
mot d’O fir is , qui déterminoit b lignification du Symbole , devint le nom
propre de ce Dieu cjui fut redevable, comme les autres, de fa réalité à une
imagination dérangée, & fa Divinité, comme fa Royauté, à une ignorance
hontenfe.
Venons à préfent à Ifis , & commençons par dire que fon droit à b D ivinité
ne fut pas mieux fondé que celui d OJiris, fon prétendu Mari. Elle
fut originairement , comme lu i, une figure & une lettre de l’Ecriture Hié-
roglyfique, dont b forme , les habits, les ornemens & les fymboles furent
variés félon les idées & les befoins de çenx qui étoient charges d’inftruire
les Peuples de ce qu’ils avoient à craindre , a efpérer, ou à faire. Quand
Ifis eut rendu quelque temps des fervices importans en qualité d’Enfeigne
ou d’Affiche fymbolique & (nllruètive , on b perfonnifia, & on en fit une
Divinité. Voici comment çeb fe ht.
* Les Fêtes dç Religion faifpient une efpeçe de règle pour les affaires civile?
, parmi ies;Egyptîçns. C ’çft pourquoi fis -voulurent faire fervir les mêmes
figures à l’annonce des unes & des autres ; c’e ft-à -dire à ce qui regardoi;
l’Année Eccléfiaftique & l'Année Civile en même-temps. O r , à chaque
Néoménie , à chaque Phafe de 1a Lune , il y avoir des Fêtes : les différentes
Lunes avoient aufh leurs productions, leurs effets & leurs influences, félon ces
Peuples: toutes ces vaines pbfervations exigeoient une nouvelle attention, une
nouvelle façon d agir & de fe conduire. C ’eft de quoi il étqit néceffaire d’inftruire
les Peuples, & cela par les Affiches chargées des figures de l’Ecriture facrée ou
Hiéroglyfiquo. L a figure principale que fon choifit à cet effet, fut celle d’une
femme, par b raifon que nous avons rapportée plus haut ; c’cft-à-dire, parce
que b femme parut très-propre à devenir le Symbole de 1a T erre, qui produit
tout, & qui, félon les Egyptiens, hâte ou retarde fes productions >a proportion
que la Lune lui refufe ou lui accorde fes influences.
Dès que l’on eut trouve que cette figure de femme étoit propre à fervir
de bafe à tout ce que l’on vouloit arborer aux yeux du Peuple , fur les Affiches
, pour l’inftruire -, on ne fut plus en peine du refte : il n’y eut plus qu a
donner à cette figure des parures , dont le nombre & 1a variété fi fort du goût
général du fexe , pouvoient fervir â toutes fortes d’inftruétions. Ainfi on lui
donna une couronne tourrelée, c’eft-à-dire compofée de plufieurs tours,
pour montrer que b T e r r e , dont elle etoit le Symbole , porte fur fa face
îçs Villes & les maifons qui fervent de retraite aux hommes. O n l’habilla &
on l’orna de diverfes bandelettes & fourrures, pour apprendre que c’eft d’elle
qu’pn tient tout ce qui fert à l’habillement, puifqn’elle nourrit les animaux
qui fourniffent les matières propres à leur fabrique : aufli repréfenta-t-on cette
figure couverte & environnée de plufieurs animaux. D ’autres fois on 1a montrait
toute couverte de mamelles ; c’etoit pour annoncer les moiffons abondantes
quelle promettoit, & dont on efpéroit quelle ferait chargée quand
les eaux du débordement du N il étoient montées à une hauteur fuffifante.
Mais fi le contraire étoit arrivé ; fi les eaux n’avoient point amené avec elles
&i biffé fur les terres, en fe retirant, un limon affez abondant pour l’engrais
des terres, on ne donnoit alors qu’une feule mamelle à Ifis ; & par-la on
avertiffoit un chacun de prendre des mefures contre b médiocrité de la, récolte
fuivante. Quant à b couleur blanche des habits de 1a figure, elle fignifioit
que 1a Fête, ou 1a chofe que l’on pronoftiquoit ou que l’on annonçoit, arriverait
ou ferait célébrée de jour ; mais lorfque b couleur étpit noire, b
Fête était pour b nuit. M. Pluche penfe que le trône qu’on lui voit quelflUef°
js fur 1a tête, fignifie l’A ufôre , ou Un facrifice du matin, lorfqu’il paraît
' Vuide & tourné en-devant, fans feeptre & fans bonnet déifias, & que ce même
trône annonce le facrifice pour le Crépufcule du foir , quand il eft tourné
*er$ le derrière de b tête. O n lui mettoit une faucille â b main, pour annoncer
l’approche des moiffons ; une coëffure avec des cornes de Belier, de Taureau
QU de Chevreau, pour pronoftiquer celle duPïintemps & de fes parties ;
une tête fie Geniffe, avec le petit Horus fur fes genoux , pour figne de b fin
fie cette faifon, & la célébration prochaine des Fêtes que l’on avoit coutume
de faire en aérions de grâces, pour les bonnes récoltes qui étoient le fruit
du travail défigné par le petit Haras. A u lieu de tout cela, on donnoit à Ifis
une tête d’Épervier, pour figne du retour du vent Etéfien ; celle d’un Ibis,
pour celui d’un'autre vent j une Ecréviffe ou un Cancer marin fur fa tête, pour
ççlui de l’entrée du Soleil dans le Cancer ou le Capricorne ; une fleur de
Lotus, des feuilles de Bananier, des cornets de Colocafie, des poires ou une
poire du Perféa, les ailes de 1aPoule deNumidie, de 1a Huppe, pour figni-
ner ou l’abondance de différens fruits, ou les vents, ou les fîte s , ou les travaux
des diverfes Saifons, ou toute autre chofe qu’il étoit important au Peuple
de favori : lesPhafes de 1a Lune au-deffus de fa tête invitoient aux affemblées
de coutume dans ces temps. C ’eft ainfi que l’Ifis fervoit aux annonces de tout
çe qui regardoit la Religion & b Police. Tous ces différens ornemens, attributs
& fymboles faifoient, par rapport aux Egyptiens, ce que font les figures
d’un Almanach pour ceux qui en connoiffent 1a lignification.
Outre les fymboles que l’on expofoit au Peuple , pour lui apprendre &
annoncer tout ce qui concernoit l’Année Solaire, l’Année Ecclefiaftique &
l’Année C iv ile , on crut encore devoir lui en repréfenter qui lui enfeignaffent
ce qui avoit du rapport à l’Année Ruftique ; c’eft-a-dire, à l’ordre & au
réglement des travaux différens de b campagne ; c’eft ce que nous apprend M .
» P lu c h e , dansleI"Tome de fon Hift. du Ciel, p. 81. » Comme l’induftrie &
*> le travail de l’homme, & fur-tout le labourage, ne peuvent rien produire
j? de bon fans le concours d’Ofiris (le Soleil) & d’Ifis ( b Terre ) , dit-il,
v après avoir marqué le Soleil fous la figure d’un homme , d’un Gouver-
» neur, & celle de b Terre fous celle d’une femme , d’une mère féconde,
» les Prêtres Egyptiens défignèrent le travail par b figure d un enfant, qu O-
» firis & Ifis affeétionnent, d’un fils bien-aimé qu’ils fe plaifènt à combler
m de biens. Enfuite par les différentes formes qu’ils faifoient prendre à cet
» enfant, tantôt en le peignant comme un homme fait, ou bien en lui don-
» nant les ailes de certains vents, les cornes des animaux céleftes, une maffue,
» q u une flèche, & telles autres parures ou inftrumens fignificatifs , ils ex-
» primoient ingénieufement 1a conduire, les opérations fucceffives, les
» traverfes & les fuccès du labourage.
>> Ils donnoient à cet enfant le nom d’Horès ou d’Horos, qui, apparem-
» ment en Egyptien, comme en Hébreu, en Phénicien & en Arabe, figni-
» fioit également le Laboureur & l’Arcifan, le labourage & l’induftrie , en
» un m o t, le travail. Ils en abrégeoient fouvent le Symbole, par b fimple
» peinture d’une tête humaine, figne naturel de l’intelligence ; & pour
» montrer l’importance du travail qui nous procure le fecours de 1a vie, ils
» uniffoient cette tête à 1a figure d’un ferpent, qui eft le caractère de 1a vie ;
» ou bien ils mettoient enfembie les deux figures entières, le ferpent fym-
» bolique & l’enfant chéri du Soleil & de 1a Terre. Souvent, pour montrer