
 
        
         
		naux  du  Bahr-Yousef :  nous  sortîmes  difficilement  
 de ces terrains,  à cause des eaux de  la dernière  
 inondation  qui  les  couvraient  encore  et  
 nous arrêtaient à chaque moment. Les deux filles  
 aînées  du  chevkh Kouroum  vinrent  nous  con- J 
 duire  à une  demi-lieue  dans les  terres,  en  nous  
 souhaitant  toute  sorte  de  bénédictions  pour le  
 succès de  notre voyage.  Je  les  vis  ramasser  de  
 la  poussière  aux  places où  les  pieds  des Arabes  
 qui  nous  accompagnaient  avaient  laissé  leur  
 empreinte ;  elles  mettaient  cette  poussière dans  
 un  taqyeh, petit  bonnet  arabe  quelles  tenaient  
 à  la main.  Je m’informai à quelle intention elles  
 prenaient  cette  peine  :  011  me  dit  que  c’était  
 pour  nous  préserver  d’événemens  fâcheux  ;  
 qu’elles  devaient  en  ramasser  ainsi  sous  les pas  
 de  chaque homme et de  chaque  cbameifu;  que,  
 de  retour  à  leur  tente,  elles  feraient  un  petit  
 trou  au  fond  du  bonnet,  et le suspendraient  en  
 forme  de sablier;  que  chaque  jour elles y regarderaient  
 pour compter le temps de notre absence,  
 et  par-là  calculer  l’époque  de  notre  retour.  Je  
 leur donnai le bakhchych,  c’est-à-dire un cadeau,  
 et  les  quittai  en  les  remerciant  de  leurs  bons  
 souhaits. 
 Nous  gagnâmes à  l’ouest  du  désert,  qui  ne 
 nous présentait qu’une immense plaine de sable,  
 et  nous  continuâmes  notre route, marchant parfois  
 sur  les  terres  cultivées  et  rencontrant  de  
 petits  ruisseaux  qui arrosent le sol et désaltèrent  
 les  voyageurs.  Après  cinq  heures  de  marche,  
 nous  passâmes  sur  l’emplacement  d’un  ancien  
 village détruit, appelé Hellet-el-Garâh : de petits  
 - monticules,  formés de  décombres d habitations,  
 subsistent  encore.  Près  de  la  nous  nous  arrêtâmes, 
   pour  camper sous les murs del-Ghaïaq,  
 village  entouré  de  hautês  murailles,  situé  au 
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 bord  du  désert,  et  qui  se  rattache  au  Fayoum  
 par  un  bras  du  Bahr-Ycusef qui  vient  en  fertiliser  
 les  terres.  Plusieurs  Arabes,  voulant  profiter  
 de  la  sûreté  que  donnait  la  présenté  du  
 cheykh  Kouroum,  se  décidèrent  à  faire  avec  
 lui  le  voyage  .de  Syouah,  voyage  qu’ils  entreprennent  
 ordinairement une fois 1 an. Les Arabes  
 ;  partent du Fayoum emportant du blé et quelques  
 milâyeh;  ils les  échangent à Syouah  contre  des  
 dattes  qu’ils  vont  porter  à  Alexandrie.  Ceux-ci  
 étaient environ  cinquante,  avec cent chameaux.  
 Kouroum  me  dit  qu’il  en  serait  venu  un  plus  
 grand  nombre,  mais  qu’ayant  su  qu’ils devaient  
 faire  route  avec  m o i,  plusieurs  d’entre  eux  
 avaient  renoncé  à  ce  voyage  dans  la  crainte