pour me faire entrer dans sa ville natale, méritait
bien une récompense : je lui donnai d’avance
quelque argent, ïui en promettant bien davantage
s’il réussissait. II me conseilla de me pourvoir
de quelques milâyeh, de souliers de Maroc
et de beaux tarbouch, pour fairejquelques présens
aux cheykhs. Je fis encore d’amples provisions
de tabac, café, petites glaces et verroteries de
Venise, pour les répandre dans le pays, et me
rendre un peu plus favorables ces hommes
ombrageux et défians.
Le 18 au soir, le cheykh Kouroum et Yousef
arrivèrent avec leurs chameaux pour nous
prendre et nous conduire au camp arabe : là
devait se faire la réunion de toute la caravane,
composée , me clit-il, au. moins de deux cents
chameaux. Le 19, nous allâmes ensemble voir
Korfosch-bey , gouverneur du Fayoum , pour
prendre,des firmans en arabe, dans la crainte
que les cheykhs de Syouah ne pussent pas lire
ceux que j’avais en turc, II me donna pour eux
une lettre en arabe très-satisfaisante, par laquelle
il leur expliquait le contenu de mes firmans
turcs ; lé bey leur disait : « Ce khaouadjah * est
* Négociant en grand; expression par laquelle on désigne aussi
une personne recommandable.
» envoyé par Mohammed-AIy pacha, qui vous dit
« que tout le bien que vous ferez à cet homme
« sera comme si vous le faisiez à lui-même. » A
une heure, nous montâmes des chameaux légers,
les vrais dromadaires étant rares chez les Arabes
du Gharb : tous nos bagages étaient chargés
sur six chameaux. Nous quittâmes Medynet-el
Fayoum, en marchant au sud-ouest . nous
prîmes la lisière des sables que nous suivîmes
durant deux lieues. A gauche de notre route
était le désert, parsemé de monticuïesile nature
calcaire et argileuse, en couches horizontales;
ad ro ite , les terres cultivées. Après six heures
de marche, nous arrivâmes au camp du cheykh
Kouroum, établi sur un territoire voisin du désert,
et encore en partie couvert des eaux de
la dernière inondation : nous avions le village
de Gambachy à une lieue au nord.
Je fis mettre notre tente auprès de celle du
cheykh. Aussitôt après nôtre arrivée, une de ses
femmes et ses filles vinrent nous souhaiter le
bonsoir et la bien-venue avec beaucoup d’affabilité.
Ces femmes bédouines diffèrent beaucoup
des autres femmes arabes : elles n’ont
point l’habitude de se couvrir la figure aussi
rigoureusement que le font celles des rives du