l’on faisait cuire sur un plateau de terre. A la
vérité, c’est la nourriture des Arabes ; mais les
Européens trouvent que ces galettes sont un
aliment mauvais et pesant; force était cependant
de s’y habituer : très-minces , elles étaient
un peu meilleures.-La plupart du temps, nous
vivions du produit de notre chasse, consistant
en perdrix grises ou en grossses tourterelles,
qui ne manquent pas dans ces lieux.
A l’ouest, notre vue s’étendait toujours sur
■d’immenses plaines ; de distance en distance, on
trouve de petits villages, arabes abandonnés. A
l’est, des bois d’acacias nous masquaient le Nil
et la belle île de Benneh. A midi et demi, nous
passâmes par le petit village de Ozaorat (ou
Zogarab); près de là finit l’île de Benneh, et
continue celle d’Argo. A une heure trois quarts,
nous arrivâmes à el-Mecyd el-Hadjar; nous y
trouvâmes la barque que nous cherchions, et
nous campâmes après trois heures et demie de
marche. Trois hauteurs méridiennes nous donnèrent
19° 18' 07" de latitude nord pour la position
d’el-Mecyd. J ’appris qu a peu de distance
était un magasin [ chouneh] de comestibles
pour farmée : le lendemain je m’y rendis avec
mon interprète, croyant y trouver du biscuit
ou de la farine. Nous n’en étions qu’à trois lieues;
nous les fîmes en moins de cinq quarts d’heure,
en courant sur d’immenses plaines s’étendant à
perte de vue dans l’ouest; Nous arrivâmes à
Marakah, aujourd’hui principal village du Dongolah
: il a été construit depuis peu d’années
par les Mamlouks ; c’est là qu ils faisaient leur
résidence, ayant abandonné le vieux Dongolah.
Nous descendîmes au dépôt de vivres; j’y
trouvai Kafis Effendy, qui en avait ïa direction.
Quelle fut mon chagrin en apprenant qu’il n’y
avait ni biscuit ni froment, et que le directeur
lui-même était réduit à manger du dourah!
encore ne pouvait-il me procurer un peu de
ce grain et de fèves sèches, sans un ordre
du mélik Toumbol, attendu qu’il devait lui-
même rejoindre l’armée. II fallut donc prendre
patience, et remettre au lendemain ma visite
au mélik Toumbol, qui habitait l’île de Benneh.
J ’eus beaucoup à me louer de l’accueil que
je reçus de Kafis Effendy : c’est un homme
instruit et qui a des manières affables. J e lui
fis beaucoup de questions sur la position de
l’armée, sur les événemens militaires qui avaient
eu lieu dans la province de Chaykyé : il me
cita des traits admirables du jeune prince
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