
Les biens & les honneurs dont il jouiffoit étoient fort confidérables • ce
qui faifoit que dans les repas des Souverains Pontifes on voyoit régner une
profufion de tout ce qu’il y avôit de plus rare & de plus cher. Ils étoient tou.
jours précédés d’un ou de deux Licteurs.
Le Souverain Pontife fut d’abord tiré dés Collèges des autres Pontifes •
il étoit choilî & créé par les Tribus, dans les Comices. O n le prit même
pendant quelque temps, dans les familles Patriciennes ; mais les Honneurs
& les Privilèges des Patriciens étant devenus dans la fuite communs aux Plébéiens
, ces derniers voulurent aulli avoir part au Souverain Pontificat. T.
Caruncanus fut le premier d’entre eux qui fut élevé à cette éminente, riche
& brillante Dignité. Cefar la reçut ; Lepide l’ufurpa ; Augufte en fut revêtu
par le Sénat, auffi bien que Jules-Céfar : après lui elle fut comme dévolue à
tous les Empereurs, jufqu’à Gratien.
O n peut connoître, parles Privilèges & les Droits du Souverain Pontife,
que fes fondions & fes devoirs avoient une grande étendue : fon autorité
pouvoit être égale a celle des Empereurs & des Souverains. Chez les Romains
, il ne pouvoit ni fortir d’Italie, ni regarder un corps mort ; privations
q u i , fans doute , ne lui caufoient pas beaucoup de peine.
S e c t i o n V • I.
D e s Prêtres SC des Prêtrejjes , de leurs fonctions, Privilèges SC habillement,
SG comment on les a repréfentés fu r les Médailles.
Chaque Religion, vraie ou faufle, a eu dans tous les temps fes Prêtres,'
comme fes Vidâmes & fes Sacrifices. Adam, avant fa chute, offroit au vrai
Dieu des Hoiries fpirituelles, & des Sacrifices intérieur d’adions de grâces
& de louanges. Après fon péché, devenu, comme fes Defcendans, matériel,
& livré à tout ce qui pouvoit frapper les fens, il crut devoir préfenter à l’Être
Suprême, en expiation & en propitiation, des Vidimes matérielles tirées
des fruits de la terre ou des troupeaux. Dans les premiers temps, les hommes
les prefentèrent d’abord au vrai Dieu qu’ils adoraient ; les Juftes même, à
la différence des autres, y joignirent toujours des Hoiries fpirituelles, en
s’offrant, par la foi & dans l’efprit d’un Chriftianifme anticipé, avec l’Homme-
Dieu qui devoit etre un jour & le Sacrifice & le Prêtre en même temps.
Adam fut le feul Prêtre du premier état de la Nature Humaine fortie des
mains de fon Créateur pure & fans tache, & enrichie des dons céleftes les
plus parfaits, que le Père des lumières a voit verfés fur elle avec une merveilleufe
abondance. Cain & Abel devinrent enfuite les premiers Prêtres de la Nature
Humaine dégradée & dépouillée, par le péché, de fa fainteté & de
fon innocence. Cain repréfente ces hommes charnels, dont l’efprit & le coeur
n ayant aucune part à leurs Sacrifices, ne peuvent en Tendre les Vidimes
agréables à D ie u , qui eft tout efprit & charité. A b e l, au contraire , fut le
modèle de ces hommes pieux , qui adorent Dieu en efptit & en vérité, en
lui offrant leurs Vidimes. Il devint encore la figure du Rédempteur , de la
V id im e adorable, qui feule devoit donner le prix & le mérice a toutes celles
qu une vraie foi pourrait offrir dans toute la fuite des fiècles.
La race desPretresfemblables à Cain s’eft retrouvée & perpétuée, après le
déluge, dans quelques-uns des enfans de Noé. Celle d’Abel s’eft maintenue,
avant & après, dans ceux qui ont été les vrais enfans d’Abraham, plutôt
encore
encore félon la foi que félon la chair. Noé la conduifit jufqu’au déluge, & la
tranfmit enfuite , dans la perfonne de plufieurs Saints Patriarches, jufqu a
Moyfe qui rétablit & régla le culte du vrai D ieu , par Ion ordre & fuivant
les Loix qu’il en avoit reçues de lui-même. Enfin Jefus-Chrift, le Pontife Si
la Victime de la Loi de grâce, eft venu élever le Sacerdoce & 1 Hoftie a leur
fouveraine perfection. .
En attendant la venue du Meffie, le culte établi par Moyfe & Aaron
fubfifta parmi les Juifs, le feul des Peuples de la Terre que le Seigneur s étoit
réfervé pour être fon Peuple particulier. Les autres hommes, livrés à
leur fens réprouvé, fe firent des Dieux félon les paflions dont ils étoient
affedés, & félon la profondeur des ténèbres & des egaremens de leur coeur.
Les faux Dieux qu’on s’étoit fait, du moins pour la plupart, & fur-tout
ceux qu'on regardoit comme les plus grands, avoient leurs Temples, leurs
Chapelles , leurs Autels, leurs Prêtres ou leurs Prêtreffes, enfin un culte
& des Cérémonies qui leur étoient particulièrement affedés. Les Temples
& les Prêtres de Jupiter étoient différens de ceux de Vulcain ; ceux
de Cérès, de Diane, de Proferpine & de Mithras n’avoient rien de commun
avec ceux’ des autres Divinités. Ces Prêtres affeétoient même de porter dans
leurs couronnes, fur la tête, dans leurs habillemens, & c ., des marques diftinc-
tives capables de faire connoître à quelle Divinité ils étoient confacrés.
Ilsformoient de nombreux Collèges, qui avoient leurs Supérieurs, leurs
Loix leurs demeures & leurs affemblées. Pour entrer dans ces Colleges
& être admis au nombre des Prêtres, il falloir avoir les qualités requifes de
l ’efprit & du corps : on en faifoit le choix avec une attention & un fcrupule
capables de faire rougir & de confondre la plupart de ceux q u i, dans la
vraie Religion, font chargés de donner des Mimftres a fes Autels, des 1 af-
teuts à fes brebis, des Peres a fes enfans. ^ 1 « \
Les honneurs qu’on leur rendoit, & les Privilèges quon leur accordoit a
tous, firigulièrement au Souverain Pontife , étoient, lans doute, grands &
diftingués ; mais auffi les fondions & les devoirs quils avoient^a remplir
étoient pénibles , difficiles : on puniffoit avec la dermere fevente leurs
moindres fautes. . ,
O n pourrait s’étendre beaucoup fur cette matière ; mais nous nous bornerons
au détail que nous venons d’en faire : nous aurons encore occalion d en
parler quand il s'agira des Dignités facrées des Romains & des Grecs, lin
attendant, ce que nous avons déjà indiqué fuffira pour faire trouver a nos
Ledeurs quelque agrément à voir & à connoître les Médaillés & les Mo-
ttUmens qui ont du rapport à ces différens objets : cependant afin de ne laiffer
| tien d’effentiel à défirer , nous ajouterons quelques obfervations fur les
; habillemens & les fondions des différens Pretres du Pagamfme. O n en fera
plus d’une fois l’application à la Numifmatique. t n A
! Il faut d’abord convenir que les fondions & les habillemens des 1 retres
& des Prêtreffes ont varié, fuivant les temps & les Pays ou ils exerçoienc
leurs fondions, & même fouvent félon les goûts différens que 1 on pretoit
aux Divinités qu’ils fervoient ; mais on n’a pas repréfenté toutes ces variétés
fur les Médailles, & l’on n’y remarque que ce qui fe prariquoit le plus or 1
nairement dans les endroits ou elles ont ete frappées. C eft pour cette rai on
que nous ne parlerons ici que des fondions & des habillemens es p us or
mires, & tels qu’on les trouve fur ces Médaillés. _ , . , ,
Une fécondé obfervation à faire , c’eft qu’il y avoir a la vérité des