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 partie  de  désert  est  appelée  A yn el-Agouz. Le  
 cheykh  Kouroum  et  Yousef  me  demandèrent  
 de les  laisser partir dans la nuit,  pour se  rendre  
 . à Syouah,  afin  d’avertir  les  cheykhs,  et de prévenir  
 par-ià le  trouble que pourrait occasionner  
 mon  arrivée  trop  précipitée.  J ’adhérai  à  cette  
 proposition.  La  vue  des  palmiers  de  Syouah,  
 dont  nous  étions  si  p rès,  me  fit  éprouver une  
 vive sensation, mêlée de joie et d’anxiété. Après  
 une  traversée  pénible,  me disais-je,  après  dix-  
 huit  jours  passés  dans  le  désert,  reviendrai-je  
 sur  mes  pas  sans  avoir  parcouru  cette  oasis  
 tant  desirëe?  ou  bien  serai-je  plus  heureux  
 que  mon  infortuné  compatriote ?  Ces  inquiétudes  
 m’occupèrent  une  partie  de  la  nuit.. 
 Le  10,  à sept heures un quart,  nous partîmes  
 en  suivant  fa  chaîne  de  montagnes  au  nord:  
 nous passâmes sur d’immenses terrains  couverts  
 de sel,  dont l’aspect  ressemble  à  celui  de terres  
 nouvellement  labourées. Après  trois  heures  de  
 marche,  nous  arrivâmes  aux  premiers  dattiers  
 dépendant  de  Syouah.  Les  Arabes  de  la  caravane  
 se réunirent en peloton  et se mirent à tirer  
 des  coups  de  fusil  pour  annoncer  notre  approche. 
   Je vis  venir à moi Yousef,  qui me criait 
 avec  transport  que  nous  avions  obtenu  lentree  
 de l’oasis  : ma  joie  fut  extrême. Nous passâmes  
 par  plusieurs  petits  chemins  ombragés  par  de  
 nombreux  palmiers.  Les  oliviers  ,  les  grena  
 diers,  les  pêchers  ,  les  abricotiers  et  les  figuiers  
 enrichissent  le  paysage.  La  fiaîcheur  
 y  est  entretenue par  des étangs  et  des  sources  
 abondantes;  des  ruisseaux  s’en  écoulent  de  
 toute  part.  Ces  campagnes  nous  parurent  
 délicieuses.  Le  bonheur  d’avoir  pu  pénétrer  
 dans  ce  canton,  enfoncé  dans  une  mer  de  
 sables,  à  cent  lieues  de  distance,  me  mit hors  
 de  moi  :  chaque  pas  me  rapprochait  de  ce  
 lieu  si  imparfaitement  connu,  et  peut-êtie  du  
 temple  de Jupiter Ammon,  si long-temps  cherché. 
   Ainsi  bercé  de  la  plus  douce  espérance,  
 j’arrivai  après  cinq  heures  de  marche.  Yousef  
 nous présenta  à trois  cheykhs;  nous  nous  donnâmes  
 la main  en  nous  souhaitant  le  bonjour  
 à  la  manière  du  pays.  On  nous  fit  camper  
 dans  une  cour  sous  les  murs  de  la  ville,  près  
 du  lieu  où  l’on  a  coutume  d’exposer  les  dattes  
 en  vente.'Le  dessus  de  la  ville, était  déjà  couvert  
 de  monde,  et  toutes  les  ouvertures  des  
 maisons  étaient  remplies  par  les  visages  des  
 femmes  que  piquait  la  curiosité.  Les  habitans