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 Départ  pour  la  petite  oasis. —  Rencontre  d’une  caravane armée.  
 —  Nature  du sol. — EI-Arâye, Abou  el-Bahreyn. — Nouvelle  
 alerte. — Observations thermométriques. — Lac  dans le désert.  
 —- Source  d’eau  douce. >— Insectes  ihalfaisans. — Congélation  
 de  l’eau  dans  la  nuit  du  26  au  27  décembre.  —  Fossiles  et  
 minéraux. 
 J ’a v a i s   décidé  le  cheykh  Kouroum  à  me  
 conduire  de  Syouah  à  la  petite  oasis.  II  trouva  
 à  propos  de  n’en  rien  dire  aux  habitans,  qui  
 étaient persuadés  que  nous suivions la caravane  
 jusqu’à Alexandrie; nous laissâmes même ignore!*  
 notre projet  aux Arabes  de  la caravane. Le  23,  
 nous  partîmes  à  sept  heures  et  demie ,  et  suivîmes  
 d’abord  la  même  route  que  nous  avions  
 prise  en  allant. Comme  nous  devions, pendant  
 cette  journée,  prendre  une  direction  plus méridionale  
 que  la  caravane,  nous  la  laissâmes  
 avancer en nous tenant un peu en arrière. Après  
 deux heures de marche,  nous  la vîmes  s’arrêter  
 devant nous  :  à ses mouvemens,  nous jugeâmes  
 qu’il y  régnait  un  grand désordre. Je  m’y portai  
 et  je  reconnus  en  arrivant  qu’ils  étaient  épouvantés  
 par la vue d’une autre caravane qui venait  
 de  notre  côté,  et qui était encore à  une  grande  
 distance.  Kouroum  me  dit  qu’il  croyait  que  
 c’étaient des Oualad-AIy, tribu  en guerre avec le  
 pacha d’Egypte,  et  dont  une  partie  s’était  soumise  
 le  mois  précédent.  Leur  approche  jeta  
 l’effroi  dans  notre  caravane.  Avec  le  secours  
 d’une  longue-vue,  j’observai  les mouvemens  de  
 ces  ennemis  prétendus  :  ils  avaient  rangé  leurs  
 chameaux  sur  leur  gauche.  Quand  je  les  vis  
 s’avancer en  toute  hâte,  leurs  fusils  en main et  
 sautant  suivant  l’usage  des  Bédouins,  je  ne  
 doutai plus que ce ne fussent en effet des Arabes  
 Oualad-AIy.  Nous  descendîmes  tous  de  nos  
 dromadaires;  chacun  avait déjà  saisi  ses armes :  
 beaucoup  d’Arabes  de  notre  caravane  avaient  
 des  fusils ,  mais peu  de poudre.  J ’étais  sollicité  
 de  toute  part  pour  donner  des  cartouches  et  
 des pierres à fusil;  je  distribuai  la moitié de mes  
 munitions.  Nous  nous mîmes  ainsi  en  défense,  
 tous rangés sur une même ligne, afin de paraître  
 plus nombreux. Kouroum et quelques autres des  
 plus  anciens  couraient  devant  nos  Arabes,  en  
 criant  et en  sautant  comme  nos  adversaires,  et  
 faisant  pirouetter  ieurs  fusils  dans  leurs  mains  
 (les Arabes  ont  cet  usage  avant  de  combattre,  
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