ne pas les faire expirer de fatigue, nous devions
marcher à petites journées. Mon guide voulait
nous diriger par un autre chemin, qui jl partant
de Semneh, mène en ligne droite , à travers le
désert, jusqu’à la province de Sokkot, où l’on
arrive après un jour et demi de marche ; mais
je ne crus pas devoir m’arrêter à ce projet,
parce que j’avais besoin de suivre le Nil pour
en déterminer le cours. Mon guide tenait fortement
à son idée ; il soutenait que nous ne pourrions
jamais sortir des chemins que je me proposais
de suivre, qu’il disait d’ailleurs impraticables
pour les chameaux. Mais je savais le cas
que je devais faire des discours des Arabes,
q u i, pour s’épargner quelques fatigues , grossissent
les difficultés, et à qui le mensonge ne
coûte rien, quand ils peuvent en tirer avantage.
Je plains les voyageurs qui n’entendent aucunement
la langue du pays, car ils seront infailliblement
trompés par ces hommes, quand même
ils auraient un bon interprète, ce que l’on trouve
très-rarement. Pendant ce second voyage, le peu
que je savais d’arabe me fut d’une bien grande
utilité.
O’qmeh est le lieu le plus habité de ceux que
nous avions vus depuis Ouâdy-Halfah : la population
toutefois n’en est pas considérable; elle se
compose de quarante à cinquante personnes,
tant hommes que femmes et enfans : ils sont très-
laborieux. Ils ont cinq machines hydrauliques
pour arroser leurs terres. Ils 'récoltent de l’orge,
du dourah, du tourmous, des haricots, du pal-
ma-christi, dont ils expriment l’huile, un peu de
coton qu’ils filent et dont ils font de la toile pour
les chemises que portent les femmes, car les
hommes n’ont qu’une ceinture : ils possèdent
aussi quelques dattiers et des doums. Mais
quand, sur ces produits, les habitans ont payé
les droits, qui sont de douze piastres d’Espagne
pour chaque machine hydraulique, ils
ne peuvent plus que végéter misérablement
pendant le reste de l’année. Ils ont d’ailleurs
bien peu de besoins : leurs femmes usent
deux ou trois chemises par an ; les aliméns
sont toujours bornés à une nourriture grossière.
Ils ne connaissent d’autre jouissance que celle de
vivre en famille, d’éîever leurs enfans; leurs
moeurs et leurs habitudes patriarcales" les rendent
heureux à peu de frais.
Le 25 décembre, à cinq heures, nous nous
dirigeâmes vers le désert. On traverse encore
des sols primitifs de schiste dur, blanchâtre,
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