lenteur), les sinuosités du chemin, les traites de
jour ou de nuit, on évalue la marche moyenne
du chameau à trois quarts de'lieue par heure.
Mais il est beaucoup d’autres circonstances qui
sont encore plus irrégulières. Quand on part,
le pas du chameau est vif et accéléré ; sur le
milieu du jour, il se ralentit, en raison de la
chaleur : le sable qui cède sous ses pieds retient
encore sa marche ; la nuit elle est plus
rapide. La manière de charger influe souvent
sur sa vitesse; enfin l’herbe qu’on rencontre
çà et là retarde aussi cet animal, parce qu’il
tâche, tout en cheminant, de saisir ee qui se
présente à manger. D’un autre côté, les chants
01 dinaires des Arabes soutiennent singulièrement
lu marche de cet animal, et beaucoup plus que
s’ils le frappaient. Une foule de considérations
de cette nature sont autant d’obstacles qui s’opposent
à une appréciation exacte des distances
par les journées de marche des caravanes.
Le commencement du voyage fut une leçon
pour nous. Les observations astronomiques
vinrent nous révéler nos erreurs d’évaluation,
et nous servirent de guide pour l’avenir. Je
me suis toutefois aperçu que les erreurs de directions
étaient ordinairement plus fortes que
celles de distançes. Je chargeai M. Letorzec de
ce travail, qui devint alors son occupation principale.
Il tint régulièrement un' journal de route
où il portait les heures de marche, les rumbs
de vents parcourus et observés à la boussole,
ainsi que. la déclinaison, toutes les fois que le
temps nous permettait d’observer 1 azimut; à
la fin de chaque jour, ou aussitôt que nous
étions arrêtés, il calculait la position de notre
point d’arrivée.
De mon côté, pour prévenir les erreurs, je
tenais également compte des distances et de|
directions, traçant la. configuration du pays,
d’après une échelle déterminée pour chaque
heure de chemin. M. Letorzec acquit bientôt
une grande pratique dans l’évaluation des distances
et des directions ; souvent elle ne présentait
que de légères différences, comparée aux
résultats de nos observations astronomiques. Je
faisais écrire, autant qu’il était possible, les noms
sur les lieux mêmes dans la langue du pays. J ’ose
croire que toutes ces précautions garantissent
l’exactitude de la partie géographique dè mon
voyage, et qu’elles donneront quelque confiance
dans les résultats que j’ai obtenus.