
» troducleur de coudes les figures fymboliques qu’on montroic fuccëflîvement
» au Peuple durant l’année. Devenu D ie u , il en fut fait l’Inventèlir & l’Or-
« donateur. O r ces fêtes fe hommoient les Mânes, parce que les figures qu’on
» y prefentoic aux Amftans étant originairement deftinées à régler les travaux
» du Peuple, fe nommoienc les Mânes, c’eft-à-dire , les Re'glémens, les
» Signes , les Enfeignes. . . . Les Néoménies de chaque Saifen, & les
» fêtés qui prévenoient ou fuivoient chaque récolte ayant des noms propres
•> qui les diftinguoient, le nom général de Mânes, d’Ënfeignes ou d’images,
>> demeura aux affemblées funèbres, qui revenoierit fréquemment, & les
» noms de Mânes, d’images, de Simulacres & de Morts, fe confondirent.
Voilà d’où eft venu le nom de Mânes : voyons Comment & pourquoi il a
été donné aux Dieux dont il s’ag it, & ce que l’ori entendoit par lés D ieux
Mânes, & quels fecours, quels bons offices l’on prétendoit en tirfer. C ’eft
ce que le même Auteur nous a encore expliqué , ên traitant de cette partie
de la Divination, qu’on appelle Evocation. Nous allons le copier mot à mot,
dans l’efpérance qu’on nous permettra avec plaifîr de nous etendre plus que
de coutume fur un fujet aufli incéreffant.
» Il me refte ( dit M. Pluche, Hiftoirë du C ie l , Tome I. page 49*0 )
•> avchercher 1 origine d’un Art bien plus importânt que tous ceux qui pré-
» cèdent. C ’eft la Nécromanice , l’A rt d’évoquer les Morts, & de les faire
» parler. O n ne fera pas fâché de trouver ici la clef des Sciences occultes,
» ni de (avoir comment on s’y prenoit polir interroger 1 Enfer, & pour con-
» verfer avec les Démons. Ceci eft tout-à-fait curieux, C ’eft lè fin de la
» Magie.
” Le refpecft pour le corps de l’homtne, que l’on favoit être deftiné à un
« meilleur avenir, & a fortir un jout de la pouffière, pdrtoit les premiers
» Peuples a. enterrer lès Morts avec bienféance s & à joindre toujours à cétte
” trifte ceremonie, des fouhaits & des prières, qui étoient l’expreffion &
» la profeffion de leur attente. Les hommes dix commun étoient enterrés
» & pleures au moins par leurs familles. Les Villes entières venoient répandre
» des larmes fur le tombeau des grands Hommes qui s’étoient diftingués,
» ou par un gouvernement fage, ou par la chaffe donnée aux bêtès féroces,
» ou par quelque invention utile, ou par d’autres ferviees; L e lieu de la foffe
” etoit marque par une pierre qu’on y élevoit, fuivaiit l’ufage de défigner
” tous les endroits chéris ou illuftrés par quelque événement mémorable,
” en y erigeant une colonne, ou fimplemént uhe pierre qui attirât les yeux
“ par fa fituation. Les familles ou les Peuples efitierë , félon l’intérêt qu’on
» y pouvoir prendre, s’aflembloient auprès de ces pierres, apr& fannee ré-
” volue, faifoient des libations d’huile ou de vin fur la pierre, fderifioient
” & mangeaient en commun. Us cominençoient tous leurs facrifices par
” remercier D ie u , comme nous le faifbns encore, de leur avoir donne la
” v ie , & de multiplier tous les jours eri leur faveur la nourriture néceffaire.
» Ils le louoient enfuite de leur avoir donné des hommes utiles, & des
» exemples a fuivre ( pratique à laquelle nous fommes demeurés fidèles ) :
” °u bien ils glorifioient Dieu de ce qui faifoit l’objet particulier de chaque
” folemnite & du travail de chaque fâifon. Les affemblées funèbres étoienc
” les plus frequentes, parce qu’on mouroit tous les jours , & qu’on les renou-
» velloit dannee en année. Non-feulement elles étoient les plus ordinaires,
» mais en même temps les plus régulières, parce que la trifteffe qui en étoit
» infeparable, en banniffoit la licence qui défigura les autres fêtes, même
» avantl’introduôlion de l'Idolâtrie. O n commença à introduire dans celles-
.. » ci des embelliffemens arbitraires , & fur-tout des repréfentations propres à
; ” l’objet de la fête, occafion naturelle de bien des defordres. O n en a des
» exemples dans les fêtes d’Ofîr is , d’Ifis & de Saturne.
: » Tout étoic fimple dans les anciennes fêtes. O n s’affembloit fur un lieu
» . élevé- & remarquable. O n y faifoit une petite foffe , pour y confirmer
» par le feu les entrailles des vieil mes. On* faifoit couler le fang dans la même
». foffe. ;Une partie des chairs étoit préfentée âu Miniftre du facrifice. O n
*> faifoit cuire & on mangeoit le refte des chairs immolées, en s’affeyant au-
” près du foyer. Peu-à-peu, & fur-tout après l’introduction de l’Idolâtrie,
» on s éloigna de cette fîmplicité. Les fymboles qui y avoient donné naiffance
” frappant les yeux , ou par là beauté, ou par la flngularité de leur figure,
» . on prit goût aux décorations, & on y chercha de jour en jour de nouveaux
» rafinemens. A u lieu de s’affeoir fur l’herbe, on s’affit fur des peaux , fur
» des tapis & enfin fur des lits élevés, & magnifiquement couverts. A u
», lieu dun foyer creufe en terre, on eleva une table qu’on nomma autel,
» ou du moins un grand vafe pofé fur un magnifique fupport ( un trépied),
» pour recevoir le feu, & une partie de laviétime qu’on y jettdit avec une
» poignée .d’encens ; ce qui furmontoit la mauvaife odeur du fang & des
« graiffes brûlés. Chaque fête eut infenfiblement un cérémonial particulier,
» ' des repréfentations propres, un autel d'un cara&ère déterminé. Ce t autel
v etoit environné de feuillages, & les feuillages changèrent bientôt comme
» la forme des autels , ou Comme les feuillages ïïgnificatifs qu’on joignoit
» ..aux figures. Dans une telle fête, il .falloir un couronnement de. feuilles de
». chene; dans une autre, un tour de branches de myrte. L ’autel devoitêtre
» de pierre, ailleursde boi*, une autre fois de fimple gazon, ou d’un mon-
» ceau ;de terre couronné d’un cordon-d’herbes communes. Ce qui avoit été
» goûte, dans une. occafion importante, paffoit enfuite en ufage & en loi.
» Le nombre , les caractères, & les hiftoires des objets que les hommes
» prirent pour des D ieu x , donnèrent lieu enfuite à cent variétés qui parurent
» des rits fort importans, & des'précautions néceffaires. Q u i eût manqué à
» un feul point du cérémonial preferit, il n’y avoit pas moins que la pelle ou
» la famine a craindre. Quand les D ieux irrités n’envoyoient qu’une tempête
” P.anagere ou quelque bête furieufe, on étoit quitte de fa faute à bon mar-
” ' C le- Chaque fête ayant fon fervice & fes décorations propres, eut un nom
» particulier. Il n en fut pas de même, des affemblées mortuaires ; rien n’y
” changea. Elles, écoient fans joie & fans parures.éOn continua à y pratiquer
» ce qui s y etoit toujours fait. Les familles en enterrant leurs morts-, étoient
accoutumées a une rubrique commune, qui fe perpétua. C ’eft donc fur-
tout dans le facrifice fies funérailles qu’on peut retrouver le gros des ufages-
” la première Antiquité. O n continua à y faireiune foffe, à yf verfer du
» vin, de 1 huile ou du miel, ou du lait, ou d’autres liqueurs d! ufage ; à y
» faire couler enfuite le fang des viétimes, à en rôtir les chairs, & à les man-
” Ser enfemble, en saffeyant autour de la-foffè ou du foyer, & en s’entre-
» tenant des vertus de celui qu on regrettoit. Ces, affemblées continuèrent à
» porter 1 ancien nom qu on fionnoit à toutes les convocations folemnelles.
» Tandis que les autres fêtes, en.çonféquence de la diverfité des cérémonies
, nommoient Saturnales, Dionyfiaques, Faillies, ou autres, les
aüemblees moxtuaires fe nommèrent fîmplement les Mânes, c’eft-â-dire ,
». la convocation, ou le réglement. Les Mânes & les Morts devinrent auffi
v ij