
confias parles Médailles. Cette notion luffira pour parvenir au but que nous
nous propofons, qui eft de donner à nos Leéfeurs la connoiflance des Me
dailjés , & par-là cèlle des Dieux & de la Religion des Anciens : la fécondé,
c eft que nous feront forcés de répéter quelquefois les mêmes titres & les
mêmes ïiorris' ; mais on reconnoîtra aifément que dans la matière que nous
traitons , ces répétitions font comme inévitables auffi bien que certaines
contrariétés apparentés, parce qu’en fuivant toujours les mêmes, principes , il
faut lés rappëllèr fans celle : d’ailleurs il s’agit d’une faulfe Théologie, dont
lès differentes parties font fou vent contraires les unes aux autres. La troifîème
chofe à obfèrver, c’eft que plufieurs habiles Auteurs ont penfé différemment
de l’origine , de l’exiftence, & des aérions de tous ces Dieux. O n peut néanmoins
réduire leurs opinions à deux principales : ceux qui tiennent la prei
mière , qui eft la plus fuivie , prétendent que tous ces D ieu x , ou du moins
la plupart, ont exifté réellement, qu’ils ont été des Héros, des Rois ou des
Reines, des hommes ou des femmes qui ont eu-la même origine que les autres
hommes, qui ont v é cu, engendré, ag i, fait des guerres & des conquêtes ,
& c , avouant néanmoins que leur Hiftoire véritable a été altérée & déguifée
par un grand nombre de faits & d’événemens , plus fabuleux encoîe que
merveilleux, que lui ont prêté les Poëtes & les Philofophes Païens : ceux
qui embraflent la fécondé de ces opinions , croient que toutes ces feulfes D i vinités
ont pris leurs origines, leurs noms, leurs formes primitives-, leurs
fondrions , leurs attributs , leurs fymboles dans des lignes, des caraétères
tracés, gravés ou peints, dans les lettres de l’Écriture Hiéroglyfique invèntée
par les premiers Aftronomes de l’Égypte. Cetre opinion, qui eft celle de M.
Pluche, anéantit, par conféquent, & regarde comme de pures fables & des
fictions ridicules tout ce que les Poëtes & les PhilofopÜes ont dit des Théogonies
, ou de l’origine des guerres, des combats, des victoires, du pouvoir,
des aétions, des merveilles , des myftères & des prodiges de tous ces Dieux.
Les premiers trouvent l’Hiftoire & la fable, & les féconds ne voient que de
pures fables dans ce que les Anciens ont écrit fur cette matière. La première
de ces opinions a I avantage d’être la plus ancienne, & d’avoir été fuivie par
plufieurs Mythologues & Auteurs d’un grand mérite & d’un grand poids ; la
féconde eft toute nouvelle ; mais elle paroit toute naturelle & toute fimple :
elle donne raifon de tout : toujours appuyée fur le principe qu elle établit ,
rien ne paraît l’embarafîèr quand il s’agit d’éclaircir, de lever les difficultés &
de répondre aux objections.
Comme le choix eft libre en pareilles matières, chacun peut fe décider
pour celui des deux fentimens qu’il jugera le meilleur; c’eft auffi pour mettre
nos Leéteurs en état d’ufer de cette liberté, qu‘e nous montrerons d’abord
fur chacune des Divinités, dont nous allons parler, ce que M. Pluche a penfé,
avant de rapporter ce que l’Hiftoire & la fable en ont dit, quand l ’unè& fautrè
en ont parle ; enfin nous ferons voir les Divinités, dont nous aurons occafion
de traiter, telles quek'Numifmatique les a repréfentées. Ainfi prefque routés
les Seétions de ce Chapitre auront quatre parties, dont la première montrera
îa Divinité dont il fera queftion, félon l’Ecriture Hiéroglyfique ; la fécondé
la donnera, félon 1 Hiftoire ; la troifîème, félon la fable ; la quatrième enfin la
prefentera telfo qu elle eft fur les Médailles. Mais avant que d’entrer dans ce
détail, il eft^neceflàire de faire corinoître deux fyftêmes fur l’origine des faux
Dieux en general. Nous 'emprunterons le plan du premier de M . Rollin
& celui du fécond de M. Pludhe.
P remier.
D E S T Y P E S D E S M É D A I L L E S . 85»
P remier S ystème , fu r l’Origine des fa u x Dieux.
M. Rollin nous a donné ce Syftême-( dans fon Traité des Études, Liv. IV.
partie I V e. Article premier, page ZJ4 du Tome IV . ) , avec fon éloquence
ordinaire, en traitant de l ’Origine de la Fable. Comme fon but étoit d’édifier
la Jeuneflè en l’inftruifant, nous ne pouvons mieux faire que de le copier
dans un Ouvrage, ou nous nous propofons les mêmes fins.
» La Fable , d it, ce favant Écrivain, qui eft un mélange & un compofé
» de faits réels & de menfonges embellis & ornés, eft née de la vérité c’eft-
» à-dire de l’Hiftoire tant facrée que profane, dont plufieurs événemens
» ont été altérés en différentes manières, & en différens temps, foit par les
» opinions populaires , foit par les Sérions Poétiques.
» Je dis que la Fable eft née en partie de î’Hiftoire Sainte ; & c’eft là fa
» première & principale Origine. L a Famille de Noé inftruite parfaitement
» de là Religion, par ce Saint Patriarche, conferva quelque temps le culte
» du vrai Dieu dans toute fa pureté. Mais lorfqu’après avoir entrepris inuti-
.. lement la conftruétion de la Tour de Babel, elle/fe fut féparée, & quelle
» fe répandît en différentes Contrées , la diverfîté de langage & de demeure
» fut bientôt fuivie de l’altération du culte. La vérité, qui jufques-là n’avoit
« été confiée qu’au canal feul de la vive voix fujet à mille variations, &
” qui n’étoit point encore fixée par l’Écriture gardienne fûre des faits, la
» vérité, dis-jç, s’obfcurcit par un nombre infini de Fables, dont les der-
» ni'ères augmentèrent beaucoup les ténèbres que les plus anciennes y avoient
» déjà répandues,
. « La tradition des grands principes & destgrands événemens fe 'conferva
” parmi tous les Peuples, non fans quelque mélange de défions ; mais avec
s> des traces de vérité évidentes & tour-à-fait reconnoiffables ; preuve certaine
« que ces Peuples étoient tous fortis de la même origine.
»> D e là cefentiment répandu chez tous les Peuples, d’un Dieu Souverain,
» Tout-Puiffant, Maître & Créateur de l’Univers; & , ce qui en eft une
» fuite, de la néceffité d’un culte extérieur, par des Cérémonies, & des
» Sacrifices. De-là le confentement uniforme 8c général fur certains faits
»> la création de l’homme par les mains de Dieu même ; fon état de bonheur
*» & d’innocence, marque par le fiècle d’o r , où la Terre, fans être arrofée
» de fes fueurs, ni cultivée par un pénible travail, lui fourniffoit tout en
» abondance ; la chûte du même homme, fource de tous fes malheurs1',
M fuivie d’un déluge de crimes qui attira celui des eaux ; le genre humain
» faùvé par une arche qui s’arrêta fur une morïtaghe ; & enfuite la propaga-
" tion du genre humain par un feul homme 8c par fes trois fils.'
** Mais le detail des aétions particulières étant moins important, & par
» cette raifon moins connu, fut bientôt altéré par des Fables & des fiérions,1
v comme on le voit clairement dans la famille de Noé. Comme il fut père
» de trois enfans, & que les Peuples qui en étoient defcendus fe répandirent
” apres le deluge dans les trois différentes parties de la Terre, cette Hiftoire
v a donne lieu a la Fable de Saturne, dont les enfans, fi on en croit les
" Poëtes , partagèrent entre eux l’Empire du M o n d e .
■ -» Chatn eft le même qu’Ammon, c’eft-à-dire Jupiter. Japhet, connu
fous ce nom par les Poëtes, fut auffi adoré fous celui de Neptune, parce
y que les Pays maritimes lui échurent. La poftérité de Sem, plus réligieufe
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