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 prendre laiatitude du iieu : eile est de 21° 53' 33",  
 et ia longitude, d e 28° 55'  30". Au  sud,  et tout  
 près  d Ouady-Halfah,  commence  ta  cataracte  
 de  ce nom ;  quelques  petites  îles de verdure et  
 de noirs  rochers  obstruent  déjà  le  fleuve sur ce  
 point. En quittant Ouâdy-Halfah,  nous entrions  
 dans Ouady-Hadjar,  ou  ia  vallée  des  pierres.  
 Le  19  décembre,  nous suivîmes  une route mon-  
 tueuse qui longe  le  Nil,  de manière que je pus  
 très-bien  voir  la  cataracte,  dont  nous  étions  
 toujours à tres-peu  de  distance.  Nous  passâmes  
 Fakou§ et Kenesab,  deux  petites  Iles  où  sont  
 quelques  dattiers. 
 Nous  aperçûmes  bientôt  les  rochers  de  ia  
 cataracte,  qui  forment  une  quantité  considérable  
 d îlots ;  ils  sont  la  plupart  très-élevés  au-  
 dessus du niveau du fleuve ; quelques-uns offrent  
 Faspect d’une belle végétation,  et sont en partie  
 couverts d’arbrisseaux et de jeunes acacias : Feau  
 précipitée par de forts courans serpente et bouif-  
 ionne entre ces écueifs,  et forme un bruissement  
 continue!.  La  couieur noire  des  rochers offrait  
 un  contraste  bien  tranché avec  ïa blancheur  de  
 l’écume  des  eaux,  les  sables  de  teinte  rouge,  
 et  ces  îles  de  verdure  qui paraissent  sortir  du 
 fleuve.  La  diversité  des  couleurs,  le  bruit  
 des  ondes  au  miiieu  d’un  profond  silence,  le  
 soleil  éclairant  une  perspective  lointaine,  et  
 dorant  ie fleuve  de  ses  rayons,  formaient  un  
 tableau  enchanteur,  une  scène imposante  dont  
 je  ne  pouvais  détacher mes  regards. 
 Toutefois  je  reconnus  combien  il  y  avait  
 d exagération  dans  les  récits des auteurs anciens  
 au  sujet  des  cataractes  du  Ni!  :  ces  écrivains  
 supposent  des  chutes  considérables ,  et  telles  
 que  les  habitans  qui  résident dans  les  environs  
 deviennent  sourds,  disent-ils, à  cause  du  bruit  
 épouvantable  des  eaux.  Je   ne  remarquai  rien  
 de  semblable,  quoique, à !a vérité,  ce bruit s’entende  
 de  très-ioin. 
 On avait toujours cru  que les barques ne pouvaient  
 penetrer  au-deia  de  cette  cataracte j  
 beaucoup  de  voyageurs  et  même  de  gens du  
 pays étaient dans cette persuasion. Mohammed-  
 Aly pacha,  déjà  fameux  pour  avoir  su  vaincre  
 tant  d obstacles ,  était  depuis  deux  mois  parvenu  
 à  surmonter  encore  celui-ci,  en  faisant  
 franchir ia cataracte  par environ  cent cinquante*  
 grandes  barques  chargées  de  vivres  pour  Far»  
 mée ;  de  pauvres Arabes,  à  force  de  bras  et  à  
 ! aide de cordes et de palans, tiraient les barques