les
uns des autres- M o i, je les ero y ois" principalement
dus à l’action/du spfeil : c a r ,
quoique depuis plus de sept semaines il
eût quitté le tropique et qu’en avançant
vers l’équateur, il ne nous envoyât que
des rayons obliques, néanmoins il avoit
tellement échauffé la terre, et l ’air étoit si
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