íes rues d’Alexandrie et ses populeux bazars.
A la vue du tableau sombre et monotone de
ces maisons où la clarté ne pénètre qu’à travers
des barreaux et des grillages, de ce triste
séjour où un mystère profond couvre íes misères
de ia servitude et les abus de la tyrannie ,
tableau si bien peint dans une page admirable
de Voiney, je ne p u s, quoiqu’il ne fût pas nouveau
pour moi, me défendre d’une certaine
émotion qui fut vivement partagée par mon
compagnon de voyage. Nous nous rendîmes
chez le consul générai de France, M. le
chevalier Drovetti, avec les lettres du ministre
des affaires étrangères. Je revis avec ia plus
grande joie le protecteur des Européens en
Egypte. Qu’il me soit permis d’exprimer ici le
sentiment de reconnaissance profonde qui lui
est dû pour les services qu’il n’a cessé de rendre
aux voyageurs français et à ceux de toutes les
nations, et pour cette générosité infatigable que
rien n’a pu rebuter, même ia noire ingratitude,
I injustice et les traits de 1 envie . Je vis aussi
M. Yousouf Boghos, ministre et premier inter-
* On déplorera toujours en France la perte de la grande collection
quil avait rassemblée pour orner nos musées, et qui a été,
pendant trois ans, à notre disposition pour !a moitié de sa valeur
réelle.
prête de Mohammed - Aiy pacha. Ce prince
voyageait alors dans l’Égypte supérieure^ craignant
de ne pas ïe voir de long-temps, je remis à
M. Boghos les lettres et les présens dont la bienveillance
particulière du ministre de 1 intérieur
m’avait chargé pour le vice-roi. M. Boghos me
donna des lettres pour le kiahya-bey, qui commandait
le Caire en l’absence du pacha, et il
m’assura de toute sa protection, qui m avait déjà
été si favorable dans mon premier voyage.
Je remis aussi au consul de France les letties
de recommandation du ministre des affaires
étrangères et de celui de O ‘ la marine ; le consul
m’en donna d’autres pour le Caire et la Haute-
Égypte. Comme je me proposais d’entreprendre
sur-le-champ un long voyage dans le désert
de Libye, je profitai sans retard de la première
barque qui se présenta, quoique chargée dA-
rabes, hommes, femmes et enfans, embarqués
pêle-mêle sans distinction de rang ni de qualités.
Cette confusion des passagers dans les barques
du Nil, est un spectacle fort curieux : là , le
voyageur vit avec les naturels*, il peut les étudier
à-peu-près comme en Europe on étudie,
dans les voitures publiques,»ses compagnons de
route.