était frappée d’idées mélancoliques et lugubres :
j’avais de la lumière ; je me levai pour contempler
toutes les peintures qui décoraient ce tombeau.
J ’y vis des scènes familières, entre autres
une, pleine d’intérêt, représentant un homme,
une femme et leur jeune fille, se livrant aux occupations
de la pêche : le mari tirait les filets, la
femme et Fenfant se précipitaient pour y prendre
les poissons ; le ciel était d’un azur éclatant, les
bords du fleuve semés de fleurs ; tout retraçait
l’image du contentement et du bonheur. L ’artiste
avait voulu peindre sans doute un 4 es plus beaux
jours de cette famille.
Sur l’autre muraille, quel contraste ! On apercevait
les préparatifs d’un convoi funèbre et les
opérations de l’embaumement; plus loin, un
corps est déposé sur une barque, qui s’avance
vers le lieu sacré où le défunt va occuper le
réduit ténébreux qui lui est destiné ; les plus
proches parens , avec les mêmes figures de
femme et d’enfant qui assistaient à la pêche,
paraissent le suivre à sa dernière demeure. La
femme se livre au désespoir; la jeune fille arrose
de ses larmes les pieds du défunt ; la barque se
détache du rivage : les amis et une foule de personnes
y accourent; ils se couvrent la tête de
leurs mains, en signe de deuil, et s’abandonnent
à 1a douleur. Enfin le corps est transporté à ia
porte du tombeau même que j’habite. Je me
sentis vivement ému à l’aspect de ce tableau.
Cette même grotte sépulcrale, me disais-je, qui
■ fait aujourd’hui ma demeure, retentit autrefois
des gémissemens et des sanglots d’une épouse :
là même où je repose, la piété filiale baigna de
pleurs les pieds d’un père chéri. L ’aspect de ces
lieux ; faisait naître en moi les idées les plus
mélancoliques. Leloignement où j’étais de ma
famille et la crainte de ne pas la revoir ajoutaient
encore à ma tristesse.
En moins de cinq jours, trois chambres de ma
nouvelle maison furent élevées et couvertes: la
difficulté de trouver en cette saison des branches
^ de dattier, dont on se sert en Egypte pour former
le toit des maisons, me fit employer, en place, des
fragmens de caisses à momies ;, je me servais à
reg re t, pour un usage aussi vulgaire, de beaux
fragmens coloriés, couverts de caractères hiéroglyphiques,
dont les peintures bien conservées
auraient été recherchées en Europe;
mais ces: caisses sont si communes àThèbes ,
que les voyageurs s’en servent habituellement
pour y faire leur cuisine.