et d énormes pierres épars çà et là sur le sol. Je
reconnus le style égyptien. Est-ce là enfin, me
dis-je, le temple si fameux de Jupiter Ammon?
Je crus apercevoir des sculptures et des signes
d’écriture. Ces inscriptions attestaient-elles le passage
d’Alexandre? étaient-elles Fouvrage d’une
colonie égyptienne? ou bien ce temple remontait
il à une antiquité plus reculée ? Dans les
moindres indices, je cherchais les traces du vainqueur
de Darius; mais à force de tendre la vue
sur ce point éloigné, mes yeux se fatiguèrent :
Fimagination venait y ¿suppléer par des illusions ;
je souffrais sur-tout de l’impuissance où j’étais
réduit par un aveugle fanatisme ; j’appelais à mon
aide, par la pensée, la protection de FEurope
civilisée. Quand viendra le jour, m’écriai-je, où
les lumières étendront leur empire dans ces
contrées malheureuses, courbées sous le joug
de la superstition?
Le soleil était à l’horizon ; mes guides étaient
descendus : je les suivis, mais de loin; je ne
pouvais plus répondre aux questions qu’ils m’adressaient.
Je cherchai alors dans mon esprit
de quel stratagème je pourrais me servir afin de
visiter le temple. Je laissai tout passer, guides,
habitans, interprète, et je restai en arrière.
Songeant que je n’étais qu’à un quart de lieue de
ces ruines célèbres, l’idée me vint de tout braver
pour m’y rendre. Je m’approchai du bois de
palmiers, et je m’enveloppai dans mon bernouss ,
tout prêt à franchir seul l’espace qui me séparait
du temple : je fis quelques pas; maii?bientôt sui-
pris par les regards des espions de Syouah, je
revins à moi, et je reconnus toute I extravagance
de mon projet. Nous arrivâmes à notre tente, et
je me couchai plus fatigué que si j’eusse marché
tout le jour.
Le 15, je voulus retourner dans l’ouest de
Syouah, à Qasr-Roum, pour y achever mes
dessins; mais cette promenade me fut interdite.
Je retournai à la montagne d’eï-Moutà, puisque
j’en avais encore la permission ; ce fut de cette
montagne et de celle d’Abou-Beryk, que je pus
déterminer divers points nécessaires pour le plan
topographique que je me proposais de faire.
Le 17, les cheykhs se réunirent avec le
peuple, pour tenir conseil relativement à la dè-r
mande itérative que je faisais d’aller voir Omm-
Beydah : des habitans m’ayant vu la veille, avec
M. Letorzec, faire le tour d’un hameau, et
noter les détails de la topographie du lieu, vinrent
au milieu de Fassemblée, déclarer qu’ils nous