
12.3. INTR. A LA SCIENCE DES MÉDAILLÉS. C hap. V.
S e c t i o n L I I I.
D e Vulcain SC des Cyclopes , félon l ’Ecriture Hieroglyfique.
Vulcain , félon M. Pluche, n eft ni Tubalcain, comme certains Auteurs
l’ont avancé, ni aucun homme qui ait vécu fur la terre ; c’eft un mot coru-
pofé de deux autres, qui lignifient l’ouvrage diligenté, Woll ( opus ) cari
(maturatum)A\ eft encore connu fdus deux autres norhs, dont la lignification
a beaucoup de rapport à cellb de . Volcan. Ces noms fôritHephaifos , qui
lignifie le Pire du Feu, & Afultiber, qui veut dire- lé Gouvernement des
Forges. Tout cela nous annonce une-figuré fymboli'que éxpofee aux jeux
du Peuple, pour faire connoître la tempf auquel bn tràvailloit plus particulièrement
aux ouvrages pour lefquels on emploie le fer , le feu , les tenailles,
le marteau & la diligence; c’eft-a-dire là promptitude. -
En effet, comme le petit Horus étoit la troifième clef de l’Ecriture Hiéroglyfique,
& que fa figuré annoncoit toujours-lê travail, de quelque bfpèce
qu’il fû t, lorfqu’on l’expofoit & qu’on le faifoit fervir d’Enfeigne fÿmbolique,
on imagina un moyen facile pour lui faire lignifier , pendant l’année , tous
les différera, travaux qui convenoient à chaque faifon , & à chaque claffe de
métier. C e moyen confiftoit à le faire changer d’attributs, d’ornemens, ou
d’inftrumens & de noms. A in fi, lorfqu’on vouloit lui faite annoncer aux Laboureurs
le repos de l’Hiver & la paix qui devoir régner dans les familles |
on l ’appélloit Hàrpocrate , nom qui' fignifit la Policé, l ’ordre de 4à Société
ou des Villes ; ou bien Morphée , qui fignifie le rétaMïjfèrkerit des forces.
Alors on lui mettoitr-en main quelques têtes de Pavots, dont on exprime
YOpium , liqueur affoupiffante qui aide à calmer lé faiig & à- procurer lè
fommeil, moyens propres à réparer les forces perdues pendant le cours des
travaux de l’Été. Quand on croyoit devoir inviter les forts & les vaillans à
la chaffe contre des brigands ou des bêtes féroces, on le nommoit Hercule ,
qui fignifie la marche des jeunes gens , ou Mélicerte, qui Veut dire la dé-
fenfe des Villes ; alors on le faifoit paraître arme de la ta-affiie. D e même,
s’il s’agiffoit d’annoncer le commencement & la duree dé certains ouvrages
de fer , ou de quelqu’autre métal, ou bien les Fêtes particulières aux Forgerons
, ou la vente des outils de fer propres aux ouvrages de chaque faifon,
on repréfentoit l’H orus, figure de f Écriture Hiérbglyfiquê, avec un bonnet,
des tenailles & un marteau de Forgeron ; alors on changèbit fon nom propre
d’H orus, en celui de Vulcain, pour exprimer fes fohétions. • Comme on
plaçoit ordinairement l’Horus , tel qu’il fu t , près d’Ifis ( je dis S Ifs-Vénus),
on s’imagina que cette Déefle étoit fa femme : l’adultère prétendu de Mars
avec Vénus n’eft même Venu que du déplacement de Vuletin , ou plutôt
de fon changement d’habit, d’attributs & de forme ; car s’il fallait inviter leS
jeunes gens à la guerre contre les ennemis dè l ’État-, on faifoit paraître YHorus
fous Tidee de -Mars •, armé & prêt à entrer en càmpàgnè : il pfehoi-t alors
la place de Y Horus Vtlcaïn près S I fis ou de la belle- Vertus.
Telle eft 1' origine de Vulcain. Dès que l’on a fait dé la figure, cfui annon-
çoit les ouvrages de fe r, un Dieu qui préfidoit aux Forges & aux travaux des
Forgerons , il ne faut pas chercher la naiffance des Cyclopes ailleurs que fous
1 fon enclume : on les inventa , par une conféquence nécelfaire, pour lui former
un Empire & une Cour qui l’aidât à foutenir les fatigues du métier.
D E S T Y P E S D E S M É D A I L L E S . z r9
D e Vulcain ÔC des Cyclopes, felon l ’Hifloire, la Fable SC la Numifmatique.
O n aurait delà peine a trouver une Divinité que l’on n’ait pas multipliée
fuivant les circonftances & fuivant les différentes fonétions dont on vouloit
là changera: on en a fait voir plufieurs qui, non-contentes de fe reproduire
fous le même nom, en empruntoient fouvent plufieiirs autres. Vulcain eft
du nombre de ces Dieroç qui reparoifloient de différentes façons. Cic éron
en reconnoît p l-ufieurs l’un d’eüx , fuivànt cet Orateur célèbre, fut fils
du Ciel ; un autre fils du N i l ; un troifième , fils de Jupiter & de Junon ;
un quatrième enfin fils de Moenalius. O n pourrait en'ajouterun cinquième,
que la Fable dit avoir été conçu & enfanté de Junon feule. Les Grecs lui
donnèrent le nom de Hepfiaiflos : on y ajouta celui de Mulciber ou de Mul-
cifer, pout lignifier quelqu’un qui étoit Feu , ou qui fe fervoit du feu pour
•amollir le fer. C ’eft par cetté raifon qu’on prend réciproquement Vulcain
pouf le Feu; & le Feu pour Vulcain ; c’eft aüffi delà qu’eft venu le nom de
Volc-aes aux Feux que vomiffent quelques montagnes.
Le Vulcain , dont il s’agit ici & dans 'le Numifmatique , femble être
•cékù nui paffa pour le Feu , & que la Fable fuppofe avoir été misdü monde
•par Junon prife pour la Terre, parce que la Terre produit & vomit eu effet
beaucoup de feux;& de volcans. C ’eft ce Vulcain qui parut fi difforme à fa
naiffance, que Jupiter d’un coup de pied le jetta hors du Ciel ; il tombai
ftit-ori, dans fille de Lbmnos, ou il-établit d’abord fes forges j, qui ltransférà
énfüite a Lyparos, Ifle principale des Eolies, & enfin dans le mont Etna.
O n ajoute qu’en tombant il fe caffa une jambe , & que cet accident le rendit
boiteux ; mais on préfume qu’il fut toujours tepréfenté avec ce défaut, polir
apprendre que la terre , le fer & le feu fe prêtent un fecours. mutuel & fî
nécelfaire, que l’un fans l’autre ne produit rien que d’imparfait ou d’inutile,
du moins pour l’ordinaire ; car c’eft la Terre qui produit le fer : on fè fert
du feu pour fondre & pour travailler le fer ; & f on emploie le fer travaillé
au feu pour cultiver la tertre & fertilifer les campagnes.
Vulcain avec fes Cyclopes furent occupés a forger les armes du Dieu
Mars, & les foudres de Jupiter. C e dernier, par reconnoiflance , lui donna
Vénus pour femme. Les Dieux'la lui envièrent, & cette jaloufië fournit
la matière d’une infinité d’Hiftoires plus ridicules les unes que lès autres.
Sur les Médailles, V ulcain eft repréfenté, à la face, par une tête de .vieillard
, ou par celle, d’un jeune homme fans barbe. Cette tête eft couverte d’un
bonnet de Forgeron, couronné de laurier, & d’une efpèce de calotte, ou d un
bonnet applati, fans couronne : derrière cette tête il y a un marteau ou des
tenailles. C ’eft ainfi qu’on le trouve fur les Médailles de la famille A u rélia.
A u revers des Médailles, ce Dieu paraît forger un cafque , un bouclier,
ou d’autres armes ; quelquefois on le trouve affis, & fouvent débout : Minerve
fe trouve fur quelques-unes de ces Monnoies, & Vulcaintravaille en
fa préfence, fur une Médaille frappée par les Thyatiriens. Ses Compagnons,
les Cyclopes, font repréfentés, fur certaines pièces des Colonies, le marteau
& les tenailles à la main : ils y font ordinairement fans bonnet, & avec ,un
habillement auffi court que celui de leur Maître ; il leur defcend a peine juf-
qu’aux genoux.
. O n trouve Vulcain de quatre façons, à la planche X I '- n°!' 18. 19. 20..