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 de  leurs  maisons,  des  fragmens  de  granit  et  
 d’autres pierres, avec des restes de caractères hiéroglyphiques  
 : mais cé  n’était point  là  ce  que  je  
 cherchais. J ’appris que l’ancien consul de France-  
 à Alexandrie  et  d’autres personnes  avaient  vainement  
 cherché cet intéressant morceau. Cependant  
 je  fis  annoncer  publiquement  le  dessein  
 qui  m’amenait  à  Menouf,  et  promis  une  récompense  
 à  celui qui m’aiderait à  découvrir cet  
 objet.  Un Copte  vint  me  trouver,  et  me  d i t ,  
 d’un  air  mystérieux,  qu’il  savait  où  était  la  
 pierre  que  je  cherchais;  il m’invita  à le suivre,  
 me  conduisit  dans  une  vaste  cour,  et  me .fit  
 avancer  sous  un  hangar  très-obscur.  Ma  vue,  
 troublée par  le  passage  subit  de  la lumière  aux  
 ténèbres,  ne me  permit  qu’après  quelques  ins-  
 tans  de  distinguer  les  objets  :  je  me  vis  avec  
 étonnement  au milieu  de  huit  Arabes  presque  
 nus  et  chargés  de  chaînes,  couchés par  terre  
 sur  des  lambeaux  de  nattes  de  paille  ;  c’était  
 la prison de ces malheureux. L ’obscurité du lieu,  
 l’aspect  de  ces  figures  pâles  et  décharnées,  
 rendaient  ce  spectacle encore  plus  triste. Mon  
 guide  me  fit  approcher  ;  et  me  montrant  
 un  gros  banc  [  mastabeh]   enfoncé  en  te rre , 
 où  étaient  appuyés  ces  Arabes  ,  il  me  dit :  
 « La  pierre  que  vous  cherchez  est  dans cette  
 maçonnerie  depuis  dix-huit  ans. »  Le  geôlier ,  
 aussi  étonné  de  ma  recherche  que  de  l’assertion  
 de  cet  homme,  craignait  qu’il  n’y  eût  là-  
 dessous quelque mystère,  et ne voulait pas  nous  
 permettre  de  démolir  le  banc.  Cependant  
 la  curiosité  et  l’appât du  gain  le  firent  céder  à  
 mes  sollicitations :  il  écarta  ses prisonniers. Un  
 Arabe,  donna  un  coup  de  pioche  et rencontra  
 une  pierre  qui  résistait;  je  reconnus  une  surface  
 unie  de  granit  noir  :  il  fallait  tourner  ce  
 bloc  pour  chercher  la  face  qui  devait  porter  
 l’inscription.  Le  geôlier  employa  à  ce  travail  
 les  prisonniers,  après  leur  avoir  ôté les fers,  en  
 leur  laissant  ceux  du cou qùi  les  tenaient  tous  
 les  huit  attachés  par  une  seule  chaîne.  Cette  
 pierre  fut  retournée  dans  tous  les  sens  :  après  
 l’avoir bien  examinée,  je n’y  trouvai plus  l’écriture  
 cursive, mais seulement huit à dix lignes de  
 caractères  grecs,  longues  d’un  mètre,  qui  paraissent  
 être  la  fin  de l’inscription.  J ’appris des  
 personnes  les  plus âgées du  pays,  qu’après  le  
 départ  de  l’armée  française,  ce  morceau  précieux  
 fut  charié  là  par  les  Arabes,  et  q u e,  
 dans  le  transport,  la pierre  se  sépara  en  deux 
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