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 monter  et  descendre ;  nos  chameaux  n en  pouvaient  
 plus;  après  dix  heures  de marche,  nous  
 campâmes  dans  les  sables. 
 Le  l . er  décembre,  nous  continuâmes  notre  
 route  dans le  désert,  tirant  toujours à  l’ouest ;  
 au  bout de  deux heures,  notre vue  s’étendit  au  
 loin  dans le  sud-ouest  sur  une immense vàllée,  
 d’où s’élèvent quelques petites montagnes éparses :  
 plus  loin  encore,  nous  apercevions les  cimes de  
 celles  de Derr,  sur  la partie  orientale du  Nil. A  
 onze heures .et demie, nous revîmes  ce fleuve  et  
 Derr,  village  principal des Barâbrah,  qu’on  regarde  
 comme  leur  capitale;  on trouve beaucoup  
 de dattiers dans ses environs. Nous descendîmes  
 près  du Nil,  et  nous  arrivâmes,  vers l’ouest,  à  
 Tomâs,  l’un  des  lieux  les  plus  considérables  
 du  pays;  nous  y  campâmes  à  midi,  après  
 avoir marché plus  de  cinq  heures. 
 Nos  chameaux  étaient  accablés  de fatigue ;  
 ils  avaient  tous  sur  le corps  des  tumeurs  occasionnées  
 par  la  pesanteur  de  leurs  charges :  
 je  dus  y  apporter  remède  ;  mon habir pratiqua  
 une opération  qui consiste  à brûler avec  un  fer  
 rouge  les  parties enflées.  Je  fus  surpris  de voir  
 airiver  un  habitant  du  pays qui,  apercevant  le  
 fer  rouge  que  mon  habir  appliquait  sur  mes 
 chameaux,  s’avança  vers  lui  en  boitant,  pour  
 le  prier  de  lui  administrer  le même  traitement  
 sur  une tumeur  qu’il  avait  à  la  cuisse;  service  
 que le habir lui rendit aussitôt. La brûlure du fer  
 rouge est un remède très-usité  chez  les Nubiens  
 et en Egypte :  pour  assurer  et accélérer la  guérison  
 d’une  plaie,  on  brûle  la  partie  malade  
 avec  de l’huile bouillante. Nous prîmes à  Tomâs  
 deux  jours  de  repos  :  nous  y  trouvâmes  l’occasion  
 d’acheter  un  mouton,  nourriture  assez  
 rare  dans  le  pays  :  depuis  que  nous  avions  
 quitté  Asouân,  nous  étions  absolument  privés  
 de viande; l’armée ayant tout  consommé sur son  
 passage.  Le  village  de  Tomâs est à 22° 44'  45"  
 de latitude nord, d’après deux hauteurs méridiennes, 
  et à 29° 52' de longitude ; il consiste en maisons  
 éparses,  comme les autres villages  du pays  
 des Barâbrah : il a environ une demi-lieue d’étendue.. 
  Chaque propriétaire a  élevé son  habitation  
 en face de  son  terrain,  ce  qui  offre  une  longue  
 ligne  de maisons ;  elles  sont ,  comme  à  D err,  
 d’une  formé pyramidale,  mais  beaucoup mieux  
 bâties que celles que nous avions vues jusqu’alors :  
 les  terres  cultivées  y  ont  plus  d’étendue ;  il  y  
 a beaucoup  de dattiers. On trouve  sur  le rocher  
 élevé  auquel  sont  adossées  les  maisons,  des