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D e la N u it, du Sommeil, des Songes âC de toutes les Divinités Nocturnes.
L a Nuit a fes avantages les beautés, Toit qu’on la regarde en elle-même,
foit qu’on la conlïdère dans le repos & la tranquillité qui l’accompagnent. En
elle-même, fes ténèbres ne font pas fans lumières : la Lune & les Etoiles l’éclairent
: ces flambeaux, ornemens du globe célefte , ne fe découvrent a nos
yeux que pendant la Nuit. II y a d’ailleurs des faifons & des temps ou les
Nuits ont-quelque chofe de fi charmant, qu’on les préfère quelquefois au
Jour. Il n’en fàlloit pas davantage pour la perfonnifier & la deifîer. Les
uns l ’ont regardée comme fille du Chaos & la Mère dès Dieux &des Hommes
; d’autres l’ont prife pour Diane Lucifere ou Porte-Flambeau. O n en
a fait la femme de l’Êrèbe, & on lui a donné pour enfans , non-feulement
l’Amour, mais encore la Douleur, la Crainte, le Tra va il, l’Envie, le Def-
tin , la Vieilleffe, la Mo rt, la Mifère, les Ténèbres, la. Plainte, la Fraude,
l ’Obftination , les Parques, les Hefpérides & les Songes affreux : ainfi, dit D.
Monfaucon, tout ce qu’il y avoir de fâcheux & de pernicieux dans la vie,
paffoit, félon le fentiment des Anciens, pour un fruit de l’Êrèbe, ou de
l’Enfer & de la Nuit. En ce fens, la Nuit avoit quelque chofe de terrible ,
& capable de caufer de l’horreur -, autre motif puiffant pour la divinifer.
D ’un autre côté, elle procure la tranquillité, le délaffement & le repos,
& de pareils biens méritoient fans doute que fi la fuperftition en faifoit une
Deeffe hideufe, & larepréfentoit comme Mère des plus grands maux, elle
en fît aufli une Déeffe agréable à qui l’on étoit redevable de grands biens.
L e Sommeil a fes avantages ; mais il a aufli quelque chofe de fâcheux
quand il devient involontaire & fi long qu’il reffemble a la mort. Les Songes
quelquefois agréables, & fouvent propres à jetter de l’inquiétude & dit noir
dans lame, ont paru à la fuperftitieufe Antiquité également dignes d’adoration :
enfin , tout ce qui pouvoit infpirer aux Mortels de. l’ambition, de la crainte
& de l’horreur, eft devenu le fujet d’une infinité de Fables fi ridicules qu’elles
.ne méritent qu’un profond filence.
La Nuit eft ordinairement repréfentée, fur les Monumens, comme. une
grande femme, vêtue d’un long habillement noir : fur quelques-uns,. elle a une
torche allumée dans une de fes mains, & porte un grand voile parfemé: d’étoiles
au-deffus de fa tête, comme pour repréfenter le Firmament: fur quel-
ques-autres, elle n’a point de flambeau, ni d’étoiles femées dans fon voile ; mais
il en paraît plufieurs au-deflus d’elle.
Le Sommeil eft Ordinairement repréfenté fous la forme d’un enfant couché
&bien endormi. C e fymbole, & ceux des autres Divinités Nocturnes , ne pa-
roiffent point fur les Médailles connues jufqu’ici ; ainfi nous n’èn donnerons
aucune. Cg que nous avons dit peut fervir à faire connoîtrèxeUes qu’on.pour-,
roit découvrir dans la fuite.
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D e la P a ix .
La Paix eft un bien fi grand, & fi défirable, qu’il feroic étonnant que les
Peuples Idolâtres l’euffent oubliée quand ils ont formé le catalogue de leurs
Divinités. Elle eut fes Temples &fes Autels, comme on le voit par un grand
nombre de Médailles, où l’on en a gravé la repréfentation, avec les légendes
Paçi perpetuoe ; Temple dédié à la Paix perpétuelle ; Ara Pacis ; Autel
de la Paix. | ^
On voit cette D éeffe, à la face de quelques Médaillés, fous la figure d’une
tête de femme belle & jeune, avec un rameau d’olivier devant elle, comme
vrai fymbole de la Paix, & une corne d’Abondance derrière, pour marquer
quels en font les fruits.
Au revers des Médailles, on a quelquefois repréfenté la Paix par la figure
d’un Empereur qui la donne , ou à qui on la demande : fur ces Médailles,
la branche d’Olivier en eft ordinairement le fymbole. La manière la plus
ordinaire dont on la trouve fur ces Monumens, c’eft fous la figure d’une
femme aflife, ou debout, quelquefois avec des ailes ; elle tient un C a ducée,
dont elle menace d’écrafer la tête d’un Serpent, fymbole de la D if-
I corde & de la Guerre : on lit pour légende, Paci Augujlce, ou Augufti. Le
Caducée, fymbole de la Félicité, montre que c’eft par la Paix qu’on en
[ jouit. D ’autres fois cette Déeffe tient de la main droite une Patère au-deffus
d’un A u te l, & une branche d’olivier avec le Caducée de la main gauche.
Cette branche d’olivier & le Caducée font fes ornemens ou fes attributs les
[ plus ordinaires : on a fubftitué à l’une & à l’autre, fur certaines pièces, une
corne d’Abondance, une Pique, ou une Torche allumée dont elle fe ferc j pour mettre le feu à un amas de cuiraffes, de boucliers & d’inftrumens mili-
| taires, &c. Par-tout elle eft aifée à reconnoître, parce qu’il eft rare que fa
forme & fes fymboles ne foient accompagnés des légendes qui l’annoncent
fous le titre de Paix Augufte, ou Paix de l’Augufte ; Paix de 1 Univers ; Paix
I Éternelle ; Paix Perpétuelle, &c. P a x Augujla , ou Augufti ; P a x Orbis
Terrarum ; P a x Æterna; P a x Perpétua. Nous donnons plufieurs Médailles
| frappées à fon honneur, ou à fon occafîon, à la planche X IV e. n°s. zo . z i .
22. Z). 24. z j . z 6. & z 7.
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D e la Patience.
Cette belle qualité, cette vertu fi rare & prefque inconnue aux Païens,
méritoit bien d’avoir chez eux un des premiers rangs parmi leurs Divinités ;
mais ils ne lui rendirent un culte particulier que vers la fin des derniers fiecles
de l’Idolâtrie j encore en lui accordant alors de l ’encens, ils ne la regardèrent
que comme une Divinité peu connue. L ’Empereur Hadrien ne donna jamais
aucune marque de Patience ni de magnanimité, puifque pendant fa vie il
fit éclater la vengeance la plus cruelle contre ceux qu’il üoupçonnoit injufte-
ment d’être fes ennemis, & que dans fa dernière maladie il pouffa 1 impatience
& le défefpoir jufqu’à vouloir fe donner la mort. Cependant c eft en
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