
les Médailles, jl faut néceffairement donner une certaine étendue à ces deux
-objets, afin d’apprendre à les bien connoître. Pour entrer dans ce détail, nous
commencerons par les Types : cette matière eft allez vafte, pour nous conduire
jufqu’au Chapitre X I Ie. , qui commencera à traiter ce qui regarde les
légendes.
Les Types repréfentent beaucoup de fujets, prefquetous fort intéreffans, &
dignes de la plus noble curiofité. Tantôt ce font des Divinités avec leurs
habillemens, attributs, fymboles, Temples, Autels, Sacrifices, Fêtes, &
généralement tout ce qui a rapport au Culte ôc à la Religion des Anciens :
tantôt ce font des Rois, des Confuls, des Empereurs, des Princes, des
H é ro s , des Fondateurs, des Légiflateurs, des Reines, des Impératrices ;
des Hommes & des Femmes Illuftres par leur naiffance, leur rang, leurs
mérites, ou les grands événemens auxquels ces Perfonnages ont eu part. O n
remarque dans les Types jufquà leurs habits , les différentes marques de leurs
dignités & emplois, leurs coëffures, &c. Ici l’on voit le Ciel avec fes lignes ,
fes Étoiles , fes Planètes; là c’eft la Terre avec fes Parties, fes Empires, fes
Royaumes, fes Provinces, fes V ille s , fes édifices, fes eaux, fes plantes, fes
animaux, &c. Le temps & les faifons paroilfent aulli dans quelqu’uns de ces
Types ; dans d’autres ce font des batailles de terre & de mer, des victoires,
des trophées, des triomphes, & tout ce qui regarde le Militaire. Les jeu x ,
les courfes, les fpectacles & les chaffes y font rep'réfentés, Les alliances, les
confédérations, tes bienfaits, les récompenfes, les punitions mêmes & les dif-
graces y font dépeints. A peine pourroit-on rendre tout ce que ces refpeétables
Moriumens offrent à nos yeux. La matière eft fi abondante,, les Sujets font fi
variés, & ils nous fourniffent tant de lumières & d’inftruétions pour l’Hiftoire,
que l’agrément & l’utilité d’une pareille étude fe font fentir d’eux-mêmes.
Je n'entreprendrai pas de développer tous ces avantages avec affez d’etendue
pour qu’il ne refte rien à délirer; mais j’efpère ait moins que la précifion ne
dérobera rien d’effendel au Leéteur, & quelle ne l’empêchera pas de pouvoir
parvenir à la connoiffance des Médailles , objet de cet Ouvrage.
Je diviferai ce Chapitre en deux Articles ; dans le premier je traiterai des
Dieux de la première claffe ; dans le deuxième, de ceux de la fécondé. J’ai
cru devoir les réduire à deux ; on en fentirâ aifément les raifons dans la fuite.
Commençons par expofer quelques réfléxions fur la naiffance de ces Dieux
&t fur leur Culte en général ; cette connoiffance de la Mythologie eft abfo-
lument indifpenfable.
R é f l e x i o n s P r é l i m i n a i r e s
Sur l’Idolâtrie , fu r les fa u x D ieu x SC fu r toute la Mythologie.
Si la connoiffance de tout ce qui regarde l’Idolâtrie & les faux Dieux a été
autrefois fort néceffaire aux Pères de l’Eg life, l’on peut affurer qu'elle ne
l’eft pas moins à préfent à ceux qui font chargés de l’éducation de la Jeune
ffe , ou qui veulent faire du progrès dans les Sciences divines & humaines.
Sans cette connoiffance, les Apôtres & les Apologiftes de la Foi auroient-ils
pu montrer aux Païens tous les ridicules & toutes les horreurs qui accompa-
gnoient leurs Fêtes, leurs Myftères & leurs Sacrifices ? N e leur auroit-il
pas également été impolfible de réfuter & de confondre ceux des Philofophes
qui enétoient les Défenfeurs, & de travailler efficacement à établir la Religion
Chrétienne fur les ruines du Paganifme , comme l’ont fait plufieurs d’entre
eux dans leurs doétes écrits ?
Ceux des Éccléfiaftiques q u i, par état ou par vocation, font deftinés aux
Millions étrangères & a porter l’Evangile à ces Nations infortunées, qui font
encore enveloppées dans les ténèbres de l ’Idolâtrie &. livrées aux fuperftitions
les plus ridicules, fe trouveraient fouvent embaraffés, s’ils navoient au moins
quelque connoiffance de la Mythologie ancienne. Les Perfonnes chargées de
l’éducation de la Jeuueffe doivent également travailler à l’acquérir, pour la
développer & la communiquer à leurs Elèves, foit pqur orner leur efprit,
foit pour rendre 1 eurs le&ures plus aifées & plus utiles. Sans,cette connoiffance
combien de traits d’ignorance n’échaperont pas à un jeune homme dans les
compagnies qu’il frequente ?
Il faut encore faire fentir aux jeunes gens toute la folie du culte que nos
Pères ont rendu à ces faux Dieux ; fans cela il y aurait peut-être du danger à
leur préfenter les fentimens de refpedt & de vénération qu’ont eu pour ces
étranges Divinités des Peuples entiers, & parmi ces Peuples plufieurs perfonnages
diftingués par leur Science & leur fageffe. La gloire dont ces Dieux ont
brillé, la puiffance, les merveilles qu’on leur a fuppofées dans les États*où ils
ont été adores', pourraient devenir pour eux un écueil funefte ; ils pourraient
être tentés de leur prêter une réalité, qu’ils n’ont jamais eue ; s’ils n’en
faifoient pas des Dieux véritables, ils feroient au moins tentés d’en faire des
Héros, qui, par rapport aux belles & grandes aftions que leur attribue une
aveugle Antiquité, leur paraîtraient mériter encore quelque eftime, & même
quelque admiration.
On ne réalife déjà que trop ces fauffes Divinités dans le langage du monde ;
c’eft d’après cette fauffe idée qu’on croit faire honneur à un Guerrier & à un
Général, en les comparant à Hercules, à Ma rs, à Jupiter même?. En partant
de la meme erreur , imagine-t-on pouvoir flatter plus agréablement & plus;
fenfiblement une femme, qu’en la comparant aux Mufes, aux Grâces, à
.Vénus ?
Mais en travaillant ainfi à re&ifier les idées de la jeune N obleffe, combien
d’autres motifs pour la porter à l’étude & à la connoiffance de la Mythologie ?
Sans cette connoiffance il ferait très-difficile , pour ne pas dire impoffible,
de bien entendre les Poètes & les Philofophes ; on ne faura qu’imparfaite-
ment l’Hiftoire ancienne ; enfin on laiffera échapper ce qu’il y a de plus
piquant & de plus agréable dans les Tableaux, les Statues, les Monumens
& autres produirions de l’a rt, foit antiques, foit modernes, foit l’Allégorie,
ou la Mythologie fe trouve fi fouvent employée.
Pour prévenir le premier de ces inconvéniens, capable de corrompre l’efprit,
il n y a rien de plus efficace que de montrer aujourd’hui que toutes les prétendues
Divinités, auxquelles la Fable & l’A rt Numifmatique ont fait tant
d honneur, n’ont jamais eu d’autre réalité que les égaremens de, l’imagination,
1 ignorance, les paffions & le vil intérêt de leurs Adorateurs. Si quelque chofe
eft capable d’humilier l'efprit humain, c’eft fans doute de lui montrer que,
pendant plufieurs fiècles, nos Pères ont pouffé l’aveuglement jufqu’au ppint
de rendre des honneurs Divins à des Créatures créés pour leurs propres ujdges,
& de chercher jufques dans des Êtres inanimés, dans les animaux les plus
greffiers', dans les vices mêmes & les paffions dont on ne peut aujourd’hui
s empecher de rougir, quelque chofe qui fut plus digne de leprs hommages
de leur amour, Sc de leur confiance que l ’Être fuprême.